Home Economie 37e édition des journées de l’entreprise | Réflexions profondes sur l’informalité et ses conséquences économiques

37e édition des journées de l’entreprise | Réflexions profondes sur l’informalité et ses conséquences économiques

La 37e  édition promet d’être un forum de réflexion dynamique, propice à la formulation de recommandations concrètes et de mesures stratégiques pour faire face à l’informalité et ses ramifications sur les inégalités économiques.

Le président de l’Institut arabe des chefs d’entreprises (Iace), Taieb Bayahi, a officiellement inauguré hier la 37e édition des Journées de l’entreprise à Sousse. Le thème central de cette édition, «L’Entreprise et l’Informalité : Inégalités et Solutions en Suspens», a été choisi pour son importance cruciale dans le contexte économique actuel. Tenu sous le haut patronage de la présidence de la République, cet événement majeur a marqué le début de discussions stimulantes et de débats approfondis sur la question complexe de l’informalité dans le monde des affaires. La présence de la ministre du Commerce et du Développement des exportations, Kalthoum Ben Rejeb, témoigne de l’importance que les acteurs clés accordent à cette problématique.

Cette 37e édition des Journées de l’entreprise, qui rassemble des leaders d’opinion, des experts et des professionnels du monde des affaires pour partager leurs perspectives, expériences et solutions innovantes, offre à cet égard une plateforme privilégiée pour aborder les inégalités persistantes et les solutions en suspens liées à l’informalité.

Un tiers du PIB et une lutte complexe

Bayahi a exposé avec clarté le choix du thème, «L’Entreprise et l’Informalité : Inégalités et Solutions en Suspens», justifié par l’importance cruciale qu’il revêt depuis plusieurs décennies. Il a souligné que, contrairement aux éditions précédentes où le sujet était souvent abordé de manière périphérique, cette année, il occupe le centre de toutes les discussions.

Le président de l’Iace a mis en lumière l’impact substantiel de l’informalité sur l’économie, affirmant qu’elle représente plus d’un tiers du Produit intérieur brut (PIB), faisant ainsi jeu égal avec les deux tiers supposés restants des secteurs privés organisés et du secteur public. La situation politique, économique et sociale actuelle, exacerbée par des bouleversements géopolitiques inédits à l’échelle mondiale, a été décrite par Bayahi comme une toile de fond qui accentue la pertinence de cette problématique.

Par-dessus tout, Taieb Bayahi a souligné que les thèmes majeurs de l’informalité et des inégalités ont transcendé les frontières nationales, ayant un impact significatif sur la vie de centaines de millions de personnes dans le monde entier. Il a inséré ces défis dans le contexte complexe que doit affronter aussi bien le secteur privé que l’Etat, en raison des changements politiques et géopolitiques majeurs survenus au cours des trois dernières années.

Bayahi a aussi évoqué des événements marquants tels que la crise sanitaire mondiale du Covid-19, la guerre entre la Russie et l’Ukraine, ainsi que le regain du conflit au Moyen-Orient en Palestine occupée. Ces crises, a-t-il souligné, ont des conséquences profondes sur l’ordre économique international et ont remis en question certaines des convictions les plus ancrées de la société.

En outre, il a rappelé les alertes lancées lors de la précédente édition des Journées de l’entreprise, mettant en avant l’importance cruciale de prendre en compte les menaces sérieuses pesant sur la sécurité économique et la souveraineté nationale. Ces menaces sont exacerbées par des enjeux environnementaux tels que le changement climatique et la rareté des ressources naturelles.

«C’est pour toutes ces raisons que nous devons être intransigeants et implacables dans notre lutte contre l’informalité, source de corruption. Ceci nécessite un renforcement de notre Etat de droit, favoriser la transparence, à tous les niveaux de l’Etat, et des entreprises, simplifier les procédures et règlementations, réduire les autorisations, qui sont les principales sources de favoritismes et de corruption… Pour ne citer que ceux-là, nous prenons pleinement conscience aujourd’hui de l’incapacité des systèmes actuels de gouvernance à appréhender ce phénomène avec ce que l’on sait de sa propagation à tous les niveaux de notre société et sous diverses formes», a-t-il expliqué.

Bayahi a plongé ensuite dans le cœur du sujet, en abordant de manière approfondie le défi crucial de l’informalité. Il a exposé le fait que cette réalité représente non seulement un tiers du PIB, mais elle emploie également près de la moitié de la population, constituant ainsi la principale source de revenu pour de nombreux Tunisiens. L’informalité, selon lui, est une économie à faible productivité et revenus et elle est le reflet de diverses formes d’inégalités économiques, sociales et régionales.

