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Chroniques de la Byrsa : Réparons le tonneau des Danaïdes

La Presse — Le tonneau des Danaïdes, vous connaissez ? L’intelligence artificielle –puisqu’elle est aujourd’hui devenue pour ainsi dire incontournable- nous apprend que « l’expression « tonneau des Danaïdes » désigne une tâche absurde, sans fin, ou vouée à l’échec, qui symbolise un effort inutile et perpétuel. Cette locution provient de la mythologie grecque, où les Danaïdes, cinquante filles du roi Danaos, furent condamnées par les dieux à remplir un tonneau percé à l’infini en punition pour avoir tué leurs maris lors de leur nuit de noces. »

La mythologie grecque antique foisonne de récits qui sont porteurs de fantasmes autant que de sagesse. Sous une forme souvent extravagante mais toujours pétrie d’enseignements découlant du quotidien des hommes dans leur confrontation à la nature, à leurs semblables et au Fatum, le Destin, dans son implacable déroulement. C’est ce mélange de débauche de l’imagination et de réalisme qui leur a fait traverser les siècles et les millénaires et les a fait parvenir jusqu’à nous dans leur  puissance et leur fraîcheur originelles. 

Les dépôts alentour sont souvent supérieurs à ceux déposés
dans le réceptacle dédié

Au fait, à propos de quoi ai-je évoqué le tonneau des Danaïdes ? La comparaison va certainement choquer le plus grand nombre de mes lecteurs tant la distance dans le temps et dans l’espace est grande entre les mythes grecs anciens et les réalités de mon pays, de mon quartier d’aujourd’hui.

L’intensité dramatique de la fiction et de la réalité qui a inspiré ma chronique de ce dimanche est cependant la même et tout aussi extravagante. Il s’agit des conteneurs destinés à recueillir les déchets domestiques. Il en a été installé un peu partout – et encore – mais en nombre si limité que les dépôts alentour sont le plus souvent bien supérieurs à ceux déposés dans le réceptacle dédié. Et ne sont évidemment pas pris en charge par les éboueurs qui ne sont pas équipés pour cette tâche.  

Certes, quand les montagnes d’immondices deviennent encombrantes, débordant sur la chaussée et dégageant des odeurs pestilentielles, les services municipaux — ou ce qu’il en reste— viennent rétablir sur le site un semblant de normalité. Mais cela ne dure qu’un temps, celui du débordement du conteneur de nouveau. Car le problème est structurel.

Sans aller jusqu’à parler de tri sélectif (on en est bien loin), il se jette à la rue bien d’autres rebuts que les bennes municipales ne peuvent pas contenir. Ne parlons pas des matériaux de construction déchargés à la sauvette par des administrés enhardis par le laxisme des autorités.

Mais jusqu’à la veille de la Révolution, des agents faisaient des tournées bihebdomadaires de ramassage des déchets verts dans les tracteurs municipaux. Depuis, ce service a été supprimé alors que les agents en question, jusque-là temporaires, ont été régularisés et intégrés dans l’organigramme communal !

L’implication des administrés dans les prestations communales au niveau des quartiers pourrait constituer une alternative à cet exercice vain de remplissage d’un tonneau sans fond. 

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