Accueil A la une Ouverture du festival international de Carthage : Sur les traces des légendes

Ouverture du festival international de Carthage : Sur les traces des légendes

Le lancement s’est fait sous le signe de l’hommage aux figures légendaires de la musique tunisienne avec le spectacle « Men Qaa El Khabia », une création du maestro Mohamed Garfi.

La Presse — Le Festival international de Carthage a ouvert ses portes pour sa 59e édition qui s’étend cette année du 19 juillet au 17 août. Le lancement s’est fait sous le signe de l’hommage aux figures légendaires de la musique tunisienne avec le spectacle « Men Qaa El Khabia », une création du maestro Mohamed Garfi.

De la musique tunisienne avant toute chose

Dans le cadre majestueux du théâtre antique qui accueille depuis des décennies les plus grands noms de la scène artistique, une foule considérable a assisté à la soirée d’ouverture du Festival international de Carthage. Mme la ministre des Affaires culturelles a également été présente. A la fois chef d’orchestre et chercheur passionné, Mohamed Garfi a exhumé des trésors du répertoire tunisien du XXe siècle composés par des géants tels que Khemaïes Tarnane, Mohamed Triki, Mohamed Jamoussi, Ali Riahi, Hédi Jouini, Abdelhamid Sliti ou encore Salah Khemissi. 

Le spectacle a été inauguré par un retour à l’ère beylicale, avec la voix narrative de l’acteur Jamel Madani qui a tracé les contours de ce voyage dans le temps. Les musiciens et choristes de l’Orchestre symphonique tunisien ont d’abord interprété « Slem el Bey », suivi de « Wedoouni », « Yeli boadak dhayaa fekri » de Khemaïes Tarnane puis « Ordhouni zouz sbaya ».

Quatre voix tunisiennes ont su insuffler une vie nouvelle à des morceaux emblématiques tout au long de ce concert. Meherzia Touil, Hamza Fadhlaoui, Chokri Omar Hanachi et l’invité d’honneur Chedly Hajji ont interprété tour à tour des titres célèbres comme « Eli taada w fet » et « Hobi yetbadel yetjaded» de Hedi  Jouini, « El fajr leh » et « Fi oyounak nar » de Mohamed Jamoussi, « Omri w Omrek » de Kaddour Srarfi, « Ya hmam ye tayer » de Mohamed Garfi lui-même. Le public, qui connaît par cœur ces airs, n’a pas hésité à fredonner les paroles. D’autres chansons tunisiennes peut-être moins connues ont également figuré dans le programme du spectacle. 

Entre solos poignants, duos intenses et trios vibrants, chaque interprétation a provoqué des salves d’applaudissements. 

En parallèle à chaque chanson, les écrans géants ont diffusé des photos des paroliers et des musiciens derrière ces chef-d’œuvres. Ainsi, Mahmoud Bourguiba, Mohamed Triki, Hamadi Beji et bien d’autres noms, dont l’empreinte est incontestable mais dont les portraits sont souvent méconnus, ont été mis en lumière. Des images d’ouvrières agricoles ont également été projetées, en hommage aux femmes rurales, illustrant leur résilience et leur lutte quotidienne pour surmonter les défis de la terre.

La Troupe nationale des arts populaires a fait des entrées multiples sur scène pour des tableaux dansants dont la chorégraphie et les costumes accentuent cette immersion dans la mémoire collective tunisienne. Quant à Jamel Madani, il a chanté deux airs fortement sarcastiques dont un de Salah Khemissi.

Il a également fait une lecture théâtralisée d’un texte ironique de Ali Douagi.   Le concert a été clôturé par deux hymnes à la liberté et à la persévérance. D’abord « Nachid al hayat » de Abou Al Kacem Chebbi, mis en musique par Abdelhamid Slaiti, puis « Sayf fal yochhar » des Frères Rahabani sur des paroles de Said Akl. Les écrans géants ont affiché des photos d’émeutes et de mouvements de solidarité avec la Palestine qui fait face à l’occupation avec une persévérance historique.

Derrière le déferlement de critiques

En dépit de la qualité musicale du spectacle, l’ouverture du Festival international de Carthage a été fortement critiquée. L’affiche de la soirée a été modifiée à deux reprises, une première fois pour ajouter les noms des chanteurs, puis pour remplacer Nour Kmar, qui s’est retirée quelques jours avant la date prévue, par Meherzia Touil.

Ce détail n’a pourtant eu aucun impact sur le rendement final perçu par le public présent. Il est vrai que la soirée n’a pas affiché complet comme pour la plupart des chanteurs égyptiens et libanais. Cependant, on ne peut pas nier que le nombre des spectateurs a été respectable. Mohamed Garfi a défini ce concert lors de la rencontre avec les journalistes comme étant « un concert de musiques savantes ».

Le principe est donc de faire découvrir ou redécouvrir au public des chansons tunisiennes du siècle dernier avec des compositions dont la complexité exige un niveau artistique élevé. C’est le fruit d’un travail de recherche et non pas une invitation à la danse. Il ne s’agit pas seulement de se divertir, mais aussi de se reconnecter à l’âme artistique de la Tunisie, à travers les voix et les œuvres de ceux qui l’ont façonnée.

La bonne ambiance y était certes, mais pas dans le sens purement festif. Une scène de célébration de la circoncision avec la musique et le rituel de la jarre aux bonbons cassée trouve toute sa place dans le contexte de cette soirée où le patrimoine tunisien est le jalon essentiel. D’ailleurs, cette tradition a presque disparu aujourd’hui et son rappel est empreint de nostalgie des temps anciens. 

Le spectacle a été particulièrement long, vu qu’il comprend 25 titres. Dépassant minuit, le public a commencé à partir, non par ennui, mais comme c’est habituellement le cas pour éviter l’embouteillage à la sortie de l’unique parking qui abrite plusieurs centaines de voitures à chaque soirée. 

Le festival se poursuit avec un voyage au cœur de l’art tunisien et mondial. Notons que beaucoup de concerts sont déjà marqués sold out dès les premiers jours de mise en vente des billets, confirmant ainsi l’impatience du public conquis d’avance.

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