Batterie de mesures annoncées par le chef du gouvernement : Entre scepticisme et conviction


La situation est sous contrôle mais le plus important est de respecter les consignes. Le message du chef du gouvernement a été bien clair sauf que les mesures pourraient être lourdes de conséquences, notamment sur le plan socioéconomique.


Une batterie de mesures vient d’être annoncée par le chef du gouvernement, Elyes Fakhfakh, et ce, au moment où la Tunisie a enregistré trois nouveaux cas de contamination, élevant ainsi à 16 le nombre total des personnes contaminées par le coronavirus. Le pays passe à la phase trois en matière de lutte contre la pandémie alors qu’on est toujours en phase deux. Une anticipation qui rassure de par le courage affiché par le gouvernement au niveau de certaines décisions prises afin d’éviter le pire et se trouver dans une situation d’impuissance, mais qui inquiète en même temps, en raison de la gravité de la situation marquée  par l’accélération de la propagation du Covid-19 et qui nécessite un haut degré de civisme et un grand élan de solidarité nationale.

Des mesures drastiques
Les nouvelles mesures prises sont entrées en vigueur depuis  hier, samedi 14 mars, et se prolongeront jusqu’au 4 avril prochain. Elles visent le ralentissement de la progression du virus. Plus les rassemblements et les contacts sont limités, plus les chances de succès en matière de lutte s’accroissent. La Tunisie s’aligne ainsi sur les pays européens qui ont maintenu les mesures prises jusqu’au début du mois d’avril prochain.

Suspension des dessertes maritimes et des liaisons aériennes vers l’Italie, limitation  des vols vers d’autres pays, isolement obligatoire à domicile et durant 14 jours pour les voyageurs en provenance de l’étranger ainsi que l’annulation des prières collectives dans les mosquées et la grande prière du vendredi, alors que les restaurants, les bars et les cafés devront fermer à 16h00. Les rassemblements ne sont plus autorisés et toutes les manifestations culturelles et sportives sont annulées ou reportées à une date ultérieure alors que d’autres compétitions se dérouleront à huis clos.

Ce sont là les mesures annoncées par le chef du gouvernement vendredi, marquant le début d’une nouvelle phase dans la lutte. Des mesures qui n’ont pas manqué de rassurer la majorité des citoyens mais pas tous. Au fait, le gouvernement vient de tirer la sonnette d’alarme avec l’augmentation des cas de contamination ainsi que des personnes placées en confinement dans les différentes régions du pays.

Cheikh Sofiene Ben Salah nous explique que les mesures prises au niveau des mosquées sont logiques. Pas de contradiction à ce niveau du point de vue de la chariaâ et notre Prophète (que la paix soit sur lui) ordonnait aux musulmans de ne pas entrer ou sortir d’une région touchée par la pandémie, éclaire notre interlocuteur.  Les mosquées ont été fermées à partir d’hier en application de la nouvelle mesure.

Encore des demi-mesures décevantes, témoigne le docteur Rim Lakhdar . «Que veut dire garder certains vols pour L’Europe? Garder les cafés ouverts et ne les fermer qu’à partir de 16h00? Quelles sont les bases scientifiques et les stratégies préventives de ces mesures contre un ennemi invisible qui circule à grande vitesse? Covid-19 est dénué de repères temporel et spatial», nous souligne-t-elle.

«Les sages médecins conseillers échouent de leur côté à convaincre les politiciens et les managers à instaurer une prévention drastique et appliquer fermement la loi à l’égard de toute personne qui contribue à diffuser le virus (non-respect de la mise en quarantaine, des règles d’hygiène dans certains espaces…). Je ne suis pas pessimiste mais une réalité qui fait mal», regrette notre docteur, avant de conclure qu’il ne nous reste qu’à compter sur nous-mêmes pour appliquer les mesures préventives à la lettre et prendre soin des personnes âgées: parents, grands-parents, patients et toute personne fragile, et les sensibiliser pour rester chez eux en adoptant des activités agréables et même travailler à distance (à domicile) pour certains qui peuvent se le permettre.«Il faut rappeler que dans plusieurs pays, des mesures ont été prises autorisant le travail et  les cours à distance. Quelques boîtes privées en Tunisie, ont déjà pris cette même décision», nous rassure Youssef, ingénieur dans une entreprise privée.

L’infrastructure pointée du doigt
Tout reste tributaire de la conduite du citoyen, de son degré de civisme, des moyens mis à la disposition du corps médical et surtout d’un élan de solidarité. A cet effet, le député Mabrouk Korchid a qualifié ces mesures de «nécessaires» dans un statut publié sur son compte Facebook. Il  a appelé les citoyens à soutenir les efforts de l’Etat dans la lutte nationale  contre la propagation du coronavirus et l’ouverture d’un compte au profit du ministère des Finances pour la collecte de dons pour soutenir ces efforts.

«La situation actuelle demeure stressante pour le pharmacien qui se trouve partagé entre le service qu’il est dans l’obligation à apporter pour contribuer au freinage de la contamination et l’indisponibilité de certains produits et la spéculation des intermédiaires», témoigne Aïda Chekir, docteur en pharmacie. Elle fait savoir que la fixation  des prix de vente du produit désinfectant des mains ou du gel antibactérien est une bonne décision à condition de fournir aux pharmaciens le produit au prix d’achat fixé.

«Les moyens dont nous disposons et notre infrastructure ne permettront  pas d’assurer les services de réa si on atteint le pic de contamination», alerte-t-elle.
La situation est sous contrôle mais le plus important est de respecter les consignes. Le message du chef du gouvernement a été  bien clair sauf que les mesures pourraient être lourdes de conséquences, notamment sur le plan socioéconomique.

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