La Tunisie traverse un épisode de stress hydrique aigu en raison de la raréfaction des précipitations, à laquelle s’ajoute une baisse accrue des stocks stratégiques de tous les barrages à des niveaux sans précédent, enregistrant un déficit inquiétant, ce qui a poussé les autorités à déclarer l’état d’urgence hydrique. Devant une situation de plus en plus critique, le modèle de gestion de l’eau est à revoir.
Pour faire face au stress hydrique, l’exécutif en collaboration avec les ministères de l’Agriculture et de l’Environnement, ont formulé récemment, lors d’un conseil ministériel, un ensemble de recommandations, de propositions et de mesures d’urgence et d’autres à caractère stratégique à long terme, dans l’objectif de limiter le stress hydrique, à moyen et long terme.
Il s’agit tout d’abord de considérer la sécheresse comme étant une donnée structurelle plutôt que circonstancielle et d’adopter des politiques prenant en compte les recommandations des experts spécialisés dans les domaines agricole, écologique, de sécurité alimentaire…
La diversification des modes de production d’eau est primordiale aussi pour assurer la sécurité hydrique. Il s’agit de multiplier les solutions en mobilisant le plus de ressources en eau, en l’occurrence le dessalement de l’eau de mer et l’usage des eaux usées épurées en les utilisant d’une manière efficiente. La Tunisie doit tirer profit des eaux recyclées. C’est une alternative appropriée pour faire face au stress hydrique. Outre l’irrigation des grandes cultures notamment les fourrages, les céréales et les légumes secs, cette solution de l’eau traitée peut être également utilisée à bon escient au profit du secteur industriel.
Au terme du conseil des ministres, il a été convenu d’entamer la révision des législations inhérentes à l’exploitation des eaux usées traitées et ses conditions, de consolider l’économie circulaire, d’ouvrir la voie à d’autres usages, de mettre en place un programme annuel visant à développer l’exploitation des eaux usées traitées, en renforçant la coordination entre l’ensemble des intervenants—impliquant le ministère de l’Enseignement supérieur de la Recherche scientifique)—pour fournir des eaux traitées saines.
Faut-il aussi penser à d’autres solutions stratégiques pour faire face au stress hydrique, en soutenant et développant des filières agricoles capables de s’adapter aux années sèches, ainsi que des filières économiques moins appauvrissantes en ressources en eau. D’où l’importance de chercher des alternatives à certaines cultures très consommatrices d’eau, de revoir le modèle agricole orienté vers l’export, et de dresser une liste des produits agricoles épuisants en eau afin de rationner leur production…
Il est primordial également de revoir la gouvernance du secteur de l’eau et d’adopter une vision institutionnelle afin de mettre en place un système institutionnel unifié, basé sur une approche participative, qui valorise l’implication de la population, de la société civile, des experts et des institutions de gouvernance dans les efforts de conservation des ressources en eau.
Il faudra, par ailleurs, opérationnaliser la responsabilité sociale des entreprises pour protéger les ressources en eau et soutenir l’implication des institutions privées dans la protection du droit à l’eau et construire une base de données actualisée sur les ressources en eau.
Des solutions alternatives s’imposent donc, dont la réutilisation des eaux usées traitées, notamment lorsqu’il s’agit de satisfaire des usages qui ne nécessitent pas d’eau potable. Cette ressource nécessite d’être valorisée, au moment où le secteur, notamment celui de l’agriculture, connaît un déficit en eau quasi permanent. La pratique est d’ailleurs en plein essor partout dans le monde. Le recyclage des eaux usées traitées est un créneau important et un défi à relever. Sachant que des milliers de mètres cubes d’eaux usées partent dans l’environnement sans être utilisés.
Il convient de rappeler que le traitement des eaux usées vise à dépolluer l’eau avant sa réutilisation pour l’irrigation des jardins et des champs agricoles ou pour la reconstitution des nappes phréatiques. Ce processus contribue de manière significative à la préservation des ressources naturelles en eau, à la réduction de leur rareté et du risque de la sécheresse, ainsi qu’à l’atténuation des pressions sur les eaux souterraines et autres ressources d’eau naturelles.