La charité est bonne conseillère durant le mois saint, mais elle doit se faire sans que les nécessiteux en viennent à forcer la main des passants et promeneurs en quête d’un moment de détente. En attendant, les mendiants sont partout…
L’appauvrissement de la population tunisienne n’est plus une fiction, mais une triste réalité. Tout le monde doit se démener et se débrouiller pour subvenir à ses besoins.
Dans ce contexte de crise, le phénomène de la mendicité conjugué à Ramadan prend une ampleur considérable. Les mendiants n’hésitent plus à envahir les quartiers favorisés de la capitale devant un glacier, une banque, une boulangerie ou une pharmacie. Ils accostent et occupent toutes les places sans crier gare. Comme la mendicité n’est pas considérée comme un délit par la loi tunisienne, rien ne menace de résorber ce phénomène inlassable que subit de plein fouet le citoyen tunisien au quotidien.
Il prend de l’ampleur
Le Tunisien aime parfois ce qu’on appelle «elo9ma el berda» et ce qu’on appelle communément l’argent facile. Au détriment de valeurs comme le travail, le mérite et les efforts. La mendicité a même fait l’objet de sketchs comiques tant elle a de formes et de vicissitudes. Et il n’est pas dégradant d’en parler en détail, faute de statistiques fiables, mais au contraire cela permet de mieux appréhender ce phénomène inquiétant et qui est la marque de la misère dans le pays.
Il a pris de l’ampleur au fil des ans, aggravé par la révolution du 17 décembre 2010. Celle qui a porté un coup de massue aux finances de l’Etat et, par ricochet, aux moyens financiers très pauvres de sa population. Une révolution qui n’a pour l’heure rien apporté de bien, si ce n’est la misère tous azimuts et la délinquance.
Il y a même des mendiants «de luxe» sans scrupule et qui n’ont aucun problème médical et qui demandent des montants en billets effrontément. En cas de refus, ils dénigrent «l’âme non charitable».
Le besoin pressant d’avoir de l’argent a rendu certaines personnes malades et agressives. Même les plus jeunes n’hésitent pas à demander à leurs aînés adultes, un montant pour un sandwich ou un repas. Faut-il en arriver à remédier aux obligations de son tuteur ?
Un exercice de foi ?
Les personnes qui se déplacent avec des ordonnances médicales sont légion. Récemment, à l’avenue de la Liberté, un mendiant tenant une liasse de billets prétexte qu’il lui manque 20 à 30 D pour des analyses. Gare à vous, s’il ne reçoit pas son argent, il fera une tête de désespéré. Mais un citoyen doit-il supporter toute la misère des autres et la compenser, au risque de finir seul ? Un exercice de foi pénible et dont les mendiants connaissent la fragilité psychologique et mentale des Tunisiens à cet égard. Alors ça leur profite.
Depuis quelques années
Il y en a une autre qui sort avec un gros sac rempli d’emplettes chaque soir que même le Tunisien moyen qui se rend chaque jour au travail ne peut pas se permettre. Son modus operandi est simple : elle se pose devant la sortie d’un supermarché et demande à ce qu’on lui donne des provisions, et ce, tout au long de l’année. A quelques mètres d’un poste de police du côté d’Ennasr… Qui n’a pas force de loi pour sévir manifestement contre la mendicité sous toutes ses formes.
A El Menzah 5, durant Ramadan, devant un glacier, après la rupture du jeûne, un autre acabit réclame de l’argent pour se soigner. Un moment agréable gâché par leur seule présence de matin comme de nuit. Les lieux qu’ils occupent sont connus de tous : mosquée, banque, supermarché et boulangerie principalement pour faire culpabiliser chaque Tunisien de l’air qu’il respire en dehors du domicile. Quoiqu’ils viennent même sonner à votre porte dans certains quartiers avec des villas et duplex pour vous forcer la main. Une activité florissante et qui a de beaux jours devant elle.
Pourtant même le Coran est clair et sans équivoque à ce sujet, il faut donner d’abord aux plus proches et aider les membres de la famille dans le besoin. Il y a un récit plein d’anecdotes cocasses qui montrent combien ce phénomène gâche la vie des Tunisiens déjà empêtrés dans d’innombrables dettes et un bourbier financier lourd à gérer.