Depuis quelque temps, disons près de 6 mois, les experts de tous bords sont convaincus que le risque d’un clash à la libanaise, ou du moins à la portugaise, n’existe plus, et que les Pouvoirs publics ont réussi à l’éliminer… mais la réalité perdure. Cette réalité pourrait se manifester et très brutalement.
Les fondamentaux macro-économiques et macro-financiers sont explicites : la Tunisie est au bord du puits et elle manque d’oxygène.
Les opérateurs (ménages, entreprises, Etat) étouffent. Ils ont besoin d’oxygène. Entendez par là : des fonds, de la monnaie. Que la BCT, aux dires de son Très Honorable Gouverneur, ait injecté un milliard de dinars, via les banques commerciales, ne change en rien à la crise de suffocation générale.
La preuve, malgré la profusion des bestioles statistiques financières, les fermetures d’entreprises se succèdent, le pouvoir d’achat des ménages plonge, le chômage caracole et le Trésor Public est aux abois dès la deuxième semaine de chaque mois.
Et on nous bassine les oreilles que «La destruction de la monnaie est inévitable», que «la création monétaire est inflationniste» ou encore, en un filigrane insidieux, que «l’indépendance de la BCT est incontournable en démocratie».
Certes, dans des marchés haussiers, il est préférable que la BCT reste pleinement investie de ses prérogatives pour «réguler la stabilité macro-économique et macro-financière» quoi qu’il advienne. Mais, aujourd’hui, en Tunisie, pouvons-nous affirmer que nous sommes dans une conjoncture «haussière» ?
Je serais tenté de répondre par la négative. Et je franchis le pas.
On stagne au fond du puits. Et on attend la corde salvatrice pour nous en sortir. Ce qui nous amène à lever un certain nombre d’ambiguïtés :
En premier lieu, une croissance inclusive et intelligente (innovante, verte), au-delà d’une simple croissance du PIB, est au cœur de la vision sociale qui est à l’origine du soulèvement du 14 janvier 2011.
Relever les défis structurels au sein de l’économie tunisienne, résultats d’une déviance sociale auto-entretenue par des lobbys, depuis des décennies et encore aujourd’hui en exercice, pourrait sans doute retrouver son souffle dans une orientation sociale, pour une meilleure productivité via une plus grande cohésion sociale.
En deuxième lieu, préserver l’équilibre entre les secteurs publics, privés et communautaires implique la mise en place de mécanismes législatifs qui permettraient de faire face aux énormes défis, notamment en raison de la globalisation de l’économie et de sa stagnation, le gonflement du secteur informel, de la démographie et la contrainte sur les ressources.
Les Réformes Structurelles n’impliquent pas qu’il faille opter pour une austérité «à tout va», et dont le résultat serait un impact négatif sur la croissance, l’emploi, et le pouvoir d’achat.
Partout, où elles (les Réformes Structurelles à l’aveuglette) ont été appliquées, par ses mesures restrictives, elles se sont traduites par une spirale auto-entretenue de récession économique et du déficit budgétaire via une régression des rentrées fiscales. L’approche préconisée est qu’il faut miser, entre autres, sur des investissements en infrastructures et infléchir ensemble la déviance structurelle.
Toutes les études, notamment en Tunisie, depuis deux décennies, concluent à ce que la paupérisation, et la hausse des inégalités qui en résulte, est un obstacle à la croissance économique.
Enfin, si nous voulons booster l’économie et attirer des investissements (n’est-ce pas l’objectif des Pouvoirs Publics), les entreprises, notamment privées, ont des attentes qu’on ne peut pas ignorer, notamment un climat des affaires assaini, des conditions de financement pour augmenter l’investissement dans l’économie réelle et un environnement de stabilité sociale et de stabilité politique.