Entretien avec Mohamed Bayoud (Directeur artistique du festival international du cinema d’animation de Meknès) : « L’animation a besoin de filières de formation »

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Directeur artistique du ficam, mohamed beyoud est un militant du cinéma d’animation des plus acharnés. Il était parmi les intervenants de Carthage Digital. Nous l’avons rencontré.


Pourquoi selon vous avons-nous accumulé tant de retard dans les pays du Maghreb dans le cinéma d’animation ?
C’est ,entre autres, parce qu’il n’y a pas beaucoup d’écrans réservés aux cinémas d ’animation dans nos pays . Sur un autre plan je peux affirmer qu’un public pour le cinéma d’animation se construit, il ne naît pas de façon spontanée . Les JCC sont en train de construire ce public: la preuve c’est cette rencontre autour du cinéma d’animation à laquelle j’ai participé et nous avons aussi cette ambition à Meknès. Je pense qu’on a commencé à le faire à la Ficam. Nous avons créé un public pour le film d’animation qui n’existait pas avant. Mais il y a également un souci de formation dans nos pays et cela on le constate ici au Maroc et à travers tous les débats qu’on a eu l’occasion d’échanger à Carthage digital à Tunis qui est une très grande initiative d’ailleurs. Les jeunes ont également besoin d’une culture cinéphilique du film d’animation. A mon sens tant qu’on n’a pas de filière d’animation ce sera un peu compliqué d’avoir de vraies générations de cinéastes d’animation ou de personnes qui peuvent se lancer dans ce domaine.

Dans nos pays, le film d’animation est toujours considéré comme un produit destiné aux enfants. Pourquoi selon vous ?
En tout cas ce n’est pas la situation au festival de Meknès . Dans notre programmation on fait la différence: il y a une programmation destinée aux enfants et il y a une autre destinée aux adultes où l’animation fait l’objet d’un traitement cinématographique et expérimental  .Mais le problème se pose aussi en France où beaucoup de personnes font cette confusion . Ce problème là se posait aussi pour la bande dessinée qu’on croyait destinée uniquement aux enfants . Au festival de Meknès nous avons tout fait pour montrer que le film d’animation ne s’adresse pas uniquement aux enfants et cette sensibilisation nous l’avons aussi faite auprès des journalistes.

Où en est la production du cinéma d’animation aujourd’hui dans les pays du Maghreb ?
En fait l’animation existe dans la publicité et nos amis égyptiens en ont une très grande expérience . Au Maroc et en Algérie aussi il y a des studios qui font aussi de la publicité et de la post-production . Maintenant , on attend que ces jeunes soient créatifs pour faire des films d’animations aussi bien des courts que des longs métrages . Cela dit on constate que dans des pays qui ont moins de moyens que le Maroc ou la Tunisie comme la Côte d’ivoire ou le Cameroun par exemple certains jeunes se sont déjà lancés dans le long métrage certes avec quelques maladresses techniques dues encore une fois à la formation mais leurs longs métrages marchent très bien puisque souvent il s’appuient sur le patrimoine oral de ces pays .

Le problème du cinéma d’animation est-il essentiellement financier ou d’écriture ?
En fait cela dépend du projet ! On ne va pas se comparer aux studios Disney ou Pixar qui sont dans une industrie du cinéma d’animation . Mais il y a plein d’exemples où les gens arrivent à faire des courts métrages avec des moyens financiers très limités. Il y a des réalisateurs en Afrique qui font des films tout seuls. Cela dit, le problème d’écriture se pose vraiment et il se pose même pour le cinéma en général.

Aujourd’hui on parle aussi de documentaire d’animation ….
En effet cela existe depuis plusieurs années et le film qui a fait connaître le documentaire d’animation est « Valse avec Béchir » mais ce genre comble une certaine absence d’images ou d’archives.
Maintenant il y a de plus en plus de documentaires d’animation qui sont très bien faits et nous à Meknès on en diffuse chaque année un exemple pour montrer la richesse et la diversité de ce genre de films.Dernièrement on a diffusé un film très puissant dans cette catégorie qui porte le titre de « Zero Impunity »

Que recommandez-vous aux jeunes qui veulent faire leurs premiers pas dans l’animation ?…
Je leur recommande avant tout de lire ! Il faut se nourrir par la littérature d’abord et puis regarder des films d’animation …

Quels sont les prochains défis de la Ficam
Notre prochain défi est d’arriver à monter une filière ou une école de films d’animation à Meknès.
Nous y travaillons …

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