Accueil Culture Mes Humeurs : Selfies, instagram : et moi et moi et moi

Mes Humeurs : Selfies, instagram : et moi et moi et moi

La Presse Le phénomène est universel, c’est le premier de l’histoire qui rapproche les générations, les classes sociales, les distances, ou les éloigne ; bref le pouvoir du selfie règne sur l’humanité et la domine, avec apparemment beaucoup de plaisir et de satisfaction ; pardon avec beaucoup d’autosatisfaction et de narcissisme (au Canada un selfie s’appelle «egoportrait»). Le terme de selfie apparaît au début des années 2000, sa pratique est intimement liée au développement du smartphone, il est un simple reflet du quotidien, comme il peut être aussi un outil de narration visuelle.

On estime qu’en 2025, plus de 92 millions de selfies sont pris chaque jour dans le monde, soit plus de 1 milliard par mois. Jeunes adultes (18-34 ans) sont les plus gros producteurs de selfies. Les femmes prennent en moyenne plus de selfies que les hommes, surtout dans la tranche 16-29 ans.

Aujourd’hui, la célébrité (et même la gloire) se gagne au nombre de milliers ou de millions de selfies. Dans une ancienne Humeurs, j’évoquais le cas de Taylor Swift, une superstar de 34 ans, chanteuse et icône pop américaine, de notoriété exceptionnelle, idole des temps modernes, appuyée par plus de 283 millions d’abonnés sur Instagram. Elle fut pendant les élections américaines en 2020 alliée au clan démocrate, appelant les Américains par son cookie à voter Biden-Harris… elle en a fait voir de toutes les couleurs aux responsables de la communication des Républicains qui la traitaient par tous les noms. Cet exemple montre la capacité et l’influence des selfies dans l’engagement, notamment politique.

Des exemples il y en a par milliers; de nos jours, un acteur émergent dans une filière (télé, cinéma, théâtre ou arts plastiques…) se doit d’avoir une valeur ajoutée, qui comprend le selfie, sinon, dans bien des cas, il disparaît. Les hommes politiques n’en sont pas exempts, les sportifs non plus. L’époque le sollicite fermement, l’époque l’exige.

Les notoriétés publiques ne refusent pas les appels de la foule qui réclame un selfie, avouez que poster un selfie en compagnie d’un président ou d’une vedette du football ou de cinéma est tout de même plus valorisant et flatteur que d’en poster un avec son nouveau bébé ou son chien. La mise en scène de soi ou parfois de son proche entourage est devenue le reflet de la société, personne (surtout parmi les jeunes) ne veut en être exclu, le paraître dominant le monde, Narcisse maîtrise la société et les sentiments.

La photographie offrait à tous la possibilité d’accéder au portrait, de manière quasi-illimitée et avec une impression de « vrai », de conformité sans égale. Sur le portrait en photographie (évoquant le narcissisme), Baudelaire  écrivait ainsi (salon de 1859) : « La société immonde se rua, comme un seul Narcisse, pour contempler sa triviale image sur le métal », de nos jours qui, parmi les jeunes, se souvient du processus photographique, la chambre noire, les étapes, la transformation de l’image, etc? Le selfie est partout, rapide, instantané, il se répand comme une épidémie ; la modestie, le retrait, la candeur et l’effacement, c’est fini, l’époque est au « et moi, et moi et moi ».

Charger plus d'articles
Charger plus par Hamma Hannachi
Charger plus dans Culture

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *