
L’économiste Ridha Chkandali a mis en garde, ce vendredi 25 avril 2025, contre des répercussions économiques et financières qu’il qualifie de « catastrophiques » si les dernières prévisions de croissance du Fonds monétaire international (FMI) pour la Tunisie venaient à se confirmer.
Intervenant sur les ondes d’Express Fm, Chkandali a souligné que les effets seraient particulièrement lourds sur les équilibres budgétaires internes, en particulier les recettes fiscales qui, selon lui, « connaîtront une baisse significative ».
Le professeur d’économie a rappelé que le FMI a revu à la baisse ses projections de croissance pour la Tunisie à 1,4 % en 2025, contre un objectif de 3,2 % inscrit dans la loi de finances. Il estime toutefois que la croissance réelle pourrait être encore plus faible, les prévisions du FMI ayant été établies avant l’annonce par le président américain de nouvelles mesures protectionnistes, notamment l’instauration de droits de douane sur plusieurs pays, ce qui pourrait entraîner un ralentissement de l’économie mondiale et une poussée inflationniste.
« Si ce scénario se confirme – ce qui me semble le plus probable –, les conséquences seront extrêmement graves, en particulier pour les équilibres internes de l’État et les recettes fiscales, qui subiront une forte contraction », a-t-il averti.
Selon Chkandali, la Tunisie a déjà perdu près de deux milliards de dinars par an en recettes fiscales au cours des deux dernières années, en raison de l’incapacité à atteindre les objectifs de croissance. Il estime que le maintien d’une politique fondée exclusivement sur l’autofinancement pourrait se traduire par un alourdissement de la pression fiscale sur les citoyens ou par un recours accru à l’emprunt auprès de la Banque centrale. « Dans les deux cas, les répercussions économiques et financières seraient véritablement catastrophiques », a-t-il martelé.
S’agissant de la participation tunisienne aux réunions de printemps du Groupe de la Banque mondiale et du FMI, qui se tiennent à Washington du 21 au 26 avril, Chkandali a exprimé des réserves : « Si cette participation se limite à assister aux conférences, ce serait une occasion manquée. Ces discussions peuvent être suivies à distance ; l’essentiel est de tirer profit des solutions proposées, notamment face à la crise provoquée par les droits de douane américains ».
Il a toutefois estimé qu’une participation active reste possible si le gouvernement tunisien dispose d’un programme économique clair, crédible et structuré. « Si ce programme existe bel et bien – même si, à ce jour, ni ses détails, ni son intitulé, ni ses grandes lignes ne sont connus –, le rôle du ministre de l’Économie et de la Planification lors de ces réunions bilatérales serait de convaincre les partenaires étrangers et les institutions financières que la Tunisie est en mesure de réaliser les 3,2 % de croissance inscrits dans le budget de l’État, soit plus du double des projections du FMI », a-t-il expliqué.
Ridha Chkandali a toutefois exprimé un scepticisme profond quant aux chances de réussite de cette démarche dans le contexte politique actuel. « La mission est extrêmement difficile, voire quasi impossible, dans les conditions internes actuelles, marquées par la fragmentation, les divisions et une atteinte à l’indépendance du pouvoir judiciaire », a-t-il souligné.
Et d’ajouter : « Sans une justice indépendante, il est illusoire de parler d’un climat des affaires sain – un critère déterminant dans l’évaluation et le classement des pays ».