La fraude aux examens porte atteinte à la valeur des diplômes nationaux, ainsi qu’à la réputation et au classement des universités tunisiennes, sans oublier l’éventuelle et probable facilité de soudoyer ces étudiants-tricheurs une fois embauchés que ce soit dans le public ou dans le privé.
L’affaire aurait pu être classée dans les faits divers. C’est le contraire qui s’est produit. Celle-ci a bien défrayé la chronique, malgré l’été et le week-end, et pour cause. Il s’agit du concours d’accès à l’Institut supérieur de la magistrature. Rien de moins ! Un candidat a été surpris en flagrant délit de fraude, à l’épreuve de droit privé.
Les premières sanctions n’ont pas tardé à tomber, puisque ledit candidat a été immédiatement mis aux arrêts, le vendeur du matériel ainsi que le souffleur, la personne qui dictait les réponses, et ce, après autorisation du parquet du Tribunal de première instance de La Manouba.
Tout de même, le candidat-fraudeur, en cas de succès, aurait eu la lourde charge de proclamer des sentences et dire le droit ! Ce n’est plus le cas, heureusement, dirions-nous. Cette fois-ci le cas sort de l’ordinaire et constitue un dangereux précédent dans la mesure où l’auteur du délit n’est pas une personne « ordinaire » mais est censée être appelée à appliquer les lois et à faire régner la justice dans la cité !
Il faut dire que le phénomène de fraude aux examens ne date pas d’aujourd’hui. Mais il se trouve que depuis quelques années, il n’a cessé de prendre de l’ampleur, pour preuve les méthodes sophistiquées employées, notamment au baccalauréat. L’évolution effrénée des nouvelles technologies de l’information est passée par là.
Les cas ont baissé de moitié
Après une ferme prise en main, force est de reconnaître que le nombre de cas de triche a sensiblement diminué aux dernières sessions, grâce au renforcement du contrôle et à la sévérité des ripostes mises en place à l’encontre des auteurs de ces délits qualifiés, à juste titre, de crimes. D’ailleurs, le ministre de l’Education est monté au créneau, juste avant les épreuves du baccalauréat pour préciser que tous les efforts sont déployés pour faire face à ce fléau, avertissant que l’Etat ne sera pas clément avec tous ceux qui tentent de tricher.
Il est utile de rappeler qu’à l’année 2022, le total des cas de fraude s’est élevé à 1179 cas enregistrés dans les 578 centres d’examen à travers la République aboutissant à traduire 25 personnes devant les tribunaux. Cette année, Mohamed Ali Boughdiri, ministre de l’Education, a indiqué que les tentatives de fraude sont de l’ordre de 300 cas, soit moins d’un seul cas de fraude par centre d’épreuves écrites qui sont au nombre de 540 à travers tous le pays”. Il ajoute, “les opérations de triche ont baissé de moitié par rapport à l’année dernière, en raison du contrôle, du suivi et des mesures prises avec fermeté pour assurer le bon déroulement de ces épreuves” s’est-il félicité.
Porter atteinte à la valeur des diplômes nationaux
L’Observatoire tunisien de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, de son côté, s’est manifesté, mettant en garde contre la propagation à large échelle de ce phénomène qui se répercute, négativement, sur la valeur des diplômes.
L’observatoire a appelé, en effet, les différentes parties intervenantes à faire face à ce fléau et à prévenir ses impacts à court et à long terme sur le système éducatif en général.
D’autant qu’il peut porter atteinte à la valeur des diplômes nationaux, ainsi qu’à la réputation et au classement des universités tunisiennes, sans oublier l’éventuelle facilité de soudoyer ces étudiants-tricheurs une fois embauchés que ce soit dans le public ou dans le privé.
En tout état de cause, ces faits sont plus que jamais d’actualité et liés de manière intrinsèque, notamment, à la bataille lancée, au plus haut niveau, en faveur de l’assainissement de l’administration dans le sens où il est plus qu’urgent d’entamer de véritables réformes.
C’est donc dans ce cadre, entre autres, que l’un des chantiers dont est chargé, officiellement, le nouveau Chef du gouvernement, Ahmed Hachani, est d’élaborer «un projet de décret pour assainir l’administration de ceux qui s’y sont faufilés, indûment, depuis plus d’une décennie et se sont transformés en obstacles entravant le bon fonctionnement des rouages de l’Etat». Il n’en demeure pas vrai que certaines voix s’élèvent pour mettre en garde contre les éventuels dérapages pouvant transformer lesdites réformes en une supposée « chasse aux sorcières » qui serait contreproductive. Autrement dit, il faudra mettre en place des garde-fous pour espérer mener ces réformes et d’autres urgentes, à bon port.
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