A côté des victimes de la répression, ont manifesté avant-hier sur la place de La Kasbah, au même moment, face au siège du gouvernement d’autres protestataires. Ceux-là sont venus de la Chebba, dans le gouvernorat de Mahdia.

«Nous sommes les victimes de Wadii Jari,  président de la Fédération tunisienne de football», s’insurge Aymen, 18 ans, les cheveux enduits de gel et un sandwich à la main.

« Sept bus, avec à bord de chaque véhicule 50 personnes, des motos et des voitures sont partis ce matin à l’aube de la Chebba pour aboutir devant le siège de la présidence du gouvernement. La Chebba observe aujourd’hui une grève générale. Nous manifestons contre le gel de notre équipe locale de football, le Croissant Sportif Chebbien, par la Fédération tunisienne de football», ajoute le jeune homme et supporter acharné de son club.

Les drapeaux vert et blanc du Croissant Sportif se déploient sur la place ainsi que les slogans de fidélité à une équipe sanctionnée injustement selon plusieurs jeunes interviewés.

La grève générale a été décrétée par la cellule des supporters du club qui ont appelé le gouvernement à intervenir pour réinstaller leur équipe en première ligue.

Rappelons que le bureau fédéral de la FTF avait décidé le 17 octobre dernier de «suspendre les activités du CS Chebba et de lui interdire de participer à toutes les compétitions organisées par la fédération pour la saison 2020-2021  après avoir constaté que le club a présenté un dossier d’engagement incomplet malgré de nombreux rappels de la fédération», selon les termes d’un communiqué officiel.

Déjà, le 27 novembre dernier, toutes les administrations de la ville ont fermé leurs portes, dans un mouvement de solidarité et de soutien avec la coordination des supporters de l’équipe de football locale. Seuls des boulangeries, des pharmacies et l’hôpital local avaient continué à fonctionner. Le mouvement de désobéissance civile s’amplifie de jour en jour dans cette petite ville du Sahel.

Mohamed, 20 ans, n’arrive pas à comprendre : «Wadii Jari est-il devenu l’homme le plus puissant du pays ? Pourquoi personne n’intervient pour parer à une injustice dénoncée, y compris par le ministre des Sports ? Notre ville s’embrase et personne ne réagit. Nous resterons ici le temps qu’il faut. Et nous reviendrons si la situation ne s’améliore pas», tonne-t-il.

En fin de matinée, les deux manifestations, celle des défenseurs de la justice transitionnelle et celle des supporters du Croissant de la Chebba, se rapprochent et se mélangent. Et les passants traversant la place de La Kasbah s’emmêlent les pinceaux et ne comprennent rien à ces colères croisées chaque jour renouvelées depuis bientôt dix ans.

Laisser un commentaire