
Rencontre dans les coulisses du Cinéma Pathé avec le protagoniste du film documentaire d’Eliane Raheb, «La Guerre de Miguel».
Dans le documentaire « La Guerre de Miguel» où vous êtes le protagoniste principal, on vous voit parler, rire et pleurer. Est-ce du jeu ou la réalité vraie ?
Non, je ne joue pas, d’ailleurs je ne suis pas acteur, je suis traducteur. Je raconte plutôt mon histoire, avec force détails. Comme j’étais passé par des expériences traumatisantes pendant mon adolescence, avant de quitter le Liban, la réalité est dans ces cas parfois relativement perdue ou floutée. Avec l’effet des années, la mémoire se perd aussi un peu. J’ai donc ressuscité mon histoire avec les défaillances de la mémoire mais dans toute sa vérité. Une vérité qui peut choquer parce qu’elle transgresse la norme de nos pays arabes.
Dans quelles circonstances avez-vous rencontré la réalisatrice Eliane Raheb ?
Je l’ai rencontrée dans un festival de cinéma à Barcelone où je travaillais comme interprète de conférences. Elle était venue présenter un de ses films sur la guerre du Liban. Eliane a saisi que j’étais mal à l’aise face à ce sujet que je m’efforçais d’oublier. Lorsqu’on a commencé à discuter, j’ai senti dans ses yeux une empathie et un intérêt sincères pour mon expérience de vie. Alors, je me suis livré à elle. Eliane a décidé d’en faire un documentaire hybride qui traite des thèmes de la famille, de la religion et du fascisme et de leur impact sur la construction de l’identité politique et sexuelle des individus. Elle aurait pu faire tout ce qu’elle voulait de la matière qu’elle a réunie le long de cinq années de tournage. Mais Eliane a été d’une parfaite honnêteté intellectuelle. Car une relation d’amour non conventionnelle et d’amitié s’est créée entre nous entre temps. L’interactivité entre nous a également changé la vie d’Eliane.
Le film vous a-t-il servi de thérapie ?
Le film incarne la meilleure des thérapies que j’aie faite de ma vie. Je suis passé par cinq psychiatres qui n’ont pas su alléger mes souffrances. Alors que le film a eu un impact infiniment plus positif que toutes mes précédentes psychothérapies. C’est une catharsis en bonne et due forme, qui me donne la sensation de me sentir beaucoup plus léger aujourd’hui.