Accueil Economie Pnud | Cartographie des investissements en faveur des ODD en Tunisie : Mieux orienter les politiques et les investissements

Pnud | Cartographie des investissements en faveur des ODD en Tunisie : Mieux orienter les politiques et les investissements

 

Le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) et le ministère de l’Economie et de la Planification viennent de lancer à Tunis la cartographie des investissements en faveur des Objectifs de développement durable (ODD) («SDG Investor Map»).

Le bureau de pays du Pnud en Tunisie a lancé la Cartographie des investissements en faveur des ODD en Tunisie, et ce, avec le ministère de l’Economie et de la Planification. D’après son rapport publié récemment, « le  Pnud Tunisie collabore avec l’Etat tunisien, la société civile, le secteur privé ainsi que d’autres parties prenantes, en vue d’assurer une transition vers une société plus démocratique, transparente, égalitaire et résiliente ».

Selon ce même rapport, l’appui du programme des Nation unies se concentre sur trois domaines essentiels.  En premier lieu, l’Etat de droit et la consolidation de la démocratie, notamment dans les domaines de la lutte contre la corruption, de la réforme de la justice et du secteur de la sécurité, sans oublier le processus constitutionnel devant aboutir à l’élaboration d’une loi fondamentale devant constituer le socle d’un nouveau contrat social. Second volet important, la croissance inclusive et le développement humain durable pour répondre efficacement aux défis et besoins socioéconomiques de la Tunisie, tels qu’un chômage élevé chez les jeunes et les femmes, les disparités et inégalités régionales importantes, le manque d’inclusion socioéconomique des populations les plus vulnérables, le déficit de ressources pour le financement du développement et de l’Agenda 2030…

Renforcement de la résilience des communautés

Le troisième et dernier volet concerne la résilience et l’adaptation au changement climatique, par la mise en place de mécanismes et approches innovants facilitant la participation de tous les acteurs à instaurer un développement durable. Aussi, l’utilisation d’outils de planification stratégique plus intégrés et plus participatifs au niveau national et local et permettant le renforcement de la résilience des communautés (gestion côtière, gestion des terres, gestion des ressources hydriques, etc..) représente un exemple d’initiatives que le Pnud contribue à appuyer notamment dans le cadre de son nouveau document programme du pays pour la période 2021-2025. D’après le rapport «SDG Investor Map», « les Cartographies des investissements en faveur des ODD sont des rapports détaillés sur les opportunités et les conditions d’investissement en faveur des ODD dans les marchés et les secteurs cibles. Les cartes ciblent l’écart entre l’intérêt à investir dans les ODD et les modèles commerciaux qui pourraient offrir des opportunités d’investissement. L’élaboration d’une Cartographie des investissements en faveur des ODD nécessite de filtrer les priorités nationales et les besoins de développement pour dériver des DOI ».  Il est à noter que ces cartes aident à délimiter les domaines d’opportunité d’impact pour chaque pays afin de répondre aux besoins de développement sous-sectoriels et sous-régionaux tout en capitalisant sur la dynamique des politiques et des investissements. Les cartes sont complétées par des informations qui permettent aux investisseurs de faire preuve de diligence et, à terme, d’élaborer des transactions ayant un impact.

Huit secteurs prioritaires

Toujours d’après ce même rapport, huit secteurs prioritaires ont été identifiés à la suite d’un examen minutieux des documents de politique nationale et des rapports internationaux de développement, ainsi que d’entretiens avec les parties prenantes concernées, et ce, pour faire progresser les investissements en faveur des ODD en Tunisie. Le premier secteur est celui de l’infrastructure. « Bien que le taux d’accès aux infrastructures soit élevé, la qualité du parc d’infrastructures de la Tunisie s’est considérablement détériorée au cours de la dernière décennie, tandis que l’accès rural aux infrastructures reste très basique », rapporte le document du Pnud. « Les répercussions économiques de la pandémie génèrent également un besoin d’infrastructures avancées… et la Tunisie a commencé à établir un environnement fiable pour les partenariats public-privé (PPP) en révisant sa législation sur les PP et en créant des agences de PPP ou des divisions spécialisées au sein des institutions existantes pour les investissements dans les infrastructures. Les pouvoirs publics ont également mis en place des procédures pour accélérer l’exécution de projets publics à grande échelle, en particulier en ce qui concerne les infrastructures. L’investissement public tunisien est concentré dans les zones côtières à hauteur de 77%, ce qui crée des incitations supplémentaires pour l’investissement privé le long de la côte. Des améliorations des infrastructures publiques et sociales, en particulier dans les régions intérieures pauvres, sont également nécessaires pour combler le fossé historique. La Tunisie devra dépenser en moyenne 4,4 % de son PIB par an pour les infrastructures jusqu’en 2040 (ce qui représentera environ 75 milliards de dollars) pour combler le déficit d’investissement… La prédominance des entreprises publiques dans le secteur des infrastructures entraîne également une dépendance à l’égard de subventions élevées et de pertes financières notables. L’infrastructure et son administration sont souvent gérées par des entreprises non concurrentielles ».

Le second volet prioritaire est celui de l’agriculture. Selon le rapport, « la Tunisie dispose de ressources naturelles limitées en eau, en sols et en pêche, et est également très exposée au changement climatique, ce qui entrave la sécurité alimentaire. La dégradation des ressources en terres et en eau, la désertification et la perte de biodiversité, l’utilisation inappropriée de pesticides et d’engrais et le manque de modernisation empêchent l’augmentation de la valeur ajoutée. Le Plan de développement quinquennal (2016-2020) et le Plan national d’adaptation au changement climatique visaient à stimuler la contribution de l’agriculture à la croissance de la Tunisie en augmentant la capacité d’adaptation de l’activité agricole et en renforçant la sécurité alimentaire. Des programmes de relance sont également suggérés pour l’agriculture, puisqu’elle emploie 14,4 % de la main-d’œuvre et fournit jusqu’à 10,1 % du PIB. Les femmes et les jeunes ruraux constituent le segment le plus vulnérable des agriculteurs ».

