Face à la cherté de la vie, l’individualisation des us et coutumes des fêtes matrimoniales s’est, naturellement, imposée. Libres de leurs choix, les jeunes optent pour des usages qui incarnent à la fois leur modernité et «tunisianité».
Nos traditions du mariage sont-elles annihilées ou à la limite en voie d’européanisation ? A vrai dire, il n’est pas facile de répondre à cette question dans la mesure où la société tunisienne est en train de se métamorphoser, toutefois d’une manière hétérogène. Bien que les traditions ancestrales tunisiennes qui distinguent les festivités matrimoniales soient diversifiées au nombre des régions et même communautés et castes tunisiennes, regorgeant ainsi de symboles, rituels apparentés, à leur environnement, climat… etc. — d’une manière globale à leurs propriétés intrinsèques —, elles sont de plus en plus homogénéisées et surtout numériquement réduites. Jadis, les fêtes matrimoniales — comme nous le savions tous — s’étalaient sur 7 jours d’où la fameuse expression «les noces 7 jours et 7 nuits».
Durant cette semaine chargée de festivités, il est question de préparer convenablement les mariées non seulement au jour du mariage mais sommairement à la vie de couple. Mais suite à la modernisation de la société, notamment avec la participation de la femme au marché du travail et sa conquête de tout un pan de libertés avec en prime la liberté de choisir son compagnon, certaines traditions, notamment vestimentaires, ont disparu pour céder la place à un modèle occidentalisé. Aussi, il est à noter qu’avec le peu de temps libre dont dispose la femme occupée, la réduction du nombre des traditions matrimoniales et globalement des soirées s’impose naturellement.
Mais avec l’avènement des jeunes générations, les célébrations matrimoniales ont connu un véritable chamboulement caractérisé essentiellement par une individualisation des traditions. A vrai dire, plusieurs facteurs socioéconomiques, qui sont entrés en jeu, ont favorisé et scellé ces changements. La paupérisation des classes sociales, notamment moyennes, la hausse du taux de chômage, la découverte des nouvelles traditions de l’Occident à travers les divers médias étrangers ont imprégné les jeunes. Ainsi, la sacralisation des traditions a cédé le terrain à une optimisation des choix des usages qui permettent d’organiser et célébrer la fête, non seulement selon les moyens financiers dont disposent les mariés, mais aussi aux dépens de leurs goûts et le degré d’ouverture de leurs familles.
Enterrement de vie de jeune fille : la nouvelle vague ?
Etant réduites à la simple «Outya» couplée ou non à une soirée allouée au dîner du mariage communément appelée «aâcha» mise à part la cérémonie des noces, les fêtes matrimoniales sont limitées à «un minimum de coutumes», communément définies et reconnues par un large pan de la société. Cela n’empêche que d’autres traditions, en l’occurrence occidentales, ont fait leur entrée dans le registre des usages matrimoniaux empruntés par les jeunes. L’enterrement de vie de jeune fille est l’une de ces fêtes auxquelles optent plusieurs jeunes filles pour souvent substituer la «Outya».
Lors de la fête, la future mariée passe la soirée avec ses meilleures amies, sans le futur époux. Elle rassemble de vieux objets représentant son ancienne vie de célibataire, pour les enterrer dans une boîte. Aujourd’hui, cet enterrement a pris plutôt la forme d’une dernière folie avant de se ranger! Les Tunisiennes s’engouent davantage pour cet événement. Passer à la maison, chez une amie voire dans les lounges, l’enterrement de vie de jeune fille constitue un moment d’intimité et de défoulement entre copines et proches. S’agit-il d’une adaptation des coutumes aux moyens financiers dont disposent les jeunes ou d’une simple vague incarnant l’européanisation d’une partie de jeunes couples ? Peut-être les deux à la fois. Mais comme a dit Simone de Beauvoir «Le couple heureux qui se reconnaît dans l’amour défie l’univers et le temps; il se suffit, il réalise l’absolu», alors qu’importent les traditions, l’essentiel n’est-il pas d’aimer ?