
Avec « Dialogue des Cordes 2 », le maestro Kamel Ferjani a dirigé un concert profond et vibrant, entre hommages, métissages sonores et réinvention de la musique arabe. Une performance magistrale, à la croisée de l’âme et du monde.
Mardi soir, le théâtre de plein air de Hammamet s’est transformé en une scène d’émotion à l’occasion du spectacle «Dialogue des Cordes 2», conçu et dirigé par le maestro et compositeur Kamel Ferjani. Entouré d’un ensemble orchestral raffiné et de voix d’exception : Haythem Hadhiri, Rihab Sghaier, Slim Dammak, Boutheina Nabouli et Haythem Guediri, Ferjani a offert au public une odyssée musicale de près de deux heures, mêlant subtilité instrumentale et intensité vocale.
Après avoir été directeur du festival de Hammamet puis de Carthage pour les trois dernières années, Kamel Ferjani retrouve son public avec enthousiame. Son projet : réconcilier patrimoine et modernité, en insufflant une dynamique nouvelle à la musique arabe, ouverte aux résonances du monde.
Avant même la première note, la soirée a débuté sur une note d’émotion : une courte projection a rendu hommage à Ouanès Khlijène (1958–2024), figure emblématique de la scène musicale tunisienne, disparu il y a un an jour pour jour. Témoignages d’artistes et extraits de son œuvre ont rappelé la trace indélébile laissée par ce grand compositeur, ami et collaborateur de Ferjani.
C’est Haythem Hadhiri qui a donné le ton au concert avec une interprétation poignante du morceau «El Bostene», instaurant d’emblée une atmosphère à la fois intimiste et collective, reflet fidèle de l’esprit du «Dialogue des Cordes 2». Naviguant entre sonorités orientales et influences occidentales, le spectacle a proposé une traversée musicale, façonnée par la vision de Ferjani, fervent défenseur d’une «musique du monde » à racines multiples.
Parfaitement structuré, à la manière d’une œuvre dramatique, le concert s’est imposé comme une mosaïque sonore et esthétique, où chaque artiste a joué son rôle dans une fusion envoûtante de voix, d’instruments et de présence scénique. Parmi les moments forts, on retiendra le titre «Istekhbar», composé par Ferjani et arrangé par Khlijène, en introduction, suivi de «Elil Ya Rouhi», sur un texte d’Adam Fethi, revisité pour l’occasion.
L’émotion a atteint son apogée avec le poème «Kabert Ya Ommi» du grand Nizar Qabbani, hommage vibrant à la figure maternelle. Les reprises interprétées par Rihab Sghaier, telles que «Mahla Layali Ichbilia» ou encore «Zahrat El Madaen », ont touché au cœur un public de mélomanes, tandis que Slim Dammak a marqué les esprits avec des titres comme «Ana Hawit» ou l’intemporelle «Ya Rayah», emblème du répertoire algérien.
Boutheina Nabouli, quant à elle, a revisité le patrimoine tunisien avec justesse et émotion, en interprétant entre autres, «Ah Ouaddaouni», témoignant d’une belle maîtrise du registre classique. En apothéose, l’ensemble des artistes s’est réuni pour une performance collective bouleversante sur le titre «El Kamar El Massloub», poème du Palestinien Tawfiq Ziyad, symbole d’une humanité partagée et d’un combat artistique sans frontières.