Accueil A la une L’interview | Abdelhamid Herguel parle de l’équipe de Tunisie : «On a raté quelque chose au Mondial !…»

L’interview | Abdelhamid Herguel parle de l’équipe de Tunisie : «On a raté quelque chose au Mondial !…»

 

Ex-grand joueur du Stade Tunisien et de l’équipe nationale, Abdelhamid Herguel retrace, avec son regard à lui, le parcours de l’équipe de Tunisie au dernier Mondial. Pour lui, c’est un sentiment de frustration après avoir manqué une qualification au second tour à la portée. Retour sur le Mondial, mais également sur l’après-Mondial. Interview.

Quel regard d’ensemble portez-vous sur la participation de l’équipe de Tunisie au Mondial qatari ?

C’est le sujet de l’actualité. Et ça fait des années que l’on rêve de se qualifier au second tour. Ce second tour était à notre portée à mon avis. Le groupe était abordable. Ce match contre l’Australie reste un ratage complet, et ça ne peut pas être compensé par la victoire devant la France. Il faut dire que les Français n’auraient pas aligné leur seconde équipe si c’était le second ou le premier match. On a bien joué contre la France, on s’est bien positionné, mais, contre l’Australie, on a complètement raté le coup. On a laissé passer une chance inouïe, surtout après avoir battu la France. Regardez le Maroc, le Sénégal qui ont passé le premier tour, alors que nous aurions pu faire mieux. Nettement mieux.

Justement, parlons de cette défaite face à l’Australie. Qu’est-ce qui n’a pas marché à vos yeux ?

On s’est trompé de casting dans un match qu’on devait l’emporter. Kechrida et Maâloul, deux excentrés qui pouvaient créer le surnombre, devaient jouer d’entrée pour épauler l’attaque. On a eu des occasions, mais pas bien exploitées devant une athlétique Australie meilleure que nous dans les duels aériens.

Tactiquement, on sait défendre, on sait contrer, mais ce jour-là, on avait sombré dans le non-jeu. On n’avait pas su exploiter nos atouts et nos points forts. Et c’est ce qui accentue l’amertume.

Des cadres de l’équipe, des joueurs de métier ont été critiqués pour ce qu’ils ont présenté contre l’Australie. Qu’en dites-vous ?

C’était exagéré et virulent comme critique. C’est même ingrat envers des joueurs qui ont beaucoup donné à la sélection. Un joueur comme M’Sakni n’a pas été respecté à mon avis. Les blessures, l’âge aussi, expliquent son rendement, mais lui et d’autres joueurs ont des qualités et n’ont pas triché. Qu’on respecte et qu’on apprenne à bien valoriser nos joueurs de métier.

Maintenant que le Mondial est du passé pour l’équipe nationale, qu’est-ce qui doit changer au futur pour ce nouveau cycle post-Mondial ?

Il faut une profonde et crédible évaluation de ce que l’équipe nationale a fait avant et pendant le Mondial. On a toujours parlé de réforme, mais on ne l’a jamais fait. C’est le moment opportun pour réformer notre foot et pour sauver un championnat que je qualifie de honteux. Les autres pays nous ont dépassé, la télévision ne transmet plus les matches… C’est désolant.

Et là, je dis que le foot est en premier lieu une affaire de footballeurs de qualité qui connaissent bien leur métier, qui ont joué en sélection. Regardez dans le monde entier, les ex-internationaux qui ont un grand vécu, un niveau élevé, des diplômes, des relations, ce sont eux qui dirigent. En Tunisie, ils sont ignorés, mis de côté, écartés alors que les actuels dirigeants viennent d’autres domaines que le football. Au moins, ils doivent être entourés par des ex-internationaux et des connaisseurs.

Vous êtes pour ou contre le maintien de Jalel Kadri ?

J’ai un grand respect pour Jalel Kadri qui, malgré son peu d’expérience, a réussi plus ou moins à apporter une touche tactique à l’équipe nationale. Mais je demeure convaincu qu’il a raté aussi d’autres aspects : la liste retenue, la fausse polémique où il a parlé de l’Espérance, les changements lors du match face à l’Australie…

En plus, j’ai le sentiment qu’il n’est pas l’unique décideur en sélection. Ça se voit qu’il est influencé.

Personnellement, j’opte pour l’idée d’un sélectionneur étranger qui a une forte personnalité et qui peut relancer l’équipe nationale et rebâtir son avenir. Nous avons souvent réussi avec les entraîneurs étrangers qui nous ont apporté beaucoup, à l’image de Pictchinzeck, Lemerre, Kasperczak. Nagy…

Les entraîneurs tunisiens, même ceux que vous pensez audacieux et non influençables, n’ont pas la personnalité et la force de caractère pour s’imposer auprès de leurs dirigeants.

Vous pensez qu’on a des joueurs d’avenir qui peuvent rallier la sélection et réussir ?

Vous savez, chaque chose a une fin. Des joueurs vont devoir partir, et on doit les saluer et les aider à être valorisés. Je ne sais pas si la relève peut compenser vite le départ de certains cadres, mais notre football, malgré un championnat faible, enfante une bonne matière première. Ce qu’il faut, c’est des entraîneurs, des dirigeants qui savent les perfectionner. Des gens qui créent le cadre idéal pour qu’ils s’expriment. On a aussi des solutions dans les championnats européens, des jeunes expatriés doués qui rêvent de porter le maillot de l’équipe nationale. Je pense que les changements de l’effectif sont une obligation et quelque chose de normal. Il y a toujours un moment où des joueurs débarquent et d’autres qui font leurs adieux.

Parlons Mondial. Qu’est-ce qui a retenu votre attention ?

La chose qui m’a marqué, c’est l’écart qui s’est réduit entre les grandes nations du foot et les outsiders. L’exemple du Maroc qui a battu des sélections de renom est bien frappant. C’est un Mondial de rupture avec le passé. On joue plus vite, plus engagé, moins «classique». Ce Mondial qatari a révolutionné le football».

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