Tout le monde est dans l’attente de la publication du décret portant convocation des électeurs pour les municipales par le Président de République.
Quelques mois nous séparent de la fin du mandat des 350 conseils municipaux issus des élections organisées le 6 mai 2018. Suite au coup de force du 25 juillet, la donne a radicalement changé avec notamment la suppression du ministère des collectivités locales créé en 2016 et le transfert de ses attributions et ses structures au ministère de l’Intérieur en vertu du décret présidentiel n°2021-197 du 23 novembre 2021. A l’approche de la date butoir, c’est le flou total qui règne quant à l’organisation ou non des prochaines élections municipales, et même la conférence qui a été tenue ce mardi 21 février dans un hôtel à Tunis sous les auspices de la Fédération nationale des communes tunisiennes n’a pas été capable de nous éclairer sur cette question.
Tout reste tributaire du Président de la République
Présent lors de cette conférence, le porte-parole de l’Instance supérieure indépendante des élections (Isie), Mohamed Tlili Mansri, a clairement expliqué que le 25 février prochain marquera officiellement la fin des élections législatives . Après cette date, l’Instance entrera systématiquement en phase de préparation pour les prochaines élections municipales. Il a toutefois bien souligné que c’est au Président de la République de publier le décret portant convocation des électeurs pour les élections municipales.
Tlili Mansri a mis en exergue la réussite des élections municipales organisées en 2018 qui ont été marquées par la forte montée des listes des indépendants aux dépens des listes partisanes, et des femmes candidates ainsi que des personnes en situation de handicap. La dissolution de 38 conseils municipaux ne constitue nullement un facteur d’échec eu égard au nombre total de ces conseils estimé à 350, selon ses dires.
A ce propos, le porte-parole de l’Isie a fait savoir que l’Instance est fin prête sur le plan logistique pour l’organisation de ces élections. Il a néanmoins pointé le nombre élevé des rendez-vous électoraux depuis la révolution. Un facteur qui pourrait considérablement endiguer la participation des citoyens. Il a, à cet effet, déclaré que depuis 2011, le pays a connu 12 élections.
Tout en réaffirmant la totale indépendance de l’Isie, Mohamed Tlili Mansri a critiqué certaines parties, sans les nommer, qui tentent de porter ombrage à l’Isie et la discréditer. Il a également souligné que son instance travaille sous le contrôle du Tribunal administratif.
Questionnements autour des prochaines élections
Du côté de la Fédération nationale des communes tunisiennes (Fnct), les intervenants ne dissimulent pas leur inquiétude et leur mécontentement à l’égard de la situation générale dans le pays. «Depuis la suspension de la Constitution de 2014 qui consacrait le pouvoir local, le contexte politique s’est radicalement métamorphosé. Cette démarche a impacté de manière significative les processus du pouvoir local», selon l’argumentaire de la conférence qui a, toutefois, fait état de l’évolution particulière du domaine de la décentralisation en dépit de la dissolution de l’Assemblée du peuple. «Le cadre juridique régissant les collectivités locales n’a pas été amendé bien que les principes fondamentaux du pouvoir local soient écartés de la nouvelle Constitution de 2022. La mise en place des conseils régionaux et districts semble constituer une priorité dans le nouveau paysage politique».
La Fédération des communes s’interroge sur l’avenir électoral des conseils municipaux élus à l’approche de la fin de leur mandat (2018-2023) et sur le flou qui règne autour de la mise en place des conseils régionaux et des districts qui sont liés à la formation de la deuxième chambre du Parlement .
Le président de la fédération, Adnen Bouassida, a pour sa part soulevé diverses problématiques à l’approche de la fin du mandat des conseils municipaux. Va-t-on vers l’organisation d’élections municipales avant l’échéance du délai imparti (entre mai et juillet) ou vers leur annulation et leur remplacement par des conseils spéciaux? Il a, à cet effet, rappelé que l’expérience des conseils municipaux issue des élections de 2018 a été riche en réussites et a contribué à faire baisser le taux de corruption à un niveau très bas (selon Mourakiboun). Il a ainsi appelé à annoncer officiellement l’organisation des élections municipales dans les délais impartis.
Les élections municipales auront lieu dans les délais impartis!
Invité à prendre part à cette journée d’étude, le professeur de droit constitutionnel Abderrazzek Mokhtar a en quelque sorte pris de court les participants en annonçant que les prochaines élections municipales seraient tenues dans les délais prévus par la législation. Son argument, il le tient d’un communiqué publié par le ministère de l’Intérieur faisant référence à la rencontre entre le chef du service de coopération de la mission de l’Union européenne en Tunisie et le chef de cabinet dudit ministère, Taher Boussaada, le 20 février 2023 et qui a été consacrée à l’étude de l’état d’avancement des différents projets financés par l’Union européenne dans le domaine de l’appui à la décentralisation et au développement local et les moyens de développer cette coopération.
Selon la même source, le chef de cabinet Taher Boussaada a souligné que la voie de la décentralisation est ancrée en Tunisie et a été soutenue par la publication du Code des collectivités locales en 2018 dont la mise en conformité avec les exigences de la Constitution du 25 juillet est en cours, en coordination avec divers acteurs en vue de la préparation des prochaines élections pour renouveler les conseils municipaux élus à la date prévue.
Riche en débat, la conférence s’est interrogée sur le devenir des conseils municipaux avec l’achèvement de leur premier mandat mais les intervenants ont étrangement botté en touche sur les carences, la déroute et en particulier les tiraillements politiques au niveau de quelques conseils municipaux qui n’ont pas respecté les principes de bonne gouvernance au niveau local, dont la redevabilité, la transparence et la participation citoyenne et ont usé du principe de libre administration à mauvais escient.