
Du 18 au 22 juin 2025, le Cinéma Africa accueille la deuxième édition du Festival international Jean Rouch « Hors les murs Tunis », un événement unique qui conjugue création documentaire et recherche en sciences sociales.
La Presse — Le Festival international Jean Rouch «Hors les murs Tunis» revient pour une deuxième édition du 18 au 22 juin 2025. Organisé au Cinéma Africa par l’Institut de recherche sur le Maghreb contemporain (IRMC), avec le soutien du Comité du film ethnographique, cet événement propose une programmation dense de projections, débats, ateliers et rencontres qui placent le documentaire au cœur des enjeux contemporains.
Considéré comme l’un des grands rendez-vous européens du film documentaire lié aux sciences sociales, le Festival Jean Rouch poursuit l’héritage intellectuel et cinématographique de son fondateur, Jean Rouch (1917–2004), ethnologue visionnaire et pionnier du cinéma anthropologique. Depuis sa création à Paris en 1982, le festival s’exporte régulièrement dans différentes villes à travers ses éditions dites «hors les murs», proposant des sélections adaptées aux contextes locaux, tout en préservant sa vocation de transmission et de dialogue interculturel.
À Tunis, l’édition 2025 réunit sept films documentaires, chacun projeté en présence de son ou sa réalisatrice, et accompagné de débats ouverts au public avec des chercheurs en sciences sociales. Ce dispositif favorise une lecture croisée des œuvres, où le regard artistique s’enrichit de perspectives analytiques issues de la sociologie, de l’anthropologie ou encore de l’histoire contemporaine.
Des films pour interroger le monde
Parmi les œuvres sélectionnées, le documentaire «La couleur du phosphate» de Ridha Tlili, qui viendra clore le festival, se distingue par son regard critique sur l’impact social et écologique de l’exploitation minière en Tunisie. Le cinéaste animera également une masterclass ouverte au public, où il reviendra sur les enjeux de la représentation documentaire dans les contextes postcoloniaux. Les autres films, choisis pour la richesse de leurs approches thématiques et esthétiques, explorent des sujets variés tels que les migrations, les mémoires collectives, les transformations rurales ou encore les pratiques culturelles en mutation.
Chacune de ces œuvres contribue à construire un espace de réflexion sur les réalités sociales contemporaines, vues depuis les marges ou les interstices du monde globalisé. Au-delà des projections, le festival s’inscrit dans une volonté de transmission et de formation, en proposant des ateliers d’initiation à l’écriture documentaire et ethnographique. Destinés à des étudiants en cinéma et en anthropologie visuelle, ces ateliers réuniront des jeunes venus du Maghreb, d’Afrique de l’Ouest et d’Europe, sélectionnés sur candidature.
Encadrés par des professionnels du cinéma et des chercheurs, ces ateliers visent à initier les participants aux outils de la narration documentaire, tout en les sensibilisant aux enjeux éthiques et méthodologiques propres à la recherche de terrain.
En créant ce pont entre théorie et pratique, entre savoir académique et expression artistique, le Festival Jean Rouch affirme une ambition : celle de penser le monde à travers le regard, et de former une génération capable de le documenter autrement. Avec cette édition tunisienne, le festival confirme sa vocation transnationale et interdisciplinaire. Il transforme la salle obscure en agora, où le public, les cinéastes et les chercheurs se rencontrent pour penser ensemble les réalités sociales et culturelles de notre temps. Dans un contexte marqué par les mutations géopolitiques, environnementales et sociales, le documentaire devient un outil d’enquête, de mémoire, mais aussi de résistance. Le Festival Jean Rouch, en tissant des liens entre les mondes du cinéma et de la recherche, contribue à cette relecture du réel, à travers des images qui racontent, interrogent et dérangent.