Transport insuffisant et précaire

Autre secteur identifié, le transport qui, selon plusieurs études faites, est insuffisant et précaire. Le transport en Tunisie entrave le développement logistique et économique dans les régions intérieures. Une planification inadéquate de l’utilisation des terres en matière de transport décourage l’investissement privé. Le gouvernement a mis en œuvre des politiques et des règlementations pour faciliter la transition vers une infrastructure de transport modernisée, y compris la législation sur les PPP adoptée en 2015. Pour réduire les inégalités régionales, la Stratégie nationale de développement durable favorise une planification plus équilibrée de l’utilisation des terres qui donne la priorité à un transport efficace et durable… « En raison d’un manque d’infrastructures de transport, les communautés des zones reculées et rurales sont marginalisées et isolées, ce qui les empêche de participer à la vie économique du pays. La Tunisie bénéficie d’un emplacement stratégique à proximité des routes maritimes et aériennes les plus fréquentées au monde. Le gouvernement tente d’améliorer les flux commerciaux par des décisions stratégiques en matière de transport. L’exécution des projets de transport dépend en grande partie de la capacité du pays à continuer d’attirer des institutions financières multilatérales », assure le rapport «SDG Investor Map».

Fossé numérique

L’autre secteur à développer est celui des énergies renouvelables et alternatives. Les constats donnent que les besoins énergétiques domestiques de la Tunisie sont presque entièrement couverts par les combustibles fossiles. La Tunisie importe la majorité de son énergie et les énergies renouvelables ne représentent que 3 % de la production totale d’électricité. Le rapport du Pnud fait savoir que « la Tunisie se consacre à un programme massif de production d’énergie verte avec l’objectif d’augmenter la proportion d’énergie renouvelable à 30% d’ici 2030, et d’accroître l’efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables, avec un objectif « 30/30 » de réduire la consommation d’énergie primaire de 30% d’ici 2030. Les énergies renouvelables ont un potentiel important dans le pays, et l’objectif du gouvernement pour 2030 est réalisable si les efforts actuels se poursuivent… L’implication du secteur privé dans les énergies renouvelables a été limitée, en partie en raison du poids de la Société tunisienne d’électricité et de gaz (Steg), de la volonté politique limitée d’ouvrir l’industrie et d’un manque de financement ».

Côté technologies et communication, le fossé numérique affecte de manière disproportionnée les PME, les entreprises non exportatrices et les régions intérieures. « La lenteur de la numérisation de l’économie freine l’innovation et la croissance des entreprises. Bien qu’elle héberge l’une des infrastructures haut débit les plus développées de la région Mena, la Tunisie reste confrontée à des défis pour assurer un accès inclusif aux services Internet, en particulier dans les zones rurales. Selon les données de la Banque mondiale, le pays a un taux de pénétration d’Internet légèrement inférieur (66,7%) à celui de la région Mena (71,8%) en 2019 », annonce le rapport du Pnud. Ce même rapport fait savoir qu’un plan de développement 2016-2020 met particulièrement l’accent sur la réduction du fossé numérique en connectant chaque ménage et chaque entreprise à Internet. « La Tunisie met l’accent sur la promotion des PME innovantes dans le secteur des technologies de l’information et de la communication…La Tunisie est l’un des principaux pays du sud de la Méditerranée en termes de nombre de programmes de financement innovants et d’incitations disponibles pour la création de logiciels et de services numériques, ainsi que pour les entreprises qui souhaitent investir dans le numérique, la R&D et les TIC. L’accès à Internet par les populations rurales et intérieures peut poser des problèmes pour le développement du secteur de la technologie et des communications ».

Inclusion financière

Pour le secteur des services financiers, la crise sanitaire et les faiblesses sous-jacentes, à savoir les prêts non performants élevés, la forte exposition au risque de crédit pour les entreprises et les entreprises publiques touchées, ont démontré le besoin urgent de développement du secteur financier tunisien. « La Stratégie nationale pour l’inclusion financière du ministère des Finances vise à garantir que tous les opérateurs économiques, en particulier les jeunes, les femmes, les populations rurales et les PME, aient accès à une gamme diversifiée de produits financiers adaptés à leurs besoins et disponibles à des prix abordables ».

En Tunisie, le développement de la finance numérique reste un élément essentiel de la Stratégie. De nombreux segments de la population tunisienne, en particulier dans les régions rurales, sont économiquement exclus. En 2020, le secteur financier représentait 1,2 % de l’IDE global, en hausse par rapport à 2019. De plus, la finance numérique a pris de l’importance, en particulier avec la pandémie du Covid-19, lorsqu’elle est devenue le chef de file du secteur financier dans la prestation de services essentiels. « Les faiblesses structurelles du secteur financier comprennent des réglementations limitant les taux débiteurs, des exigences en matière de garanties et une faible pénétration numérique. En outre, les vulnérabilités du secteur bancaire ont augmenté parallèlement à la croissance des prêts non performants (PNP) et à l’exposition de l’industrie au secteur public », lit-on dans le même rapport. Pour conclure, le rapport précise que « sans informations concrètes permettant d’orienter les investissements et les activités productives pour avoir un impact positif sur le développement, la capacité du secteur privé à optimiser sa contribution et à mettre la Tunisie sur la voie d’un développement inclusif et durable est compromise ».

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