Cours particuliers : Est-ce une école parallèle qui s’impose !?

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A défaut d’un système éducatif efficace et performant, le phénomène des cours particuliers prend de plus en plus d’ampleur dans notre société. Il devient, malheureusement, un passage obligé pour la majorité des élèves quels que soient leurs niveaux, le type d’enseignement public ou privé. Ainsi, ces cours dits de soutien ne se limitent plus à ceux en difficultés d’apprentissage, ils touchent à tous : écoliers, collégiens et lycéens. Toutefois, ce recours excessif à ces cours est-il un choix ou une obligation ?!

Aujourd’hui, la majorité des élèves sont dans l’incapacité d’absorber le contenu de certaines matières considérées comme matières de base telles que l’arabe, le français, les mathématiques, les sciences et d’autres. En l’absence d’un accompagnement parental quotidien aux enfants en matière d’apprentissage, à cause du travail ou faute de temps suffisant, on s’oriente vers les cours particuliers.

Ce choix, devenu une nécessité, n’est pas sans  charges financières supplémentaires. Il faut dire que, depuis quelques années, les élèves commencent à prendre des cours de soutien dès la première année d’enseignement de base. Certains parents imputent la faute à l’école, pointant du doigt la qualité du système éducatif. Pour eux, l’école ne joue plus convenablement le rôle qui lui incombe. Parallèlement, les enseignants parlent de parents démissionnaires qui n’assurent pas le travail de contrôle et de révision. Pour eux, ces derniers ne se manifestent que lorsqu’ils reçoivent le carnet des notes ou le bulletin.

Des charges de trop !

Les prix des cours particuliers ont atteint des seuils excessifs. Ils varient entre 15 et 25 dinars la séance de deux heures pour un élève du primaire qui prend ces cours de soutien en groupe. A titre individuel, la séance varie entre 40 et 50 dinars. Pour les collégiens, les tarifs diffèrent d’une matière à l’autre, allant de 20 à 30 dinars. Les lycéens en classes terminales payent 50 dinars la séance en groupe. Ces tarifs diffèrent d’un enseignant à l’autre. Ils sont assez chers pour des profs soi-disant de renommée, et dont les places dans leurs groupes sont réservées dès les vacances. On n’attend même pas la rentrée des classes !

Mme Dorra, mère au foyer, qui a un enfant inscrit au baccalauréat sciences expérimentales, nous confie que les tarifs pratiqués sont loin d’être à la portée des familles à revenu moyen. «Nous faisons de grands sacrifices pour assurer ces cours de soutien. Je suis dans l’obligation de réduire mes dépenses en matière d’alimentation, de produits de propreté. Depuis quelque temps, l’achat d’un vêtement neuf pèse sur mon budget. Aujourd’hui, payer les tarifs des cours particuliers est notre priorité».

Donc, un élève qui prend des cours de soutien en trois matières nécessite un budget mensuel oscillant entre 240 et 380 dinars. Cette somme va augmenter pour les élèves qui prennent des cours individuels. «Si le niveau de l’enseignement dans les établissements scolaires était de bonne qualité, je n’aurais jamais recours à ces cours supplémentaires», ajoute Mme Dorra.

Cours particuliers, inégalités des chances

De plus, ces charges financières ne peuvent pas être à la portée de toutes les classes sociales. Ainsi, les élèves appartenant à des familles pauvres sont privés de ces cours de soutien. Malheureusement, l’éducation est loin d’être gratuite, comme le stipule la Constitution. L’école tunisienne, qui, auparavant, était un véritable ascenseur social ne l’est  plus aujourd’hui. Certes, tout le système éducatif est à revoir. Donner des cours particuliers demeure un commerce florissant, où les élèves dont les parents à faible revenu ne peuvent pas en tirer parti. Ainsi, ces pratiques sont telles qu’elles ont aggravé les inégalités sociales et creusé le fossé entre les familles nanties et celles dans le besoin. Cela dit, les élèves ne jouissent pas des mêmes conditions de réussite. L’égalité des chances dans un système éducatif obligatoire et équitable fait encore défaut. Et par la force des choses, plusieurs élèves issus de familles nécessiteuses se trouvent, alors, contraints de quitter les bancs de l’école, à un âge précoce.

L’enfant privé de son temps libre !

Dans le souci d’améliorer le niveau d’apprentissage de leurs enfants, certains parents les obligent à s’inscrire dans des groupes de cours particuliers, dès le primaire. Mais ils oublient souvent que les enfants ont besoin d’un temps libre, sans contrainte pour se reposer et exercer une activité sportive ou artistique. Ils négligent la pression psychologique qu’engendrent ces heures supplémentaires d’apprentissage. Ainsi, avec un calendrier trop chargé, l’élève se trouve obligé de suivre les cours particuliers à des heures tardives après les classes et même le dimanche, seul jour de repos, malgré que ces cours particuliers, comme on l’a déjà évoqué, grignotent les économies des ménages. Ils favorisent les inégalités des chances et affectent la santé psychique de l’enfant, souvent à la merci de ce mode d’apprentissage. Alors, n’est-il pas temps de surveiller de près ces pratiques. Et pourquoi ne pas prévoir des cours de remédiation dans nos établissements scolaires ?

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