Accueil Culture 5e Rencontre du Théâtre Arabe à Hanovre – Kaouthar Slimani, membre de l’équipe artistique : « Nous valorisons l’art scénique dans une époque bouillonnante »

5e Rencontre du Théâtre Arabe à Hanovre – Kaouthar Slimani, membre de l’équipe artistique : « Nous valorisons l’art scénique dans une époque bouillonnante »

Criant d’humanité et de vérités, la 5e rencontre du théâtre arabe à Hanovre prend vie grâce à ses invités triés sur le volet, sa sélection d’œuvres arabes, et sa poignée de spécialistes et académiciens qui ne cessent de faire et de défaire l’actualité de cette manifestation engagée. Cette rencontre allie engagement, solidarité et dialogue en puisant dans les arts scéniques, élégamment présentés dans le Pavillon culturel de cette cité allemande. Derrière la façade, une armée de l’ombre qui veille sur le bon déroulement du festival. Kaouthar Slimani, responsable artistique et de production, évoque le travail de toute une équipe, résistante face aux affres du temps. Interview.

Qu’est-ce qui distingue cette édition des quatre précédentes ?

Le travail en amont qui s’est fait au gré des mouvements des révolutions, des guerres, des explosions sur une dizaine d’années déjà, et particulièrement, au fil de ce qui se passe dans le monde arabe récemment et de nos jours. Ça bouillonnait et la vie des artistes avec qui on avait envie de collaborer, issus des pays arabes, vivaient une crise, d’où l’urgence de lancer cette édition et de réaliser le festival, avec ses invités en intégralité, et un aspect académique en plus, avec Torsten Jost et Khaled Amine. Tout s’est fait sous le prisme d’une conscience collective. Ce qui se passe dans le monde arabe change à une vitesse hallucinante, et empire. Les rencontres émanent d’un sentiment de doute, de crainte, mêlé à celui de la résistance, sujette à des dilemmes et à de l’hésitation. Cette 5e édition a émergé suite à l’absurdité de l‘époque et à sa gravité. Autant de composantes qui nous ont incités à maintenir ces rencontres, aujourd’hui plus que jamais auparavant.  

De qui s’est composée l’équipe ? 

Fetah Diouri et Sabine Trötschel sont les fondateurs depuis 2012. Pour la prod, Elke Cybulski et moi–même qui étions à la dernière édition du festival en date de 2022. Pour ma part, je m’occupe du département théâtre au Pavillon d’Hanovre avec Tomy Nugyen. Erik Veenstra et Mich Belkhir gèrent l’aspect technique. Les deux assurent une coordination technique de haut niveau. Sans oublier, Abdalrahman Alqalak, poète palestinien et Matthias Alber, responsable Booking. 

Il y a le projet Magma et la 5e rencontre du théâtre arabe d’Hanovre. Est-ce qu’ils sont dissociés ? 

«Magma», c’est la thématique choisie. Nous valorisons l’art scénique dans une époque bouillonnante, glissante, de crainte et de peur. Pour des raisons administratives, nous avons dû choisir et garder les deux appellations. L’appellation d’un projet séparé, avec un thème choisi doit être élaboré. Pour «Magma», on a hésité à le retenir de peur que les gens ne saisissent pas le sens du terme, surtout quand on le traduit en arabe. Ce qui se passe dans le monde arabe, on le sent à l’échelle organique, physique. C’est profond, douloureux et changeant. Comme un vrai Magma… Chaque édition est ancrée dans son époque et la raconte. La sélection des productions est faite selon des thèmes. La sélection se fait selon les créations qui font écho le plus dans l’ère que nous vivons.  

L’équipe a-t-elle eu des problèmes liés aux visas ? 

En 2022, oui, avec sa thématique «Héritage, perspectives, horizons». Mais cette année, on a eu la chance d’avoir toutes les productions, ayant déjà leurs visas ou qui ont des doubles nationalités. 

On a établi des relations fortes avec le Goethe Institut dans le monde arabe et ici pour faciliter la circulation auprès des artistes. On a pu trouver les moyens pour renforcer le soutien. 

Ces rencontres qui ont eu lieu depuis 2012. Pourquoi ne s’organisent-elles pas plus fréquemment ? 

Pour des raisons financières et liées à la pandémie du Covid-19 aussi. 

Maintenir une manifestation spécialisée dans le théâtre arabe en Allemagne, par ces temps, c’est un défi… 

Au niveau des bailleurs de fonds, ils veulent comprendre quel impact peut avoir une manifestation comme celle-ci auprès des communautés arabes en Allemagne. Quelle est son importance ? Quel effet va–t-elle produire ? Quel est son ampleur ? Son influence auprès des Allemands aussi. C’est pour rapprocher les nations, et les cultures qu’on maintient cette manifestation. C’est pour susciter le débat, chasser les préjugés, les stéréotypes. Nous tenons à donner une autre image des Arabes. Beaucoup de questionnements foisonnent sur le travail artistique vu et à chacune de nos manifestations. 

Quel impact ont ces rencontres sur les artistes arabes conviés ? 

Il y a des troupes ou des artistes qui sont habitués à l’Europe ou à l’Allemagne. Celles et ceux qui m’ont donné leur impression étaient surtout impressionnés par le Pavillon d’Hanovre, l’endroit où se déroule la manifestation et la vocation qu’il a d’être ouvert gratuitement à tout le monde y compris et surtout pour les nécessiteux. Ces derniers, de passage, succombent à l’endroit et sont attirés par les activités du centre culturel. C’est cette alchimie avec les artistes venus du monde arabe qui ensorcelle et prend vie, au final. 

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