Accueil A la une Le braconnage : Un crime organisé ?

Le braconnage : Un crime organisé ?

Bien que les périodes et les modalités de chasse soient fixées par la loi en Tunisie, les braconniers continuent de chasser hors saison sans respect des législations en vigueur, ce qui a détruit la quasi-totalité des espèces animales sauvages. Cela constitue aussi une violation flagrante des principales conventions internationales.

Le braconnage constitue une vraie menace pour de nombreuses espèces animales en voie de disparition en Tunisie et une violation flagrante des principales conventions internationales, dont les plus importantes sont la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore menacées d’extinction dite ‘’Cites’’, la Convention africaine pour la conservation de la nature et de ses ressources adoptée en Algérie en 1975, et la Convention relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe conclue en Suisse le 19 septembre 1979, en plus de la législation nationale, notamment les articles du Code forestier relatif à l’organisation du secteur de la chasse et la préservation de la vie sauvage, dont le plus important est l’article 166, qui stipule que « Nul ne peut se livrer à la chasse sauvage que pendant la période de son ouverture légale et sur tout le territoire de la République ».

Le braconnage, une menace pour les espèces animales

Alors que cette menace environnementale sur l’une des ressources les plus importantes du pays s’accroît, et que les violations se multiplient d’année en année, que ce soit par des Tunisiens ou des étrangers, les autorités tunisiennes sont incapables de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à ce crime commis contre la nature, notamment en accordant des permis de chasse aux émirs du Golfe qui pratiquent annuellement le braconnage au vu et au su des structures légalement mandatées pour protéger et préserver cette richesse des attaques. Prenons l’exemple du parc national de Jebel Orbata à Gafsa, malgré les efforts concertés pour préserver la biodiversité, le braconnage se poursuit dans ce parc national, considéré comme un foyer pour les gazelles dorcas et les autruches d’Afrique du Nord, deux espèces menacées, non seulement en Tunisie, mais aussi dans toute la région désertique et côtière du continent africain. Il existe également des espèces animales, telles que le cerf de montagne et l’autruche d’Afrique du Nord, qui sont des animaux inscrits dans la première annexe de la convention Cites parmi les espèces menacées, ce qui fait du braconnage une menace pour leur sauvegarde. Le parc contient, également, des caméléons et des serpents du désert, qui ne sont pas des espèces menacées à l’heure actuelle, mais il est probable qu’ils le deviendront à moins que leur chasse devienne conforme aux dispositions de la loi. Le parc abrite, en outre, des espèces rares inscrites sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature et figure également dans les annexes de la convention internationale Cites.

Les plus importantes d’entre elles sont le chêne du Maroc, la gazelle dorcas et l’autruche d’Afrique du Nord, en plus de plusieurs espèces d’oiseaux. Cela signifie que leur chasse représente une menace pour l’avenir de la faune et pourrait entraîner un déséquilibre de la biodiversité. Bien que le danger de ces pratiques sur les générations présentes et futures ait été dénoncé par les défenseurs de l’environnement, les autorités officielles n’ont pas réagi pour faire face à cette menace imminente, notamment le ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques  et de la Pêche et les administrations forestières régionales qui en assument la responsabilité.

Pour une loi plus dissuasive

Face à cette situation, le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (Ftdes) avait auparavant alerté les autorités compétentes sur la gravité de ces pratiques, appelant à la nécessité d’actualiser les lois relatives à la faune sauvage pour qu’elles soient plus dissuasives contre les contrevenants, un point que l’expert en droits de l’homme et droit de l’environnement et ancien directeur des études à l’Institut supérieur de la magistrature, Me Najiba Al-Zayer, a soulevé dans un rapport publié par le Forum concernant le braconnage dans le désert de Tozeur et Gafsa, soulignant la nécessité d’accélérer la publication du Code de l’environnement et de mettre à jour le Code forestier et les textes d’application liés à la chasse aux animaux sauvages menacés en y intégrant les principes de base du droit de l’environnement, dont le principe de prévention, le principe de prudence et le principe d’information, et en mettant l’accent sur la nécessité d’harmoniser le code forestier avec le Code des collectivités locales, qui garantit l’approche participative et le principe de la transparence, ainsi que sa compatibilité avec les principes généraux de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption et l’impunité, qui sanctionnent ceux qui portent atteinte aux ressources animales sauvages.

Les riches du Golfe violent la souveraineté nationale

Dans notre pays, le braconnage n’est pas pratiqué en cachette ou à l’abri du contrôle des autorités, mais la plupart du temps, ça se passe avec l’aval des structures officielles, avec à leur tête le ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, surtout quand il s’agit des riches du Golfe qui s’adonnent annuellement à des opérations de braconnage de la faune, qu’il s’agisse d’oiseaux, de cerfs ou d’autres espèces animales, profitant du climat d’impunité et de la faible volonté de protéger la vie sauvage.

Malgré la condamnation massive des organisations de la société civile et des défenseurs de l’avenir de la faune appelant à mettre un terme à cette situation, les violations se poursuivent, avec la bénédiction des autorités concernées. En janvier 2021, des permis ont été accordés aux Qataris leur permettant d’entrer dans les territoires tunisiens sous le couvert de tournage de documentaires, qui n’étaient rien d’autre qu’une simple opération de camouflage de l’activité de chasse envisagée.

Dans ce contexte, le Ftdes a appelé à la nécessité de faire face par tous les moyens légaux à ces violations, considérant que cette pratique porte atteinte à la souveraineté de l’Etat et contredit tous les principes de protection des animaux en voie de disparition. En conséquence, le Forum réitère l’appel au gouvernement à honorer ses engagements internationaux, à protéger et à préserver toutes les espèces animales, d’autant plus que la chasse se fait sans aucun contrôle de la part de l’Etat.

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