Les chiffres annoncés chaque jour ne sont pas que des statistiques, ce sont des vies, ce sont des membres de nos familles, des amis, des connaissances, des collègues… Il faut agir avant qu’il ne soit trop tard. On n’a plus besoin de discours. On connaît bien la réalité de nos établissements hospitaliers, le comportement de nos concitoyens, de nos responsables. La situation est sous contrôle certes, mais, avouons-le, nous avons atteint un état critique qui échappe au contrôle.
Au début, nous étions sur la bonne voie et nous avons initié des stratégies et des actions pour anticiper la lutte contre la pandémie de Covid-19. Aujourd’hui, la volonté et l’engagement que les parties prenantes, la société civile, les hommes politiques et les citoyens laissent entrevoir se sont égarés du chemin. On est face à des responsables aux bras retournés et à une population laissée pour compte et qui ne se sent pas en sécurité.
Place, aujourd’hui, à la prédominance d’un marché difforme des soins, et d’un secteur privé qui se « nourrit » des dysfonctionnements des hôpitaux publics. Depuis que le coronavirus s’est propagé en Tunisie, le nombre de personnes contaminées ne cesse d’augmenter, notamment durant la deuxième vague. Les patients, livrés à eux-mêmes, paient au prix fort leur santé. La saturation des hôpitaux publics, les défaillances et le manque flagrant d’équipements ont cédé la place à d’autres circuits que seuls ceux qui ont les moyens peuvent emprunter.
Les personnes contaminées se trouvent aujourd’hui dans l’obligation d’aller aux cliniques privées, pour accéder à un lit de réanimation ou aux soins et aux traitements hospitaliers. Pour être admis, il faut dès le départ présenter un chèque de garantie dont le montant se compte par millions, puis s’attendre à une facture bien garnie même par des services dont le malade n’a jamais bénéficié. En Tunisie, ou on a les gros moyens pour faire face à la rapacité de certaines cliniques ou on meurt.
C’est la galère ces jours-ci, puisque la plupart des hôpitaux publics, et même certaines cliniques, sont saturés, où souvent on ne trouve pas de lits disponibles dans les services de réanimation. Quand on est face à la mort, on peut céder tout ce qu’on a : la clinique demande, la famille s’exécute, pourvu que le malade soit sauvé.
Monsieur le Chef du gouvernement, vous avez promis lors d’un entretien télévisé d’intervenir pour mettre fin aux dépassements. Vous avez promis aussi d’intervenir pour que l’Etat prenne en charge les malades atteints du Covid-19 au sein des cliniques privées. Mais, ce qui se passe, jusqu’à nos jours, est loin de la réalité, hallucinant. Quand, Monsieur le Chef du gouvernement, comptez-vous arrêter ces crimes ? Pitié pour ces malades qui souffrent chaque jour en silence…
Plus de place à la négligence, à l’irresponsabilité, aux conflits d’intérêts… Il est temps de remettre chacun à sa place, surtout ceux qui se frottent les mains, tellement les malades Covid-19, qui sont dans le désarroi, représentent pour eux un objet d’engraissement.
Quand les hôpitaux sont saturés, quand des médecins disent que les chiffres donnés ne reflètent pas la réalité, quand les cliniques affichent complet, quand le corps médical s’écroule sous la charge du travail, quand le corps médical et paramédical est lui-même contaminé, quand la quasi-totalité des hôpitaux est en pénurie de matériel élémentaire, d’équipements, de personnels, de réanimateurs… c’est que la situation est tragique.
Monsieur le Chef du gouvernement, les chiffres annoncés, chaque jour ne sont pas que des statistiques, ce sont des vies, ce sont des membres de nos familles, des amis, des connaissances, des collègues… Agissez avant qu’il ne soit trop tard. On n’a plus besoin de discours. On connaît bien la réalité de nos établissements hospitaliers, le comportement de nos concitoyens, de nos responsables. La situation est sous contrôle certes, mais, avouons-le, nous avons atteint un état critique qui échappe au contrôle.
Tous les indicateurs sont au rouge : le nombre de cas graves, de malades en réanimation, de décès, le nombre des gouvernorats classés rouge où la propagation du virus est très élevée…
Monsieur le Chef du gouvernement, prenez plus d’actions concrètes dans l’urgence, sinon ce sera fait dans la douleur. Tout le monde doit s’engager à éviter la catastrophe comme vous l’avez précisé dans votre dernière apparition télévisée, que le nombre de décès pourrait atteindre 6 ou 7 mille si les instructions préventives n’étaient pas respectées. Il est de votre devoir d’imposer un rappel à l’ordre à toutes les parties concernées, comme cela a été fait auprès des citoyens au sujet du port obligatoire du masque. Car les doutes sur l’efficacité des mesures prises, — le couvre-feu entre autres — ont grandi et les Tunisiens ont des craintes illimitées au gré des résurgences d’une pandémie qui persiste et fait de plus en plus sentir ses effets sanitaires, économiques, psychologiques et sociaux.