Réveiller la belle au bois dormant

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Editorial La Presse

 

La ville de Tunis compte environ 1.000 biens menaçant ruine, dont environ 100 doivent être immédiatement évacués. Ses parcs, ses espaces verts, son zoo, sa piscine de la Place Pasteur ne sont plus des lieux de loisirs et de sport. Tunis souffre d’un manque d’éclairage public et croule sous les ordures. Son parc de transport public est tel un canard boiteux. La ville qui attirait et séduisait naguère n’est aujourd’hui qu’une belle au bois dormant. Les responsables municipaux ont montré, pendant plus de dix ans, une indifférence inexplicable aux conséquences ravageuses d’une négligence à large échelle à Tunis. Tout au plus, quelques experts lui ont-ils accordé une attention distraite lors de certaines contestations sociales «visibles» à l’instar de celles occasionnées par l’accumulation des déchets ménagers ou quand les meutes de chiens errants attaquent les citoyens. Faute de moyens mais aussi de volonté, la ville a été délaissée par les services municipaux. La visite inopinée du Chef de l’Etat vendredi à quelques entrepôts et directions relevant de la municipalité de Tunis a montré à quel point la situation est alarmante. Mais aussi inacceptable. Après cette visite, deux hauts responsables à la municipalité de Tunis ont été limogés. Une très lourde responsabilité attend ceux qui seront nommés à leur place. Ils n’ont pas le droit de décevoir les citoyens. Cette responsabilité n’incombe pas uniquement aux directeurs. C’est une responsabilité collective, une responsabilité de tous les acteurs, de tous les décideurs, de nous tous. Il nous incombe à tous de combattre l’obsession du profit, la cupidité illimitée des oligarchies prédatrices du capital financier globalisé qui l’emportent sur tout autre considération.

Ce n’est pas la première visite que le Président de la République effectue dans ce genre d’agglomérations populaires pour s’enquérir des conditions de vie difficiles des habitants. Mais il est clair que cette fois le verre est plein.

On verra demain les chantiers démarrer pour bitumer les routes, les poteaux illuminer de nouveau la ville, les espaces verts embellir… Ce qui est une bonne chose en soi. Mais faut-il chaque fois attendre l’intervention du Chef de l’Etat pour faire bouger les lignes et offrir aux citoyens leur droit à des conditions de vie décentes ?

Telle une pluie d’or, la ville, enfin libérée, déversera ses bienfaits sur la société. Tel est le credo de la nouvelle étape à même de réveiller la belle au bois dormant.

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