LE limogeage attendu de l’ex-P.D.G. de Tunisair aura été un fiasco d’Etat quelle que soit la position à partir de laquelle on se met. Un bail précoce furtif même d’une femme ingénieure au CV blindé, mais qui a commis tant d’erreurs et payé le prix des bras de fer politiques et des positions de force dans ce piètre paysage politique. La compagnie aérienne tunisienne, qui agonise économiquement et qui a une très mauvaise image de marque auprès des Tunisiens, est, à l’image des autres entreprises publiques tunisiennes, mal gouvernées. Il n y a même pas de principes de bonne gouvernance.
Une sorte de dilapidation des deniers publics au lieu de créer un pôle compétitif rentable et transparent. Pour un nom aussi notoire, la dégringolade a commencé depuis déjà 20 ans avec des choix stratégiques mal placés et s’est accentuée après 2011 avec des décisions suicidaires qui ont alourdi les comptes. Le plus dangereux, c’est que de nouvelles règles du jeu se sont imposées dans les entreprises publiques : pas de pouvoir pour la direction générale (et l’Etat donc) en termes de choix stratégiques et de voies de développement (structure du capital, effectif, partenariats stratégiques, portefeuilles d’activité, qualité de service…), mais une sorte de fait accompli sur lequel tout dirigeant doit s’aligner. Le mal est que les compétences en management des sociétés sont en train de fuir et de décliner les offres de diriger des entreprises publiques même de renom. La raison ? Tout simplement un environnement interne médiocre, tendu où, au nom de l’action syndicale, on fait l’éloge de l’insubordination, de l’irresponsabilité et de l’impunité. Ou vous composez donc avec les dépassements, quitte à s’engouffrer dans des déficits résorbés par l’argent du contribuable, ou vous essayez de changer et de gouverner selon l’équité et le bon sens, et là, les forces du mal se réveillent et mettent le feu.
Résultat, ces sociétés deviennent ingérables étant donné la faiblesse du gouvernement devant certaines personnes cachées souvent derrière la défense des droits des travailleurs. Et aucune compétence, même les plus souples, ne pourront exercer car tôt ou tard, elles se heurteront à la résistance de ceux qui usurpent les entreprises publiques à leur compte et celui des proches et des amis. Il ne suffit plus d’être compétent et d’avoir un CV riche pour être désigné dirigeant dans une entreprise publique, il faut juste composer avec les forces politiques existantes et respecter les ententes qui se font ailleurs. Et c’est l’intérêt général qu’on sacrifie avec de grandes compétences qui fuient le pays, et des personnes loyales et dociles qu’on met pour exécuter les ordres. Il ne faut surtout pas toucher à certaines personnes protégées, et il ne faut surtout pas dépasser les « lignes rouges » tracées par des profanes qui n’ont aucune connaissance dans la gestion des entreprises et de leur gouvernance !