Une nouvelle stratégie inventée par le génie tunisien vient d’être mise en œuvre. On veut parler des blocages concernant la collecte des ordures. Cette crise artificielle est en train de faire tache d’huile, puisque de plus en plus de municipalités s’opposent à ce qu’on utilise leur territoire pour déposer les ordures des autres.
Ce film d’horreur est appelé à durer dans le temps et dans l’espace, parce qu’il va comme un gant à des parties qui cherchent par tous les moyens à se mettre en travers de toute tentative de débloquer la situation dans le pays. C’est une nouvelle arme entre les mains de ceux qui se cachent derrière ces mouvements d’apparence anodine et sans arrière-pensées politiques.
Les irresponsables locaux
L’entassement des déchets à Sfax n’est que l’expression concrète d’une volonté délibérée de mettre des bâtons dans les roues des autorités qui s’efforcent d’apporter des solutions aux innombrables problèmes du pays. C’est une opération de diversion dont le but inavoué est la déstabilisation. Sous des prétextes fallacieux (comme la protection de l’environnement ou des droits) on ferme des lieux de production, des routes et des voies ferrées. L’épisode des ordures entre dans ce contexte. Des “élus” locaux légifèrent comme bon leur semble et créent des situations catastrophiques pour le citoyen. Ainsi, cet édile se dit outragé que l’on vienne déverser les déchets des autres “chez lui” et cet autre qui n’accepte pas qu’on mette les pieds “chez lui” sans son autorisation ou, encore, ces “élus municipaux” qui empêchent depuis des années le passage d’un train à travers leur ville.Aujourd’hui, ce qu’on appelle la gouvernance locale a causé plus de torts aux régions qu’on ne pouvait l’imaginer. De piètres lois électorales ont permis au premier venu d’accéder au pouvoir et d’imposer ses vues. De ce fait, certains “responsables” locaux, prennent des décisions disproportionnées et se livrent à des abus d’autorité sans aucun égard aux conséquences qui peuvent s’ensuivre. Quand on voit ce qui se trame dans le pays et ces tonnes de déchets qui jonchent les rues de plusieurs villes, on comprend que nous nous dirigeons résolument vers une «poubellisation’’ urbaine.
D’autres pollutions
Cette nouvelle notion a, déjà, pris cours dans notre quotidien. En effet, où que l’on aille on ne peut qu’être confronté à des scènes de désolation et de laideur. Aussi bien dans le mobilier urbain que dans le paysage audiovisuel en passant par le langage, tout est pollué. Le paysage médiatique est, lui aussi, lourdement infecté par ce virus. Il suffit de regarder ces chaînes TV, qui meublent leurs programmes de longs débats dits politiques ponctués par des combats de coqs et pleins d’impolitesses et d’écarts de langage. Même les feuilletons étrangers diffusés à longueur d’antenne utilisent dans le doublage un registre lexical de bas étage non exempt d’obscénités ou de cascades d’insultes et d’injures. Les mots violents comme “mort”, “tuer”, “se venger”, “égorger” etc… reviennent très souvent dans les dialogues des personnages.
La TV “Watania” n’échappe pas à ce courant qui est en vogue et se complaît, de plus en plus, dans la facilité en offrant aux téléspectateurs des programmes insipides et des débats fastidieux. Ce ne sont plus les invités qui prennent le temps de développer leurs sujets, mais les présentateurs (trices) qui se mettent en scène et s’affichent comme des vedettes à leur place.
Quant à la presse de caniveau, elle prospère, supplée, en cela, par les torrents de mensonges des réseaux sociaux. Et, tout autour de nous, on assiste aux ravages des vandalismes, des tags et du chaos de la circulation automobile.
En somme, tout est à la merci d’un tsunami de mauvais comportements et d’attitudes rebelles dont le seul but est d’alimenter une ambiance de désordre et d’anarchie. Au nom de la liberté, tout le monde veut imprimer son tempo et imposer son mode de vie. Le phénomène de la poubellisation n’est que l’illustration de cette mentalité d’autodestruction qui fait de plus en plus d’adeptes et entraîne le pays vers plus de régression.
Pas de solution immédiate
Comment un être bien constitué peut-il expliquer l’attitude de ces gens qui veulent se débarrasser de leurs ordures et de ceux qui refusent de les accepter sur leurs terres ? Le cercle vicieux dans lequel tout le monde est tombé montre bien à quel point tous les sujets sont devenus facilement récupérables et manipulables par ceux qui ont des projets suspects en tête. Tout est bon pour eux, dès lors qu’il s’agit de marquer des points contre le pouvoir en place.
Cela montre, également, que ceux qui sont derrière le rideau ont le bras long, qu’ils disposent de beaucoup d’argent sale (c’est, justement, le mot) et sont déterminés à mettre à genoux le pays, pourvu que leurs intérêts ne soient pas touchés.
Il ne faudra pas s’étonner que ce phénomène des poubelles non collectées se multiplie et s’élargisse à d’autres régions. Il, y aura, comme d’habitude, des discours, en apparence logiques, vantant la défense de l’environnement et la protection des générations à venir. Mais personne n’admettra qu’il n’y a pas de solution immédiate et que les moyens pour adopter des mesures pérennes (comme la valorisation) ne sont pas disponibles.
Car si on interdit de déposer les ordures dans des décharges contrôlées, qu’on interdit leur incinération ou leur enfouissement, quelle solution de rechange ces opposants donnent-ils ? Aucune.