Accueil Culture Ibrahim Ltaïef, réalisateur et producteur, à La Presse: «De bonne foi, j’ai demandé le bilan des JCC 2020»

Ibrahim Ltaïef, réalisateur et producteur, à La Presse: «De bonne foi, j’ai demandé le bilan des JCC 2020»

Dans cet entretien, Ibrahim Ltaïef nous parle des raisons qui, selon lui, ont conduit à sa «non-reconduction» au poste de directeur artistique des JCC et du Syndicat indépendant des réalisateurs producteurs (Sirp), ce qui aurait donné une représentativité à tout un corps de métier aujourd’hui majoritaire.


Il y a quelque temps vous avez demandé le bilan des JCC 2020… D’aucuns croient que c’était de mauvaise foi…

Cela paraît un peu bizarre de la part d’un membre du comité directeur, en l’occurrence responsable indirectement de l’organisation des JCC 2020 avec un poste de directeur artistique. J’ajoute que même la partie artistique demeure toujours importante en terme de dépenses. J’ai demandé la publication de ce bilan de bonne foi. On avait un budget bien défini et, compte tenu des conditions dans lesquelles se sont déroulées les journées de cette année-là, on était très content de ne pas dépenser le budget qui a été alloué, et c’est très louable. J’ai pensé qu’il était aussi utile de faire connaître au grand public et aux cinéastes le rapport moral et financier de cette session. Mais c’est quelque chose qui n’a pas été très appréciée par l’administration, et pourtant, je l’ai demandé dès la fin de la session. Quand on avait pris la direction des JCC, Ridha Behi avait promis de publier publiquement ce rapport financier et moral. Mais comme la chose n’a pas été faite, je l’ai tout simplement réclamée. Ce n’est pas un texte de loi, mais le décret de nomination stipule qu’après un mois de la session, le directeur des JCC doit présenter au ministre le rapport financier et moral. Je pensais naïvement qu’il fallait le faire…

Cela a-t-il une relation avec le fait que vous n’avez pas été reconduit pour les JCC 2021 ?

Je pense que cela a été mal interprété et a gêné l’administration, mais cela n’a rien à voir… Tout le monde peut ne pas être reconduit dans telle ou telle fonction, mais il est important que les bilans sortent, surtout quand ils honorent la session dont j’étais le directeur artistique. Je me rappelle qu’on a réussi à faire une session avec zéro cas de covid-19. Mais nous avons aussi organisé des panels et des colloques qui n’ont pas été pris en compte cette année,alors qu’on a investi du temps et de l’argent, ce qui me révolte, entre autres choses.

Pourquoi cela gênerait l’administration ?

Parce qu’on m’a toujours accusé d’être partisan de l’indépendance des JCC. Et c’est vrai que je suis pour une structure indépendante des JCC (une structure associative ou une fondation) où l’Etat restera toujours le financeur principal, mais toute la partie organisationnelle doit changer. Le festival de Cannes est une structure indépendante et, plus proche de nous, je citerai «Manarat» ou «Gabès Fen». Quand on a fait le colloque dirigé par M. Kamel Ben Ouanès, on cherchait à mettre la pierre angulaire de l’idée de l’indépendance, mais même avec cette idée, je tiens à ce que les JCC restent un festival national, un patrimoine de la Tunisie avec une gestion modernisée.

Certains pensent que c’est une atteinte aux fondamentaux des JCC…

Mais c’est le côté artistique qui est le fondement des JCC ! Tahar Cheriaa a parlé de cinématographie. Pour lui, les JCC sont là pour promouvoir et défendre un cinéma national, arabe et africain, mais il n’a jamais parlé d’organisation. Ce sont peut-être les raisons qui ont fait que ma reconduction ne soit pas validée. Aujourd’hui, les JCC sont sortis de La Kasbah pour aller à la Cité de la culture, mais rien n’a changé ni statutairement ni structurellement.

Le directeur des JCC a son mot à dire et, sans l’accuser de manquer de poigne, il voulait changer de directeur artistique et c’est une décision qui lui appartient…

A aucun moment, Ridha Behi ne m’a fait savoir qu’il était mécontent de mes services, bien au contraire, il a même reconnu que j’étais au premier plan de l’organisation et il n’a pas tari d’éloges envers moi, mais il a cédé à des pressions. Je me pose la question : à quoi sert un directeur des JCC s’il n’arrive pas à former son équipe ?

Vous êtes à l’origine de la création du Syndicat indépendant des réalisateurs-producteurs (Sirp). Pourquoi créer cette structure aujourd’hui ?

Aujourd’hui, la configuration de notre production est faite de la sorte : 80% des réalisateurs sont en même temps producteurs,mais ils ne se sont jamais organisés. En parallèle, il y a une association de réalisateurs que j’avais présidée à un certain moment et un syndicat des producteurs, rattaché à l’Utica et dont les membres ne dépassent pas la dizaine. Ce nouveau syndicat a parfaitement sa place, d’autant plus que ces expériences ont été menées dans des pays, comme la Belgique, ce qui a donné une représentativité importante aux réalisateurs-producteurs. Bientôt, on va appeler à une assemblée pour élargir le comité exécutif. La page du Sirp est consultable d’ailleurs sur Facebook où tout le monde peut voir notre charte sur le lien : SIRP Tunisie. Je rappelle que le bureau fondateur est formé par Ibrahim Ltaïef,  Abdellatif Ben Ammar, Sonia Chamki, Nidhal Chatta, Mohamed Zran, Habib Mestiri, Ghazi Zaghbani et moi.

Charger plus d'articles
Charger plus par Salem Trabelsi
Charger plus dans Culture

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *