
L’ambassade d’Italie à Tunis a organisé, mercredi soir, une réception officielle à l’occasion du 79e anniversaire de la Fête de la République italienne, réunissant responsables tunisiens, diplomates, chefs d’entreprise et représentants de la société civile.
La Presse — Dans un contexte marqué par des tensions géopolitiques majeures et des défis communs en Méditerranée, l’événement a été l’occasion de réaffirmer la profondeur et la solidité des relations bilatérales entre l’Italie et la Tunisie.
Lors de cette cérémonie, l’ambassadeur d’Italie en Tunisie, S.E. Alessandro Prunas, et le ministre tunisien de l’Intérieur, Khaled Nouri, ont tour à tour souligné la qualité exceptionnelle du partenariat économique, politique, culturel et social qui unit les deux pays.
Des messages forts des autorités italienne et tunisienne
Dans son allocution, l’ambassadeur Prunas a rendu hommage à l’héritage historique de la République italienne, fondée le 2 juin 1946 par un référendum populaire qui a marqué l’abandon de la monarchie au profit d’un régime démocratique. “La Constitution italienne, adoptée en 1948, est un socle fondamental qui consacre les principes de liberté, de démocratie, de paix, de coopération entre les nations et le rejet de toute forme de violence”, a-t-il déclaré.
Mais au-delà de ce rappel historique, le diplomate italien a inscrit cet anniversaire dans le contexte géopolitique actuel, évoquant notamment la guerre en Ukraine et la crise au Moyen-Orient. “L’Italie soutient fermement l’Ukraine dans sa résistance contre l’agression russe, et sera l’hôte d’une conférence internationale en juillet prochain pour discuter de la reconstruction du pays”, a-t-il annoncé.
Sur la question de Gaza, l’ambassadeur a appelé à un cessez-le-feu immédiat, un accès humanitaire sans entrave et une relance sérieuse du processus de paix basé sur la solution à deux États, reprenant les propos du président italien Sergio Mattarella. L’ambassadeur a aussi dénoncé la résurgence de l’antisémitisme dans le monde, qu’il a qualifiée de “menace universelle à la paix et à la coexistence”.
Pour sa part, le ministre Khaled Nouri a indiqué qu’en ce moment crucial pour la région, la Tunisie réaffirme, avec force et conviction, son soutien indéfectible au peuple palestinien dans sa lutte légitime pour la liberté, la dignité et la reconnaissance de ses droits fondamentaux.
“La Tunisie continue de plaider pour une solution juste et durable fondée sur le droit international, notamment la création d’un État palestinien indépendant, souverain et viable, avec Al-Qods pour capitale… Nous condamnons avec la plus grande fermeté toutes les formes d’agression, d’occupation et de violences qui frappent les populations civiles palestiniennes. Nous appelons toutes les parties à un cessez-le-feu immédiat, afin de préserver la vie humaine et d’ouvrir la voie à un dialogue politique sincère”, a assuré le ministre.
Il a ajouté que la Tunisie soutient activement les efforts internationaux visant à garantir le respect des droits humains et le retour à la paix, fondée sur la justice et le respect de la souveraineté des peuples. “Nous invitons la communauté internationale à ne pas rester silencieuse face aux souffrances du peuple palestinien et à agir avec détermination pour mettre fin à cette tragédie humanitaire”, a-t-il encore précisé.
Un partenariat économique et industriel dynamique
Sur un autre plan, le ministre de l’Intérieur a salué cette “amitié fidèle et stratégique” qui unit la Tunisie et l’Italie. Khaled Nouri a souligné que ces liens sont porteurs de stabilité et de progrès, et que la Tunisie entend renforcer cette coopération dans tous les domaines. “L’Italie est aujourd’hui l’un des partenaires économiques les plus influents de la Tunisie”, a-t-il affirmé, rappelant que le pays est le premier investisseur étranger dans le secteur de l’énergie et le deuxième partenaire commercial de la Tunisie. “Plus de 1.000 entreprises italiennes sont présentes en Tunisie, générant environ 83.000 emplois”, a-t-il ajouté.
