
On espérait une sortie facile du trou, mais, au contraire, on est tombé dans un gouffre sans issue.
L’image restée de cette interminable soirée de mardi dernier et qui résume et illustre fidèlement l’embarras du président et des membres de cette commission est leur sortie de cette réunion décisive sur la pointe des pieds, par une porte dérobée. Pour fuir les quelques journalistes présents dans la salle qui attendaient pour leur demander des explications et des clarifications ou pour ne pas croiser les quelques responsables de clubs qui se seraient estimés lésés et qui allaient exprimer leur désapprobation et même leur indignation ? Quand on annonce de cette façon des verdicts aussi importants sur des dossiers aussi brûlants qui vont chambarder tout le classement, on ne doit pas être surpris de ces flots de critiques qui ont plu.
Certains n’ont pas hésité à parler « d’anguille sous roche » et de décisions qui ont foulé de plain pied les textes en vigueur en attendant leur amendement après la fin de la saison. Tout ça dans le seul objectif de faire revenir au premier plan le mérite sportif, les résultats acquis sur le terrain et de redonner de la crédibilité à un championnat dont l’image a été ternie par ces nombreuses victoires sur le tapis.
« Et de se poser cette question inévitable : pourquoi Moez Nasri, maintenant président de la Fédération, n’a pas eu ce même « courage » d’assumer les décisions des organes juridictionnels prises avec sa bénédiction, que quand il a annoncé lui-même, en plein jour devant caméras et micros en tant que président de la Commission nationale d’appel à l’époque, le rejet et l’avortement des listes candidates aux élections du Bureau fédéral des mois de mars et de mai 2024 ?
Imprudence fatale
Si on est arrivé à ce tollé quasi général avec trois clubs (le CA, l’ASG et EGSG) qui ont rejeté les verdicts qui les concernent et qui ont décidé d’aller au TAS, c’est parce que ce Bureau fédéral n’a pas été trop soucieux d’éviter le conflit d’intérêts en choisissant « les siens» dans les différentes commissions juridiques, alors qu’elles devaient être équilibrées et composées de juristes neutres et compétents pour que ce cirque de prise de décision par vote ne fasse pas autant délier les langues.
Le président de la Commission nationale d’appel, Ridha Sellami, était un équipier et premier adjoint de Moez Nasri dans ce même organe juridictionnel. Il est tout à fait normal qu’on élabore les scénarios les plus fous et qu’on réclame la dissolution de cette commission désignée « sur mesure » qui, au lieu d’apaiser le paysage sportif, l’a plutôt embrasé.
Des avocats qui ont mis de l’huile sur le feu
Il faut reconnaître aussi que depuis que des avocats de droit commun se sont introduits dans le monde sportif, les choses ont empiré et les débats juridiques, auparavant sereins et mesurés, sont devenus assez bouillonnants et envenimés. Quand un soi-disant expert dans les règlements sportifs comme Anis Ben Mime lit et interprète les articles 46 et 53 du Code disciplinaire à l’envers pour justifier la restitution des 4 points à son client l’ASS et le retrait des deux points accordés en première instance au CA suite à sa réclamation formulée contre l’USBG, on ne peut que se taper la tête contre le mur.
Cet avocat aurait dû se montrer plus courtois en évitant de demander dans une émission radio aux autres juristes d’apprendre à lire le français, car il est tombé lui-même dans le piège de la confusion entre ces deux articles 46 et 53 qui sont bien distincts l’un de l’autre et parlent de deux cas de figure différents.
L’article 46 évoque le cas du dirigeant passible d’une amende de 20.000 DT au cas où il serait présent sur l’aire de jeu ainsi que dans ses abords immédiats ou prenant place sur le banc de touche, sans avoir (phrase et condition-clés) « purgé intégralement sa sanction d’interdiction de banc ».
Amende qui doit être payée avant le prochain match sous peine que son équipe perde le match par pénalité en cas de réclamation du club adverse. L’article 53 évoque, lui, le cas du dirigeant qui « a purgé l’intégralité de sa sanction d’interdiction de banc mais qui demeure suspendu en cas de non-acquittement de l’amende qui lui a été infligée ».
Aucun lien entre les deux articles. L’article 46 ne s’applique pas à ce cas de figure complètement différent et les réclamations sur la base de l’article 53 par le Club Africain contre le dirigeant de l’USBG, Aymen Chandoul, et de cette même USBG et de l’ASG contre un dirigeant administratif ou technique de l’ASS, qui ont purgé l’intégralité de leur sanction d’interdiction de banc sans que leurs clubs respectifs ne se soient acquittés de l’amende, auraient dû aboutir.
Si on respecte les règlements à la lettre, on aurait dû voir la confirmation en appel de la perte des matches par pénalité des deux clubs fautifs, l’USBG et l’ASS, comme décidé par une lecture juste des deux articles dans le verdict de première instance.
La Commission nationale d’appel, de laquelle on espérait une sortie de l’impasse juridique sans dégâts, a, au contraire, enfoncé plus le couteau dans la plaie et fait que la crédibilité du championnat soit plus que jamais remise en question. Avec toutes les conséquences et retombées néfastes possibles pour l’année prochaine où nous aurons à préparer et à disputer la Coupe d’Afrique et la Coupe du monde.