Accueil A la une Présence italienne dans l’architecture tunisienne au palais Ahmed Bey : Une exposition en demi-teinte

Présence italienne dans l’architecture tunisienne au palais Ahmed Bey : Une exposition en demi-teinte

Palais ahmed bey

Une belle initiative qui se veut pédagogique. L’exposition avait pour ambition de sensibiliser un large public à l’influence italienne dans l’architecture de Tunis et de ses environs. C’était surtout un beau prétexte pour donner à voir le nouveau visage de la demeure, elle-même marquée d’une forte empreinte italienne.

Hélas, la  forme laisse à désirer. Faute d’une véritable scénographie et limitée à de simples panneaux, l’exposition ne parvient pas à mettre en valeur ses visuels ni ses textes, qui se retrouvent étouffés dans une présentation trop dense.

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La Presse — Le palais Ahmed Bey, un bijou architectural construit en 1847 et classé monument historique en 2016, a retrouvé, sous les mains expertes d’artisans et d’artistes, une nouvelle jeunesse. Squatté, dégradé, quasiment en ruines, l’édifice avait urgemment besoin de cette restauration salvatrice.

Situé non loin du Saf Saf, ancienne propriété du comte Raffo, ce palais acquis par Ahmed II Bey a longtemps été abandonné à son sort. Il a fallu un projet touristique et culturel pour lui redonner vie et lui rendre ses belles couleurs d’antan. L’édifice a ouvert ses portes au public du 9 au 12 octobre à l’occasion d’une exposition intitulée « Italianisances : la présence italienne dans l’architecture tunisienne ».

Organisée par l’association Nous Tous, les Archives de la mémoire des Italiens de Tunisie (AMIT), le Laboratoire d’archéologie et d’architecture maghrébines (LAAM) et le Centre culturel Dante Alighieri de Tunisie, avec le soutien de la Fondation Rosa Luxemburg, l’exposition avait pour ambition de sensibiliser un large public à l’influence italienne dans l’architecture de Tunis et de ses environs.

C’était surtout un beau prétexte pour donner à voir le nouveau visage de la demeure, elle-même marquée d’une forte empreinte italienne. Restitué à son environnement, restauré dans les règles de l’art, le palais renaît de ses cendres après des décennies de délabrement. À quelques mètres de l’un des cafés les plus emblématiques de La Marsa — le café Haouas —, non loin de la mosquée Al Ahmadi, sur l’une des places publiques principales, le piteux état de la bâtisse, à l’instar de bien d’autres encore sous nos cieux, faisait peine à voir et révoltait plus d’un.

Souhaitée par tous, la restauration, qui a tardé à venir, a finalement eu lieu grâce aux efforts de M. Mahmoud Redissi, qui a acquis le palais et entrepris sa réhabilitation sous la supervision de l’Institut national du patrimoine. L’ambition est d’en faire un hôtel de prestige à vocation touristique, culturelle et patrimoniale. Une belle reconversion de cette ancienne demeure, de quoi encourager la réhabilitation et la dynamisation d’autres espaces patrimoniaux (en péril ou non) à La Marsa et ailleurs en Tunisie.

Arborant fièrement sur son fronton sa khabcha (l’équivalent d’un blason ou d’armoiries), sculptée sur mesure par des artisans, le palais Ahmed Bey se pare à nouveau de ses tons ocres jaunes, verts et bleus. Le public peut y accéder depuis la cour d’entrée, qui mène à un grand hall voûté suivi d’un escalier en marbre.

Des portraits du Bey et d’autres dignitaires accompagnent les visiteurs dans les différentes salles de la somptueuse bâtisse. Le patio supérieur, qui abrite l’exposition « Italianisances » et où se trouvent les chambres et les salons, est entièrement lambrissé de faïence espagnole et éclairé par des fenêtres hautes.

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L’exposition se déploie précisément dans les salles d’apparat situées de part et d’autre de l’entrée, où se mêlent avec élégance formes traditionnelles et innovations baroques. Ces vastes chambres étaient autrefois ornées de lustres de Venise, de tentures et de meubles dorés, reflétant le luxe habituel de l’époque.

« Italianisances » rappelle que si la présence italienne dans l’architecture tunisienne remonte au XVIe siècle, elle a surtout connu son apogée à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, avec les grandes vagues de migration italienne. Les quartiers dits « francs » ou « européens » de Tunis, marqués par l’Art nouveau, l’Art déco et l’éclectisme, en sont des témoins éloquents.

Déployée en quatre volets thématiques — Novecento et la ville européenne du XIXe siècle, l’influence baroque et rococo dans les édifices religieux de la médina, les palais beylicaux et leurs décors italiens, et enfin la mémoire des villages ruraux de la Medjerda —, l’exposition se présente sous la forme d’un corpus de treize panneaux.

Photographies d’édifices, détails décoratifs et textes de chercheurs révèlent une archive visuelle vivante où se rencontrent rigueur architecturale, polychromie des matériaux et finesse des compositions. Une belle initiative qui se veut, en outre, pédagogique, mais dont la forme laisse à désirer. Faute d’une véritable scénographie et limitée à de simples panneaux, l’exposition ne parvient pas à mettre en valeur ses visuels ni ses textes, qui se retrouvent étouffés dans une présentation trop dense.

Une médiation culturelle aurait également permis d’accompagner les visiteurs, notamment les plus jeunes, dans cette exploration du patrimoine. La splendeur retrouvée des lieux parvient néanmoins à atténuer la déception et à faire oublier (du moins en partie) les faiblesses de la mise en scène.

Après son escale inaugurale à La Marsa, l’événement se déplacera à l’École nationale d’architecture et d’urbanisme de Tunis (13–19 octobre), puis à la galerie El Teatro à Tunis (21–31 octobre).

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