Accueil A la une Situation de la mère et de l’enfant en Tunisie – Présentation des résultats de la quatrième enquête nationale : Les indicateurs au rouge

Situation de la mère et de l’enfant en Tunisie – Présentation des résultats de la quatrième enquête nationale : Les indicateurs au rouge

La mortalité infantile et la violence à l’égard des enfants sont les deux signaux les plus alarmants à la lecture des données statistiques     de l’enquête. Il s’agit de redresser la barre au niveau de ces indicateurs au plus vite car la situation se détériore de façon générale.
Un nouveau drame a touché la petite enfance  avec le décès de six prématurés les 22,23 et 24 juin à Nabeul. Malgré les déclarations du ministre de la Santé par intérim, Mme Sonia Bencheikh qui discrédite la thèse de la mort par une quelconque infection, il y a anguille sous roche. Le système de santé publique tunisien jadis la fierté du pays souffre de mille maux et pour cause.

De l’avis même du directeur de l’INS présent à l’ouverture du séminaire sur la situation de la femme et de l’enfant organisé conjointement par le ministère du Développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale, l’Institut national de la statistique  et le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef),  les indicateurs de la santé sont passés au rouge. Au sujet de la mortalité néonatale et infantile, il s’exprimera par ces mots : « Si il y a des cas de rougeole, c’est qu’il y a des problèmes de vaccination. On ne doit pas s’arrêter uniquement à la lecture des chiffres qu’ils soient positifs ou négatifs».

D’après le programme onusien, la mortalité néonatale touche 0.9% des naissances vivantes. Neuf enfants pour mille ont une probabilité de décéder dans le premier mois de vie en Tunisie. La mortalité des moins de cinq ans grimpe à 17 enfants pour mille et 13 enfants pour mille cas de mortalité infantile. Cependant, la stabilité de certaines données depuis l’an 2000 doivent permettre de relativiser dans l’absolu sur les cas de décès chez les enfants au contraire des nourrissons qui meurent avant de naître dans les hôpitaux publics.

La situation de la mère et de l’enfant est devenue préoccupante au point qu’une enquête de grande envergure a été conduite par l’Institut national de la statistique (INS) avec la collaboration de l’Unicef pour faire une mise au point sur ce qui fonctionne ou pas dans la vie de la mère et l’enfant. Elle n’en constitue pas moins une mine d’or pour les professionnels de nombreux secteurs allant de l’éducation à la santé. L’Unicef qui  a contribué techniquement à la réalisation de cette enquête tire à boulets rouges sur certains indicateurs afin d’inciter les décideurs tunisiens à en faire davantage.

L’Unicef brosse un tableau noir

Mme Lila Pieters, représentante de l’Unicef ne cesse de faire un constat alarmant depuis quatre ans quant à la dégradation de la vie de la mère et de l’enfant en Tunisie. Elle propose de mener des actions de sensibilisation nouvelles et mieux réfléchies pour combattre notamment les violences faites aux enfants. Elle affirme ceci : «Le fléau sur la société engendré par la violence sur les enfants révèle que 90% des enfants sont exposés à la violence. Ce qui est une menace pour l’éducation des générations futures».

Elle estime que les efforts au moyen de programmes de lutte vont réduire le taux de violence. Elle approuve la fiabilité de l’enquête de «grande qualité». Cependant elle a félicité le gouvernement tunisien et en particulier le Mdici et l’INS pour la conduite et la publication des résultats de l’enquête Mics 6 en cette année de célébration du 30e anniversaire de la convention des droits des enfants. Le programme international Mics (multiple indicator cluster surveys) a permis d’élaborer une nouvelle enquête par grappes à indicateurs multiples spécifique pour la Tunisie. Il s’agit du Mics 6 qui succède au Mics 4. Le Mics 5 ayant sauté dans le programme pour des raisons d’agenda ou de choix.

De l’avis de tous les partenaires impliqués, cette mission est une réussite grâce au concours du ministère du Développement  de l’investissement et de la Coopération internationale, l’Unicef et l’Institut national de la statistique et d’autres partenaires techniques et financiers. Il s’agit de la présentation des résultats de la quatrième enquête réalisée en 2018 sur la situation de la mère et l’enfant et sa sixième version sur le plan international.

Pour une meilleure sensibilisation

Il y avait un sentiment mitigé dans l’ensemble entre les chiffres alarmants dressés par l’Unicef et certains intervenants à la fin de la présentation des résultats de l’enquête. Laquelle enquête a été jugée de grande ampleur par le ministre du Développement et de l’Investissement, Zied Ladhari. Il a signalé que les « résultats de cette enquête viennent à point nommé au moment où la Tunsie s’apprête à préparer son prochain plan quinquennal de développement 2021/2025. Les données serviront pour évaluer nos politiques de développement notamment celles touchant les mères et les enfants. Et de poursuivre : «Si on mobilise davantage de moyens pour nos enfants, nous serions en mesure d’atteindre 70% des objectifs du développement durable(ODD).

