A raison d’un million d’habitants supplémentaires chaque décennie depuis l’indépendance en 1956, la population tunisienne n’en a pas moins connu une stabilisation de sa population au cours de la dernière décennie, avant qu’elle ne reparte probablement vers la hausse à l’avenir.
Dr Rym Fayela, cheffe du bureau de l’Unfpa-Tunisie, Fonds des Nations unies pour la population, a voulu célébrer la Journée mondiale de la population du 11 juillet 2024 en convergeant les études et travaux des principales institutions tunisiennes à ce sujet.
Ceci sous une problématique qui relève l’importance de données inclusives en matière de démographie et de population, principalement vers le bien-être social et la prospérité. Dans ce cadre, le ministère de l’Economie et de la Planification et l’Unfpa, ainsi que des représentants de différents ministères et de la société civile ont organisé une table ronde sur les moyens d’améliorer le traitement des données en matière de démographie et de population.
En synergie avec les ODD
Sous la thématique «Le pouvoir des données inclusives pour un avenir résilient et équitable de la population en Tunisie», des experts en matière de démographie et d’autres responsables ont joint leurs réflexions et études pour tirer de nouvelles conclusions, à même de permettre de nouvelles avancées structurelles pour le pays. Quelle production d’indicateurs qui réponde aux besoins de la Tunisie ? Et dans une large mesure, comment élaborer et conceptualiser les données pour être en synergie avec les Objectifs du développement durable (ODD), par exemple ?
Toutefois, beaucoup de questionnements demeurent en suspens pour baliser la voie d’une meilleure approche en matière de collecte des données sur la population. Comment garantir la représentativité de tous les groupes de population ? Comment exploiter les nouvelles technologies comme accélérateur pour améliorer la collecte de données inclusives ? Comment en profiter pour élaborer des politiques publiques plus efficaces et équitables ? L’objectif est d’élaborer des données plus affinées et moins désagrégées. Plus qu’une simple collecte quantitative, l’affinement de données plus détaillées et qualitatives devient nécessaire pour converger vers le bien-être et la prospérité des populations sur leur territoire. Il faut opter pour une approche globale et intégrée grâce à un meilleur pilotage des données.
Pilotage des données
Le pilotage des données pour améliorer la coordination et les obstacles déjà rencontrés par le passé doivent être franchis de concert, afin de peaufiner le travail de base et l’approche intégrée et participative. Comment rendre accessible à tous des données fiables et importantes, malgré le manque de culture du partage des outputs en Tunisie et impliquer les médias dans la diffusion d’une information claire et précise ? Un ensemble de défis qui en intègrent d’autres dans leurs travaux par les différents panélistes.
Mme Fayela n’a pas manqué de résumer les premières conclusions avec notamment des recommandations émanant des différents intervenants, à savoir les ministères et institutions clés sous tutelle dont les ministères de l’Économie et de la Planification, de la Santé, des Affaires sociales, de la Jeunesse et des Sports, de la Famille, l’Onfp, l’INS, l’Observatoire national de la jeunesse, etc. Et d’affirmer, «c’est une table ronde qui a été organisée en marge de la Journée mondiale de la population célébrée le 11 juillet 2024. L’objectif de la thématique est de donner concrètement du pouvoir aux données pour identifier les populations les plus vulnérables, de manière à ce qu’on les intègre dans les programmes, les stratégies et les politiques nationales. L’idée est de faire l’état des lieux démographique en Tunisie lié à la population, à son vieillissement, à sa structure (mariage, divorce, migration, mortalité). C’est l’idée de la première intervention focalisée sur les défis de la Tunisie en termes de démographie. Ainsi on a vu qu’on va vers le vieillissement de la population, d’où l’intérêt d’avoir des données sur cette tranche de la population, par exemple».
