
Le metteur en scène et professeur de théâtre Moez Gdiri a publié un manifeste ambitieux sur son compte officiel du réseau social Facebook, plaidant pour une refonte complète du paysage culturel tunisien. Son texte, intitulé « Manifeste pour une renaissance culturelle tunisienne », propose une feuille de route articulée autour de sept axes majeurs, mêlant innovation législative, stratégie économique et valorisation des talents locaux.
Gueddiri souligne d’emblée l’inadéquation des lois culturelles tunisiennes, datant des années 1960 et 1970, avec les réalités actuelles. Il appelle à une révision des textes régissant le soutien aux œuvres artistiques, transformant les subventions en investissements à rendement mesurable. « Pas de développement sans innovation, et pas d’innovation sans audace législative », affirme-t-il, insistant sur la nécessité d’un cadre juridique adapté à l’économie numérique et à l’exportation de contenus culturels.
L’artiste propose l’organisation d’un « référendum culturel national », réunissant ministères, syndicats, artistes et acteurs économiques. Objectif : élaborer un nouveau pacte fondé sur l’identité tunisienne et des projets artistiques porteurs de sens, au-delà du simple divertissement.
Sur le plan économique, Gueddiri plaide pour une stratégie inspirée des modèles sud-coréen, turc ou marocain, où les industries créatives génèrent des milliards de dollars. Il rappelle les atouts tunisiens : des décors naturels exceptionnels, des techniciens qualifiés, une main-d’œuvre compétitive et un patrimoine sous-exploité. Pour concrétiser ce potentiel, il suggère la création d’une structure dédiée, « Tunisian Creative Export », chargée de promouvoir les créateurs à l’international.
Le metteur en scène défend l’idée d’une politique d’ouverture aux plateformes comme Netflix, Amazon ou HBO. Un tournage étranger en Tunisie pourrait, selon lui, injecter 50 000 dollars par jour dans l’économie locale, tout en créant des emplois et en formant les jeunes aux métiers de l’audiovisuel. Par ailleurs, il prône la relance de la NPA à savoir l’institution publique à l’origine de chefs-d’œuvre comme « El Khottab Al Bab ». Selon lui, sa disparition a entraîné un déclin qualitatif et une gabegie financière. Il propose d’en faire un pôle compétitif, collaborant avec le secteur privé et offrant des chances équitables aux jeunes talents.
Gueddiri déplore l’absence de la Tunisie sur la scène artistique internationale, malgré les efforts individuels de certains artistes. Pour y remédier, il propose la création d’une plateforme nationale de distribution de contenus (films, séries, musique), couplée à des partenariats avec les grands festivals et un fonds d’export culturel géré conjointement par l’État et la société civile.
Le metteur en scène insiste sur l’importance d’offrir des débouchés économiques aux jeunes diplômés des écoles d’art, souvent contraints à l’exil. « Nous avons les talents, l’imagination et la motivation. Il ne manque qu’une oreille politique à l’écoute et une administration qui croit en nous », conclut-il.