Son œuvre est viscérale, vasculaire et la prend aux tripes. Cathartique aussi, car dessiner est salutaire pour elle, cela l’aide à exorciser ses démons intérieurs et à estamper à chaque coup de crayon ou de stylo les traces des mauvais temps.
Son nom figure désormais parmi les artistes qui ont signé les timbres de la collection nationale. En effet, elle a signé, il y a quelques mois, sa première création philatélique retenue après un appel à candidature. Nadya Zarroughui est une artiste visuelle, de nature discrète, mais dont l’œuvre est d’une grande éloquence. Elle est de celles et ceux qui ne font pas dans les futiles bavardages mais font beaucoup, elle ne fait pas dans les compromis, ni dans les demi-mesures et s’engage corps et âme dans sa pratique artistique. «Je tiens à mon autonomie dans tout ce que cela implique comme sens», nous a-t-elle affirmé lors de notre rencontre. Portrait.
Originaire de Gafsa et de Kerkennah, Nadya est née le 27 janvier 1988. Elle vit et travaille à Tunis. Elle a une maîtrise en arts plastiques (spécialité peinture) et est inscrite en master de recherche en Esthétique et Pratiques des arts visuels à l’école des beaux- arts de Sousse. Elle a eu une formation en production 3D en 2014. Outre sa pratique artistique, la jeune femme travaille en freelance en tant qu’illustratrice et conceptrice d’identités visuelles.
Nadya a participé à plusieurs expositions collectives, à la galerie El Birou à Sousse, au centre des arts vivants à Radès, elle a également exposé des dessins à la Bibliothèque nationale de Tunis. En 2015, elle a réalisé une fresque murale intitulée «intermède comique» au festival de musique «Ephémère». Elle a pris part à différents événements artistiques à l’instar de Jaou Tunis dédié à l’art contemporain, en mai 2017, avec le projet «Epitaphe» et la Vermeg art fair au musée archéologique de Carthage. La même année, elle reçoit le prix «coup de cœur d’arts graphiques» au festival féministe «Choftouhonna».
En juillet 2018, elle organise dans son atelier à Kerkennah une exposition intitulée «Insulaire 00» réunissant des photographies argentiques de l’artiste Najib Bousabbeh. En novembre, elle expose une série d’animation intitulée «abc» dans le cadre de Novembre numérique à Sousse. En effet, Nadya s’essaye aussi à l’animation et a à son actif quelques vidéos où elle fait évoluer ses personnages et autres dessins. L’artiste se lance dans différentes expériences, une manière pour elle de s’enrichir professionnellement mais aussi humainement et d’ouvrir le champ des possibles.
Dessinatrice acharnée, voire obsessionnelle, elle crée par besoin, elle peut, d’ailleurs, passer des heures, sans relâche, à le faire comme aspirée par le temps de son œuvre. Mais elle sait aussi s’en éloigner un peu, le temps de prendre ce recul si essentiel… Son œuvre est viscérale, vasculaire et la prend aux tripes. Cathartique aussi, car dessiner est salutaire pour elle, cela l’aide à exorciser ses démons intérieurs et à estamper à chaque coup de crayon ou de stylo les traces des mauvais temps.
A travers ses dessins, le plus souvent, au stylo à pointe tubulaire, elle accouche de figures anthropomorphes qui évoluent dans une cosmogonie faite d’une multitudes de traits droits ou sinueux, tiraillés, étirés, juxtaposés, entremêlés, qu’elle prend le temps d’ appliquer avec minutie sur le papier.
Trait après trait, dans son opération créatrice, Nadya incise le papier arche, y dépose ses coupes graphiques, autant de traits qui prennent différentes voies pour écrire à l’unisson sa biographie. Les traits orchestrés prennent les allures de tripes, de viscères, de paysages anatomiques, d’une exploration intérieure organique et psychique… Nadya creuse le papier-chair, diagnostique, détaille à la manière des dessins scientifiques, comme pour dresser un état des lieux,…Pour commencer, s’explorer et se rencontrer soi-même, se remettre en question, se positionner…et, par la suite, aller vers l’extérieur pour raconter (et se raconter dans et par rapport à) la société, l’homme moderne, la machine à broyer les individualités, les libertés et à imposer des frontières.
Autopsie d’un monde qui perd de ses valeurs, où l’homme est un simulacre d’être (dont la présence, dans certaines de ses œuvres, n’est que contours, silhouettes ou encore ombres) qui perd chaque jour un peu plus de son humanité, de sa dignité.
Nadya pose son encre sur le papier, comme pour se réanimer…
bousabbah nejib
8 décembre 2019 à 07:11
Bravo ma petite nièce Je suis fier que l’art coule dans nos veines .Hier c’etait l’ouverture de mon expo à Paris l.Le vernissage sera pour le 14