
Les demandeurs d’emploi se bousculaient par centaines au portillon des « Rendez-vous de l’emploi, 5e édition », pour accéder à la salle d’expositions de l’Utica et entrer en contact direct avec les recruteurs. Et, paradoxalement, il n’y avait que quelques dizaines de jeunes, juste à côté, dans la salle des conférences où des experts d’envergure exposaient les exigences des « nouveaux métiers » et comment un candidat peut se distinguer pour décrocher le poste souhaité.
La Presse — L’image est aussi concrète que révélatrice d’une réalité vécue par des demandeurs d’emploi qui, une fois le diplôme en poche, veulent rapidement être embauchés dans les meilleures entreprises de la place, les recruteurs pourtant en quête pas juste de diplômés porteurs de savoirs théorique et technique, mais surtout de talents aptes à relever les défis du marché, de l’innovation et du bénéfice.
Les chiffres officiels révélés à l’occasion de la 5e édition des « Rendez-vous de l’emploi » (2-3 octobre), un événement annuel devenu incontournable pour les demandeurs d’emploi, montrent qu’un million de jeunes tunisiens ne font rien, soit un tiers (1/3) de la force d’emploi potentielle ! Et seuls 3 % d’entre eux suivent une formation.
Dans cet espace, tout le monde s’accorde à dire que le diplôme ne suffit plus pour le recrutement.
Mais tout le monde ne sait pas comment procéder pour obtenir le poste souhaité et l’épanouissement qui en découlerait. Et toutes les entreprises ne savent pas comment « chasser » les meilleures têtes parmi une population nombreuse mais pas forcément identique.
Certes, avoir un diplôme attestant les compétences acquises au cours du cursus universitaire ou de la formation professionnelle est important et équivaut à un «billet d’entrée» au marché de l’emploi. Cependant, les entreprises, surtout confrontées au marché international, demandent, en plus du diplôme, d’autres aptitudes personnelles et professionnelles, permettant de répondre aux exigences instantanées de la concurrence, mais aussi aux évolutions futures de la demande sur le marché final, ce qui nécessite, en outre, la capacité de réagir, agilement, rapidement et de façon originale et innovante.
La fonction de DRH (directeur des ressources humaines) a ainsi évolué vers celle du responsable de « talent manager » et les « soft skills » vers les « behaviour skills ».
Autrement dit, le recruteur ne se contente plus de vérifier si les candidats remplissent les différents critères du « job description », mais également si le candidat a la capacité d’évoluer et d’être réactif par rapport à l’évolution de la conjoncture.
Que doit faire le candidat ?
Le passage du milieu universitaire ou de la formation professionnelle au milieu de la production n’est pas toujours évident et généralement jonché d’embûches. Certains rares demandeurs d’emploi arrivent à s’en sortir de façon autodidacte, mais certainement en faisant valoir leur curiosité et leur sens de l’anticipation et de l’adaptation, d’autres y arrivent grâce à un encadrement proche et personnalisé et bien d’autres sont tout simplement perdus, à des degrés et des durées variables.
Quel gâchis ! Car, après avoir passé une vingtaine d’années sur les bancs des écoles, les paillasses des labos et devant les tableaux, le demandeur d’emploi se retrouve en manque de ressources pour pouvoir réaliser ses rêves d’enfance, soit de travailler et de bien gagner sa vie. Notez au passage que la perte n’est pas assumée uniquement par le demandeur d’emploi, mais aussi par les entreprises en quête de force de travail et, par ailleurs, par tout le système économique qui ne parvient pas à fructifier un investissement des plus coûteux au contribuable.
Il y a là un effort à déployer de part et d’autre pour décrisper le système et mettre la machine en marche optimum. Et il se trouve que c’est le candidat qui assume la part belle de la tâche, en prenant son destin en main, en fonction d’un ensemble de facteurs, dont les mécanismes d’accompagnement, les offres de formation complémentaire ou continue et, bien entendu, les offres d’emploi fournies par les entreprises et les recruteurs.
Dans son périple, le candidat à l’embauche est généralement confronté à une multitude d’obstacles de divers ordres, dont des difficultés financières, d’autres administratives, d’autres concurrentielles, vu l’exiguïté du marché et le nombre élevé des demandeurs d’emploi.
Mais l’un des obstacles les plus importants à surmonter se situe au niveau mental, bourré au fil des années par des idées reçues et des préjugés empêchant le candidat d’avancer et son talent de s’exprimer, genre « y a pas d’avenir dans ce pays », « il me faut une intervention pour décrocher un bon poste » ou encore « les chances ne sont pas égales », etc.
Une question soulevée généralement tout bas a été soulevée tout haut lors des « RDV de l’emploi, 5e édition » tournés autour des interventions de proches ou de connaissances pour accorder un poste à un candidat au détriment d’un autre, à compétence pourtant égale, voire relativement meilleure. « Sans ce genre d’intervention, on ne peut pas obtenir d’emploi en Tunisie », a lancé ce jeune employé.
Mais il a été rapidement corrigé par les panélistes, dont Riadh Haouet, responsable Talent management chez un opérateur de téléphonie mobile de renom en Tunisie. Ce que les jeunes appellent « Aktef » et les dissuade d’agir est dénommé « Networking » sur le marché international, justifiant son propos par un slogan de Harvard : « Ceux que vous connaissez valent mieux que ce que vous connaissez » (Who you know is more important than what you know).
Le « network » est le réseau de connaissances que chaque personne développe et entretient, depuis les études universitaires jusqu’à la fin de carrière, donnant un poids inestimable et aux retombées valeureuses sur le marché et chaque personne peut et doit développer son propre network.
« Oui, cela existe ! », un employeur peut recruter le fils du propriétaire d’une autre entreprise en estimant que son recrutement va lui permettre de développer ses affaires et d’augmenter ses chiffres. Mais il ne faut pas se leurrer. Embauché suite à une intervention ne peut pas prospérer s’il ne donne pas les résultats escomptés. « Dans les affaires, c’est combien je vais gagner en embauchant tel candidat et pas l’autre », justifie-t-on dans le domaine des affaires.
Il faut juste y croire et s’y mettre !