Faire du bon pain n’est pas courant. Un grand nombre de nos boulangers sont loin de se soucier de leur image. Ils savent que le consommateur n’a pas le choix.
La belle époque où ces artisans s’ingéniaient à donner le meilleur d’eux-mêmes est révolue. La conjoncture actuelle ne les oblige plus à chercher à attirer les clients. Ces derniers se contentent seulement de se procurer leur pain quotidien sans demander leur reste. Et encore faut-il qu’ils le trouvent!
On nous mène à la baguette !
L’habitude de faire la queue devant les boulangeries est bien ancrée, en plus d’être gênante et incommodante. Alors que le fait d’acheter un pain devrait être une simple formalité, il est devenu un casse-tête. Il ne suffit plus de le trouver, mais il faut, également, le payer aussi cher, soit au-dessus de sa vraie valeur. Son poids nourrit des doutes, sans parler de sa qualité ou des conditions d’hygiène dans lesquelles il a été confectionné.
D’ailleurs, on ne cesse de se demander, en tant que consommateurs, pourquoi la majorité des boulangers continuent à nous imposer une seule catégorie de pain : à savoir la baguette. Qu’est-ce qui les a poussés à ne livrer que cette catégorie ? Leur spécialisation en boulangeries produisant la baguette ou le gros pain explique, en partie, ce phénomène.
Mais il y a, aussi, d’autres intérêts en jeu. Avec la baguette on s’adresse à une catégorie sociale précise. Le prix de 200 millimes, au lieu de 190, ne pose plus problème. Il est accepté par tous. Il libère l’Etat de certaines de ses obligations envers ces artisans. Une autre mesure est venue s’ajouter à ces avantages déguisés accordés à la profession et qui consiste en l’interdiction des sachets en plastique. Les acheteurs sont alors obligés d’amener avec eux cet objet ou de l’acheter chez ce même boulanger à qui l’on avait interdit de le remettre gratuitement aux clients ! Une nouvelle source non négligeable de revenus pour ces artisans.
Qu’à cela ne tienne ! On ne va pas leur en tenir grief, puisqu’ils ne sont pas à l’origine de cette mesure administrative.
Toutefois, il est temps d’annuler cette spécialisation dans la profession. Le Chef de l’Etat, lui-même, l’a exigé, il y a quelque temps. Pourquoi ne pas concrétiser cette option au plus vite ? Qu’il n’y ait plus des boulangeries spécialisées dans la baguette, d’autres dans le gros pain ou d’autres, encore, dans les deux.
Dans de nombreux gouvernorats, le pain de 400 gr est disponible à côté de la baguette. Ce gros pain soulagerait la bourse des familles puisqu’il coûte 230 millimes, tandis que la baguette qui pèse la moitié ou presque coûte 200 millimes (le prix en usage).
Besoin d’encadrement
Et pour éviter, autant que faire se peut, le gaspillage, on demanderait à la chambre syndicale des artisans boulangers de sensibiliser ses affiliés à faire preuve de savoir-faire et de professionnalisme. En effet, c’est en améliorant la qualité des produits que le consommateur ne jettera plus son pain. N’y a-t-il pas moyen de fournir à tous ces professionnels des recettes modèles bien étudiées qui permettront à tout le monde de fabriquer, enfin, un pain “mangeable” et non “jetable” ?
A chaque artisan, ensuite, d’ajouter sa propre touche et… son grain de sel.
Des cycles de formation continue et d’assistance sont, également, nécessaires. C’est une façon comme une autre de maintenir ces professionnels à jour. Car, une des raisons du gaspillage du pain se trouve dans sa mauvaise préparation. Rares sont, en effet, les bons mitrons qui sont capables de gratifier leurs clients d’un produit de qualité.
Par contre, on n’est pas trop surpris de constater qu’il y a de grandes différences entre le pain destiné au grand public et celui qui sera vendu plus cher. Et auquel on accorde tous les soins. Qu’on revienne un peu aux temps où nos boulangers mettaient toute leur énergie pour fournir une multitude de pains sous différentes formes et avec toutes sortes de saveurs.