Accueil A la une Civilisation carthaginoise : Une récente étude dément la domination de l’ascendance phénicienne

Civilisation carthaginoise : Une récente étude dément la domination de l’ascendance phénicienne

La revue scientifique Nature a publié le 23 avril 2025 une étude révolutionnaire qui a révélé des résultats inattendus concernant l’identité génétique des habitants de Carthage dans l’Antiquité, ce qui constitue un changement important dans notre compréhension des origines de la civilisation carthaginoise.

L’étude a été menée par une équipe internationale de généticiens de l’université de Harvard et de l’institut Max Planck en Allemagne, qui a utilisé des techniques modernes pour analyser l’ADN extrait d’anciens restes humains dans le bassin méditerranéen.

Des résultats qui corrigent l’histoire traditionnelle

On a longtemps cru, sur la base de récits et de légendes anciens, que la ville de Carthage avait été fondée au IXe siècle avant J.-C. par une princesse phénicienne nommée Alyssa (Didon), qui avait fui la ville de Tyr, dans l’actuel Liban. L’histoire de la peau de taureau a été un symbole d’intelligence politique et le début d’une civilisation ancienne traditionnellement attribuée aux Phéniciens.

Cependant, la nouvelle étude – la plus importante du genre – a analysé les gènes de 203 individus provenant de sites archéologiques de Carthage, de Sicile, de Sardaigne et du sud de l’Espagne, datant de 1200 av. J.-C. à 500 apr. Les résultats ont montré que l’empreinte génétique des Phéniciens dans la population de Carthage était très faible, contre une grande proportion d’origines locales (nord-africaines), ainsi que des contributions de populations méditerranéennes, en particulier de Sicile et de Sardaigne.

Les Phéniciens : Une influence culturelle plutôt que démographique

Les données indiquent que les Phéniciens, malgré leur rôle commercial et culturel de premier plan, ne constituaient pas la majorité de la population de Carthage, mais se limitaient à quelques élites. Leur contribution a peut-être consisté à diffuser l’alphabet, les traditions religieuses et certains styles architecturaux, sans pour autant aboutir à une colonisation de masse.

Il est intéressant de noter que les chercheurs ont noté des changements culturels et démographiques qui se sont produits au sixième siècle avant l’arrivée de la population de Carthage.

Relecture de l’identité carthaginoise

À la lumière de ces faits, il devient nécessaire de réévaluer les récits historiques qui ont prévalu pendant des siècles et qui réduisaient Carthage à une extension de la Phénicie. La civilisation carthaginoise, comme le montre cette étude, est le produit d’un environnement nord-africain et méditerranéen diversifié qui s’est développé en interaction avec son environnement, et n’était pas un simple clone d’une civilisation orientale.

« Ces résultats montrent clairement que les changements culturels majeurs étaient liés à de profondes mutations des populations locales, et non le résultat d’une colonisation extérieure à grande échelle », a déclaré le professeur David Reich, l’un des chercheurs ayant contribué à cette étude. La chercheuse britannique Eve MacDonald a souligné que « l’appartenance à Carthage n’était pas une question d’ascendance génétique, mais de culture locale, de communauté et d’identité ».

L’étude publiée dans Nature ne nie pas le rôle des Phéniciens dans l’histoire de Carthage, mais le replace dans son contexte : Influence culturelle, mais démographie limitée. Il semble que Carthage ne soit pas le fruit d’un « tour de passe-passe », mais plutôt le résultat de siècles d’interaction entre les peuples d’Afrique du Nord et de la Méditerranée.

Aujourd’hui, la science nous invite – une fois de plus – à reconsidérer les récits que nous avons reçus et à nous appuyer sur des preuves physiques et des recherches scientifiques pour tirer des conclusions.

Carthage, comme le confirme cette étude, était une civilisation tunisienne avec des racines et une identité tunisiennes, et non une simple ramification de la Phénicie orientale.

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