Le ministre a en outre mis en avant les échanges humains et culturels, citant notamment la venue de plus de 148 000 touristes italiens en Tunisie en 2024, ce qui contribue à renforcer la proximité entre les deux peuples.
Ceci pour dire que le partenariat économique entre l’Italie et la Tunisie s’inscrit comme un moteur essentiel de leur coopération bilatérale. Dans ce même cadre, l’ambassadeur Prunas a rappelé que la Tunisie est le premier marché africain pour les exportations italiennes, tandis que l’Italie occupe la deuxième place mondiale en tant que marché pour les produits tunisiens. Ce dynamisme commercial s’accompagne d’une coopération active dans plusieurs secteurs stratégiques : énergie, agriculture, gestion de l’eau, industrie et PME.
Parmi les projets majeurs, l’ambassadeur a mis en lumière l’engagement italien de 400 millions d’euros sur trois ans pour soutenir des projets structurants en Tunisie, dans le cadre de la déclaration politique signée à Rome en janvier dernier. Cette enveloppe financière alimente notamment le “Plan Mattei” qui inclut le projet “Tanit”, destiné à accompagner les agriculteurs tunisiens dans la lutte contre la sécheresse, et une ligne de crédit dédiée aux petites et moyennes entreprises tunisiennes, actuellement en cours de deuxième édition.
Pour sa part, le ministre Nouri a aussi évoqué le projet stratégique d’interconnexion électrique Elmed, qui vise à connecter le réseau tunisien à celui de l’Italie, renforçant ainsi la sécurité énergétique et les échanges entre l’Afrique du Nord et l’Europe. Ce projet, porté conjointement par l’entreprise italienne Terna et la Société tunisienne de l’électricité et du gaz (Steg), représente un levier majeur pour la transition énergétique méditerranéenne.
De plus, un projet agricole et hydraulique d’envergure de 260 millions d’euros est en préparation, avec pour objectif d’améliorer la sécurité hydrique et la productivité agricole en Tunisie, répondant à des enjeux cruciaux pour la région.
Une coopération migratoire exemplaire
Le volet migratoire est un autre pilier de cette relation bilatérale. Khaled Nouri a mis en avant le programme bilatéral qui permet chaque année à 4.000 travailleurs tunisiens d’accéder légalement au marché du travail italien. Il a insisté sur la nécessité d’une approche intégrée combinant sécurité, développement économique, création d’emplois et formation professionnelle pour gérer les flux migratoires de manière humaine et durable.
De son côté, l’ambassadeur a souligné la coopération active dans le cadre du “Processus de Rome”, visant à lutter contre la migration irrégulière et à démanteler les réseaux de traite humaine. Ces efforts conjoints traduisent une volonté partagée de traiter les questions migratoires avec responsabilité et respect des droits humains.
Mais au-delà des aspects économiques et sécuritaires, la coopération culturelle entre l’Italie et la Tunisie est particulièrement vivante. Deux expositions majeures illustrent ce lien profond : celle consacrée à la ville antique de Zama, présentée au Colisée de Rome, et celle sur la présence italienne en Tunisie, accueillie par le musée du Bardo. Ces événements témoignent d’un patrimoine commun et d’une histoire partagée.
Dans ce même cadre, l’ambassadeur a souligné la vitalité de la langue italienne en Tunisie, où plus de 50.000 élèves la choisissent comme langue étrangère, signe d’une affinité durable entre les deux peuples.
Par ailleurs, plus de cinquante missions archéologiques italiennes sont actives sur le territoire tunisien, renforçant les échanges scientifiques et universitaires. Ces collaborations s’étendent à des partenariats entre universités prestigieuses, telles que l’Université de Bologne et La Sapienza de Rome, et les institutions tunisiennes.
Finalement et non moins important, l’ambassadeur Alessandro Prunas et le ministre Khaled Nouri ont insisté sur l’importance de consolider une coopération méditerranéenne renforcée pour relever ensemble les défis régionaux liés à la sécurité, à l’environnement et au développement durable.
“Nos relations ne sont pas limitées par des frontières géographiques, mais nourries par une mémoire commune et un socle de valeurs humaines partagées”, a souligné le ministre tunisien.