Il a souligné les multiples facettes de l’informalité, y compris son association avec l’évasion fiscale, la concurrence déloyale, le non-respect des droits des travailleurs, ainsi que la corruption. Ce mélange complexe de défis constitue une préoccupation majeure pour la Tunisie et pour tous les pays concernés, selon Bayahi.

Malgré l’énoncé clair des objectifs, Bayahi a reconnu les défis complexes liés à la lutte contre l’informalité. Il a souligné que cette lutte exige une volonté politique forte, une adhésion populaire totale, une application juste de l’Etat de droit et des réformes économiques, sociales et réglementaires. Il a insisté sur la nécessité de mettre en place des mesures pour protéger les plus vulnérables, soulignant que cela est non seulement crucial pour le succès du projet, mais aussi pour l’application des valeurs humaines fondamentales.

Simplification administrative et numérisation

Prenant ensuite la parole, la ministre du Commerce et du Développement des exportations, Kalthoum Ben Rejeb, a délivré un discours empreint de préoccupations et d’engagements envers le développement économique de la Tunisie. Dans une perspective orientée vers les domaines économiques, elle a souligné leur contribution essentielle à la formulation des politiques économiques et sociales. Elle a mis en lumière la nécessité d’éclairer les orientations politiques en fournissant des options concrètes pour entreprendre les réformes indispensables en vue d’un développement durable et intégré du pays.

Dans ce même cadre, Ben Rejeb a adressé un message rassurant à tous les hommes d’affaires et opérateurs économiques respectueux de la loi, représentant la grande majorité. Elle a affirmé l’engagement continu de l’Etat tunisien à les soutenir de toutes les manières possibles, créant ainsi un environnement d’affaires positif. L’objectif est de stimuler leur contribution à la création de richesse et au développement national. En ce qui concerne la progression du gouvernement dans la mise en œuvre de mesures visant à créer des conditions propices à l’investissement privé et à instaurer la confiance chez les entrepreneurs, tant nationaux qu’étrangers, la ministre a assuré que la stabilité du pays, conjuguée à des lois, des incitations et des programmes adaptés, offre un terrain favorable à l’initiative privée. «A ce niveau-là, il est indispensable de souligner les efforts de notre département pour protéger le tissu économique national. Cela inclut la mise en place de mécanismes de défense commerciale, ainsi que la révision et le développement des accords commerciaux bilatéraux. Ces actions sont entreprises dans le but de prévenir des déséquilibres commerciaux et de sauvegarder l’industrie locale, assurant ainsi la pérennité des entreprises tunisiennes et renforçant leur compétitivité», a-t-elle expliqué, tout en soulignant la préoccupation partagée par les acteurs publics et privés du pays à propos de ce dilemme aux répercussions sur les équilibres financiers, économiques…

Sur un autre plan, Kalthoum Ben Rejeb a noté l’évolution des discussions autour du caractère informel des activités économiques, passant des concepts traditionnels tels que le commerce parallèle et l’occupation anarchique à des termes plus contemporains comme l’économie non réglementée. Elle a souligné la nécessité d’unifier les efforts pour analyser en profondeur les causes de ces phénomènes et trouver des moyens de les contrer ou de les canaliser légalement.

Au cœur de ces discussions, la ministre a mis en avant l’importance de simplifier les procédures administratives, reconnaissant la bureaucratie et les complications administratives comme des raisons majeures qui poussent les individus à s’engager dans le secteur informel. «Le gouvernement, conscient de cette problématique, s’emploie activement à réduire la charge administrative imposée aux entreprises et aux individus, avec des mesures telles que la numérisation des procédures administratives», a-t-elle affirmé.

Appel à l’unité pour un avenir prospère

La ministre a également souligné l’importance des marchés et des canaux de distribution dans la lutte contre le commerce non réglementé. Elle a évoqué des projets visant à développer des marchés structurés et des modèles pour améliorer la qualité des produits, soutenir les agriculteurs et stimuler l’activité économique. Dans le domaine du commerce extérieur, Ben Rejeb a mis en avant la numérisation en cours de toutes les procédures d’exportation et d’importation. Elle a souligné l’importance de cette initiative massive pour accélérer les transactions, réduire les coûts et minimiser la bureaucratie. Une plateforme en ligne a été créée pour fournir des informations sur les procédures et conditions liées aux opérations d’exportation et d’importation.

«Il est important et indispensable de mener des réformes à long terme, notamment dans le domaine de l’éducation, pour élever le niveau intellectuel de la population et réduire le risque d’implication dans le secteur informel», a-t-elle indiqué, tout en appelant à la collaboration de tous les secteurs de la société pour surmonter les difficultés et œuvrer ensemble à l’établissement d’un avenir prospère pour la Tunisie.

crédit photo : © Riadh SAHLI

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