QUE faut-il saisir de la course folle à la création de «fronts parlementaires» censés soutenir le gouvernement Mechichi, assurer la stabilité gouvernementale et réunir les meilleures conditions possibles au chef du gouvernement et à ses ministres totalement indépendants de tous les partis politiques — faut-il le rappeler — pour qu’ils puissent mettre à exécution leur programme socioéconomique, plus particulièrement les six priorités explicitées dans le document gouvernemental remis aux députés le 1er septembre, jour au cours duquel ils ont accordé leur confiance au gouvernement Mechichi ?
La question s’impose et appelle une réponse claire et précise d’autant plus que se multiplient, de jour en jour, les déclarations et les explications, voire les promesses des initiateurs de ces fronts parlementaires qui ont pour objectif «de faire sortir le pays de la crise économique et sociale et de contribuer à la réalisation de la stabilité politique», comme l’affirme Sadok Jabnoun, porte-parole de Qalb Tounès, qui parle au nom du front parlementaire qui réunira le même Qalb Tounès, Ennahdha, Al Karama, le bloc parlementaire Al Mostakbel et certains députés indépendants, ce qui correspond à un rassemblement de 120 députés, soit le nombre de députés qu’on considère du côté de Montplaisir comme ayant renouvelé leur confiance à Rached Ghannouchi à la tête de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), soit en refusant de participer au vote, soit en glissant des bulletins nuls dans l’urne.
Idem pour le front parlementaire adverse qui s’octroie lui aussi la mission de préserver le gouvernement Mechichi de «la mainmise et des pressions d’Ennahdha et de ses alliés de circonstance», d’une part, et de fournir, d’autre part, les opportunités ou les conditions requises à l’équipe des «ministres indépendants» pour matérialiser leurs promesses en ayant l’assurance que leur action sera avalisée par un front parlementaire «démocratique et patriotique qui a pour ambition unique et exclusive de voir la Tunisie sauvée de la crise multiforme dans laquelle elle s’est empêtrée depuis la révolution par la faute, précisément, de ceux qui ont conduit le pays sur la voie de la perdition et qui persévèrent dans la même voie en privilégiant la réalisation de leurs agendas partisans aux dépens des intérêts de la nation.
Mais que cache réellement cette course pour séduire le gouvernement Mechichi en lui promettant un soutien à un programme qu’il n’a pas encore révélé, et qu’il n’a même pas encore mis en œuvre ?
On se pose la question et on peine à y répondre d’autant que les déclarations faites à l’issue des rencontres entre Mechichi et les représentants des partis qui lui ont accordé leur confiance sont laconiques et d’une platitude autorisant toutes les interprétations possibles, ce qui revient à dire que ces entretiens n’ont abouti à rien de concret à même d’intéresser les Tunisiens même si certaines parties continuent à prétendre que leurs initiatives bénéficient d’une attention particulière de la part du Chef du gouvernement.