La situation des finances publiques héritée de l’année 2020 est extrêmement difficile, sous l’effet notamment de la crise sanitaire, marquée par un important bond du déficit budgétaire et de la dette publique. La loi de finances 2021 a prévu un redressement de la situation qui devait permettre de ramener le déficit budgétaire en proportion du PIB de 10.4% en 2020 à 6.6% en 2021 et de contenir le recours aux emprunts dans les limites de 18.5 milliards de dinars.
La dérive des finances publiques est inquiétante. La situation résulte depuis 2020 de la contraction des ressources budgétaires (5,5% du PIB), tandis que les dépenses ont augmenté en grande partie du fait du remboursement d’arriérés de l’État à des entreprises publiques et d’un nouveau gonflement de la masse salariale des employés de la fonction publique (+15% par rapport à 2019), déjà en hausse structurelle depuis plusieurs années.
Néanmoins, les statistiques publiées par le ministère des Finances sur l’exécution du budget de l’Etat durant les cinq premiers mois de 2021, font ressortir une évolution favorable des recettes de l’Etat et notamment les recettes fiscales et une réduction des dépenses entraînant une baisse du déficit budgétaire de l’ordre de 1.945,7 MD par rapport à la même période de 2020.
L’augmentation des recettes fiscales se localise notamment au niveau de la TVA (+ 1.121,3 MD) et des droits de douane (+197.3) en relation avec la progression de la croissance en glissement annuel du PIB et de l’importation des biens sous le régime on shore (+19.3%).
Pour ce qui est des dépenses de l’Etat, une baisse importante des dépenses d’intervention est située notamment au niveau des carburants qui ont connu des ajustements des prix intérieurs à deux reprises depuis le début de l’année et un retard dans l’exécution du budget d’équipement (baisse de l’investissement de l’Etat de 40%).
Concernant le financement du déficit budgétaire, les réalisations ont été marquées par l’importance des emprunts intérieurs qui augmentent de 1.324,6 d’une période à une autres, alors que les emprunts extérieurs baissent pour se limiter à 2.044,3 MD soit 15.7 % du montant de 13 Milliards de dinars prévu dans la loi de finances, reflétant les difficultés de mobilisation des crédits extérieurs en raison du blocage des négociations avec le FMI et de la dégradation de la note souveraine de la Tunisie par les agences de rating, notamment par la dernière notation de Fitch, qui a confirmé celle de Moody’s de février dernier, que la Tunisie se situe « dans la dernière marche de l’escalier ».
Tensions budgétaires
La poursuite du redressement du budget de l’Etat pour le reste de l’année dépendra des efforts qui seraient mis en œuvre pour réaliser une croissance aussi rapidement que possible.
D’après le bulletin conjoncturel économique du deuxième trimestre 2021 publiée par le FIKD, le redressement du budget de l’Etat demeure tributaire de l’amélioration rapide de la capacité de la Tunisie à mobiliser les capitaux extérieurs requis, « qui passe impérativement par la mise en œuvre des réformes politiques et économiques, et le déblocage des négociations avec le FMI pour l’obtention d’une nouvelle facilité qui permettrait de mobiliser d’autres financements y compris auprès du marché financier international ».
Concernant le secteur monétaire et financier, il continue à être soumis à de fortes pressions sous l’effet des tensions budgétaires. Les indicateurs monétaires relatifs au premier semestre 2021 sont marqués par un fléchissement de l’activité, d’une part, et des tensions budgétaires, d’autre part.
Ainsi, les besoins en liquidités bancaires ont enregistré une tendance baissière du refinancement de la BCT contrairement aux billets et monnaie en circulation qui continuent à progresser à un rythme dépassant celui du PIB.
Par ailleurs, « les créances sur l’Etat augmentent fortement avec un encours des Bons du Trésor assimilables atteignant 16.6 milliards de dinars au premier juillet 2021 contre près de 13.9 milliards une année auparavant, sachant que l’Etat a mobilisé en février 2021 un premier prêt syndiqué de 465 millions de dollars (l’équivalent de 1.260 millions de dinars) souscrit par 14 banques tunisiennes pour couvrir une partie des besoins de financement du budget de l’Etat ». Cela dit, d’importantes pressions sont attendues pour les prochains mois. Elles concernent d’abord le budget de l’Etat, compte tenu de ses importants besoins, notamment pour rembourser des échéances importantes au titre de la dette extérieure. Dans ce cadre, « le remboursement, début juillet 2021, de deux tranches d’un crédit contracté sur le marché monétaire international par la mobilisation auprès de banques locales de l’équivalent de 2. 808,8, a entraîné une baisse des avoirs en devises qui se limitent à l’équivalent de 132 jours le 25 août 2021 contre 140 jours une année auparavant et une augmentation du refinancement par la Banque centrale de 25 % durant la même période ».
Elles concernent également les entreprises publiques et privées opérant notamment dans les secteurs du tourisme et des transports, durement touchées par la crise sanitaire, requérant la mise en place de plans de restructuration et de financement, non seulement pour renflouer leur trésorerie, fortement accablée par la crise, mais aussi pour se préparer à mieux exploiter les opportunités de l’après-crise.