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Ingénieurs tunisiens : Créer un climat propice à la valorisation de la profession

L’ingéniorat est une discipline ou un domaine qui concerne tous les maillons du système économique et social tunisien de l’aéronautique, à l’informatique, à l’industrie, en passant par les NTIC. En plein branle-bas de combat durant cette dernière décennie, il ne saurait rester plus longtemps à végéter sans réformes, ou nivellement qualitatif vers le haut…

La Presse — Tout comme les jeunes médecins, les ingénieurs sont parfois en proie à la précarité professionnelle et au manque d’appui institutionnel. Sans ingénieurs dûment qualifiés à leurs postes et compétents dans leur spécialité, le pays tarde à connaître la relance économique, tant recherchée. Ainsi, la nomination d’un nouveau président à la tête de l’Ordre des ingénieurs tunisiens, en l’occurrence Mohsen Gharsi, est venue chambouler la donne dans un secteur, qui bat de l’aile depuis la révolution et même bien avant.

A telle enseigne que l’on se demande ce qu’il faut faire pour le voir décoller singulièrement en Tunisie, en proie à de grandes aspirations. C’est qu’en parallèle la fuite des cerveaux est une réalité qui continue de peser sur toutes les têtes et constitue une menace sérieuse pour les équilibres macroéconomiques de la Tunisie qui ne peut plus payer le prix fort de la fuite de son élite en ingéniorat.

Salaires historiquement bas par rapport aux réalités du marché mondial, problèmes d’équivalences dans les diplômes obtenus et de requalifications, carrière à l’évolution pernicieuse, manque de valorisation et beaucoup d’autres points qui obligent la majorité d’entre eux à plier bagages, au grand dam des décideurs et gouvernants qui n’arrivent plus à orienter le pays, vers l’évolution économique tant promise après la révolution du jasmin.

La menace est réelle et pèse encore de l’avis même des décideurs du secteur qui veulent parer au plus urgent,  à savoir sauver l’élite d’un nouveau flux de départ vers le “Vieux continent». C’est sans doute le point le plus saillant. Un nombre croissant de jeunes ingénieurs fait face à des difficultés pour trouver un emploi stable et bien rémunéré, ce qui peut mener à la désillusion et à l’émigration.

La persistance de ce phénomène souligne les défis structurels du marché du travail tunisien et la nécessité d’améliorer les conditions pour retenir les compétences. En parallèle, la situation des ingénieurs en Tunisie depuis 2011 est un sujet complexe, marqué par des évolutions significatives sur les plans matériel et statutaire.

Depuis la révolution de 2011, la Tunisie a traversé des périodes de transition politique, économique et sociale qui ont inévitablement impacté le marché de l’emploi, y compris celui des ingénieurs. Les défis incluent une croissance économique fluctuante, des taux de chômage élevés, notamment parmi les jeunes diplômés, et des réformes structurelles.

De surcroît, la valeur sur le marché de l’emploi tunisien est de plus en plus liée à l’expérience professionnelle, aux compétences spécifiques, notamment en nouvelles technologies, et à la capacité d’adaptation.

Situation matérielle et employabilité

Après 2011, et particulièrement avec les difficultés économiques persistantes, le pouvoir d’achat des ingénieurs, comme celui de la majorité des Tunisiens, a été érodé par l’inflation. Les augmentations salariales dans le secteur public n’ont pas toujours suivi le rythme de la hausse du coût de la vie.

Le décalage entre le secteur public et privé a compliqué la situation, au lieu de la décanter.  Traditionnellement, les salaires dans le secteur public ont été plus stables mais potentiellement moins attractifs que dans certains segments du secteur privé, notamment pour les ingénieurs hautement qualifiés ou spécialisés (TIC, énergie, etc.).

Cependant, les différences peuvent varier considérablement en fonction de l’entreprise, du secteur et de l’expérience. Le chômage des jeunes ingénieurs est une préoccupation majeure. Beaucoup de nouveaux diplômés peinent à trouver un emploi correspondant à leurs qualifications, ce qui peut les conduire à accepter des postes moins rémunérateurs ou en dehors de leur domaine, ou encore à prolonger leur période de recherche d’emploi.

Le sous-emploi, où un ingénieur occupe un poste ne nécessitant pas son niveau de qualification, est également une réalité qui affecte le revenu potentiel.

La difficulté à trouver des postes bien rémunérés et des perspectives de carrière satisfaisantes a poussé de nombreux ingénieurs tunisiens, en particulier les plus jeunes et les plus qualifiés, à émigrer, principalement vers l’Europe (France, Allemagne) et les pays du Golfe. Cette «fuite des cerveaux» a un impact sur le stock de compétences disponibles en Tunisie.

Les conditions de travail peuvent varier grandement. Si certaines entreprises, notamment multinationales ou grandes entreprises tunisiennes, offrent des environnements de travail modernes et des avantages sociaux, d’autres peuvent présenter des conditions moins favorables, surtout dans les petites et moyennes entreprises ou dans des secteurs moins structurés.

Reconnaissance et valorisation accrues

Le statut d’ingénieur en Tunisie jouit d’une reconnaissance sociale indéniable. L’ingénierie est perçue comme une profession prestigieuse et exigeante. Cependant, cette reconnaissance ne se traduit pas toujours par une valorisation matérielle et statutaire adéquate, surtout pour les jeunes diplômés.

Dans ce cadre, l’OIT joue un rôle crucial dans la défense des intérêts des ingénieurs, la régulation de la profession et la promotion de son éthique. Il a été actif dans les revendications pour l’amélioration des salaires et des conditions de travail des ingénieurs, notamment dans le secteur public.

Des négociations ont eu lieu, et continuent d’avoir lieu, entre les syndicats, l’OIT et le gouvernement ou les employeurs pour améliorer le statut et les grilles salariales des ingénieurs, en particulier dans la fonction publique. Des avancées ont parfois été obtenues, mais leur impact réel est souvent tempéré par le contexte économique général. A côté de cela, le système éducatif tunisien a continué à former un grand nombre d’ingénieurs chaque année. 

Si  cette situation témoigne d’un potentiel humain important, elle a aussi conduit à un déséquilibre entre l’offre et la demande sur le marché de l’emploi, accentuant la concurrence et pesant sur les salaires, surtout pour les spécialités les moins demandées.

En somme, si la profession d’ingénieur en Tunisie conserve son prestige, la période post-2011 a été caractérisée par une dégradation relative de la situation matérielle de nombreux ingénieurs, particulièrement les jeunes diplômés, due en grande partie à un marché de l’emploi sous pression et à des défis économiques persistants.

Des efforts sont nécessaires pour mieux aligner la formation avec les besoins du marché du travail et pour créer un environnement propice à la valorisation et à la rétention de ce capital humain essentiel au développement du pays.

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Charger plus par Mohamed Salem Kechiche
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