Au niveau des indicateurs, il y a des satisfactions notamment en ce qui concerne les indicateurs environnementaux et ceux liés à la qualité de services. Cela reste un défi pour nous au niveau de l’intégration de la petite enfance et des compétences acquises au niveau de l’école. Il y a des campagnes de sensibilisation à opérer au niveau de l’usage de la violence pour la discipline des enfants ce qui est préoccupant. Il y a un travail de sensibilisation très important.

Le taux d’allaitement post-natal est un des plus faibles à l’échelle mondiale ce qui nécessite un meilleur accompagnement des femmes et des mères. Il faut envisager une nouvelle approche de la santé des mères sur la façon d’allaiter durant la phase post-natale qui est très faible en Tunisie. L’avenir de l’enfant et son développement en dépendent beaucoup. En effet, la promotion de l’allaitement maternel doit faire partie des priorités pour améliorer la situation de la mère en Tunisie.

Le taux d’allaitement par femme et pour chaque nouveau-né est seulement de 15%. Le problème du non-allaitement des mères implique des difficultés qu’il faut  reconnaître pour y remédier. Intervenant lors des débats, Dr Bousnina critique les problèmes au sein des structures publiques de santé au-delà même des décalages entre le système public et privé de  soins. Elle rappelle que durant six mois les patients ne disposaient pas de carnet de santé ce qui causait du tort aux campagnes de vaccination. Il salue au passage le remarquable travail de l’INS pour sa technicité étant donné «qu’ils ont été très sollicités».

D’autres indicateurs sur la situation de la mère et de l’enfant en Tunisie ont été fournis. Le développement de la petite enfance, l’éducation, la santé, la nutrition, la fécondité, la santé maternelle et du nouveau-né ont été développés. Cependant un intervenant a formulé l’idée que cette enquête est insuffisante au motif qu’elle ne présente que des éléments quantitatifs et en omettant les indicateurs qualitatifs.

On fait un petit retour sur les conditions de déroulement de l’enquête qui va constituer un outil de référence pour les politiques familiales en faveur de la protection de la mère et de l’enfant.

Spécificités de l’enquête

La Tunisie a démontré sa volonté à collecter des données sur la mère et l’enfant avec de nouveaux programmes et une stratégie. Il faut bien utiliser et interpréter les statistiques pour leur pertinence. L’enquête Mics est l’une des enquêtes qui sert le plus à invoquer les politiques de l’éducation. Cette enquête nécessite une meilleure exploitation avec la dissémination régionale des résultats de l’enquête.

Le maître de conférence a résumé les enjeux en quelques phrases : «Le pouvoir public doit intervenir pour garantir un avenir meilleur pour nos enfants. Beaucoup de résultats nous interpellent sur le chemin qui reste à parcourir en vue d’améliorer le tableau d’ensemble. Je vais profiter de cette occasion pour signaler la qualité des informations et la qualité de la collecte. On a bénéficié du transfert du savoir-faire; ça nous a permis d’améliorer la qualité de l’administration du questionnaire et la formation des agents et nous espérons renouveler ce genre d’enquête prochainement avec la même réussite. Tous les statisticiens et les informaticiens qui ont contribué avec les bailleurs de fonds à la réussite de ce projet sont à féliciter». Madame Touihri de l’INS a présenté ses résultats avec des objectifs à orienter une politique en faveur de la mère et l’enfant. L’enquête par grappes à indicateurs multiples (Mics) est une enquête-ménage élaborée par l’Unicef dans plusieurs pays. En Tunisie, l’enquête Mics réalisée en 2018 ; fait suite à 3  précédentes enquêtes similaires.

Elles ont été réalisées successivement en 2000, 2006 et en 2012. Elle a permis d’obtenir des informations actualisées sur la situation de la mère et de l’enfant et de mesurer des indicateurs-clés qui permettent à la Tunisie de suivre les progrès dans la voie de la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD) et des différents engagements convenus au plan international. Elle contribue également à identifier les groupes vulnérables et les disparités pour orienter les politiques et les interventions de développement. L’enquête a été réalisée sur 11.225 ménages composés de 2.445 hommes, 10.559 femmes, 4 934 enfants âgés de cinq à dix-sept ans, 3.420 enfants de moins de cinq ans. Cette enquête a couvert l’ensemble du territoire tunisien à travers sept grandes régions suivant une méthode de tri scientifique qui permette de garantir la représentativité des données. L’enquête a été réalisée par l’INS avec l’assistance technique de l’Unicef et les contributions de l’Agence italienne pour la coopération au développement, l’ambassade britannique et l’Union européenne.

Les tableaux des résultats de la Mics 6 sont disponibles sur les sites Internet de l’INS  aux adresses suivantes : www.ins.tn, du Mdci à www.mdci.gov.tn, et de l’Unicef à www.unicef.org.tn

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