Stagnation de la population
Et Dr Fayela de poursuivre son raisonnement logique : «Globalement, on a remarqué une diminution de la fécondité en Tunisie, un relâchement au niveau de l’utilisation de la contraception, on a vu que la nuptialité n’est plus universelle». Mme Rym Fayela réfute l’idée d’un déclin démographique avec ces indicateurs, mais parle davantage de phase de stabilisation démographique, car on n’est pas en train «de reculer», mais l’Indice synthétique de fécondité actuel ne nous permet pas de nous renouveler, croit-on savoir. «Il y a une stagnation de la population puisqu’on est à 12 millions d’habitants, alors que dans 10 ans on serait à 13 millions». L’exposé de M. Hafedh Chekir, expert en démographie et représentant de l’INS, a permis de tirer de nombreux enseignements, notamment sur le plan qualitatif. Avec un projet de mariage qui passe au second plan en Tunisie que ce soit pour les filles et les garçons désireux d’abord de construire leur avenir. Le recul de l’âge du mariage, la baisse du taux de nuptialité et de fécondité conduisent tous à un accroissement naturel moins significatif.
Après cette présentation, un recensement de l’Institut national de la statistique, actualisé pour l’année 2024, va constituer une très importante base de données, sur lequel on peut bâtir les projections démographiques prochaines consultables sur une plateforme en ligne. L’objectif de l’INS est de constituer un registre administratif pour ne pas devoir mobiliser des enquêteurs sur place pour faire le recensement. A partir de ce registre comme celui de l’état civil, on peut avoir une idée globale de la population tunisienne, ses composantes en genres, ses catégories sociales et statutaires. D’autres analyses incluent la jeunesse, par exemple les femmes. Les flux de données, études et systèmes arabes et africains sont accrédités et approuvés et ont pris de nombreuses mesures considérables en matière d’amélioration, de collecte et de développement des données démographiques, mais il faut aussi reconnaître l’existence de défis concernant la qualité et la protection des données, leur utilisation des technologies modernes, la mesure dans laquelle elles prennent en compte les spécificités de tous les groupes et les problèmes sociétaux, la mesure dans laquelle elles sont accessibles aux utilisateurs et leur investissement dans le processus de prise de décision.
Malgré les progrès réalisés dans de nombreux indicateurs de santé en Tunisie, tels que les décès des mères, des enfants, l’assurance-vie, ainsi que les indicateurs de mortalité, les services de santé. En fonction du genre, en particulier parmi les groupes les plus vulnérables, tels que leurs proches, les femmes handicapées, les jeunes, quel que soient leurs âges, le Fonds des Nations unies pour la population a soutenu le projet.
22,6% sont des sexagénaires
Par ailleurs, la Tunisie a été et continue d’être pionnière dans ce domaine aux niveaux local, régional et même mondial. Depuis son indépendance, elle s’est attachée à développer une politique intégrée fondée sur une base législative et institutionnelle, y compris le statut personnel.
Un Code de statut personnel (CSP) a été élaboré, en vertu duquel la polygamie a été interdite et les mariages mineurs ont été déterminés. Un programme national a également été adopté, parallèlement au développement d’une politique de santé basée sur le principe de la santé pour tous, qui permet de contrôler les taux de croissance démographique et contribue à augmenter l’espérance de vie à la naissance.
C’est le parcours de la Tunisie en matière d’éducation qui a représenté la pierre angulaire de l’édification de l’Etat moderne, puisque les grandes orientations de la réforme éducative de 1958 ont approuvé l’enseignement gratuit et obligatoire pour tous, ce qui a contribué à la généralisation de l’éducation. L’éducation dans diverses régions du pays, notamment les zones rurales, et la création du premier noyau de compétence nationale.
Le pourcentage des Tunisiens dans la tranche d’âge de 60 ans et plus s’élève actuellement à 22,6% au cours de l’année 2024, ainsi que les disparités démographiques entre les régions sont le résultat de disparités dans le développement régional. Au cours d’une année charnière, l’INS entreprendra le recensement général de la population des régions et qui fournira une base de données importante et contribuera à l’intensification de nos politiques de population et de développement en réponse aux aspirations des Tunisiens outre les rapports nationaux périodiques les plus rapides et la mise en application internationale de la Tunisie.
Dresser un tel état des lieux démographique en Tunisie et identifier les enjeux liés à la collecte de données inclusives, compréhensives et de qualité sur la population, examiner les défis et opportunités pour l’accès, la collecte et l’utilisation de données inclusives pour un développement équitable et résilient, il s’agit là de comprendre les transformations sociales et culturelles en Tunisie.