«Bent el Machta», exposition personnelle d’Amira Lamti à la galerie Yosr Ben Ammar : Un rituel, ses images, ses sons et ses sens

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L’artiste engage ses œuvres dans des rituels sociaux, divinatoires et cycliques. Elle juxtapose des textiles avec des archives vidéo, des artefacts et des photographies et fait revivre des vêtements aux côtés d’images de sa grand-mère, qui était elle-même une Machta.

La galerie Yosr Ben Ammar présente, dans le cadre de la Biennale d’art contemporain Jaou Tunis, l’exposition personnelle «Bent el Machta», de l’artiste visuelle-photographe Amira Lamti, qui se tiendra à Bhar Lazreg à La Marsa à partir du 13 octobre et se prolongera jusqu’au 30 novembre 2024.

Née à Sousse en 1996, Amira Lamti a obtenu une licence en photographie puis un master de recherche en théorie de l’art à l’Institut supérieur des Beaux-Arts de Sousse.

Amira opte pour la photographie et la vidéographie comme outils empiriques, par lesquels elle fragmente le banal, le quotidien… capturant des moments, des gestes et des rituels. Cela donne lieu à ses propres récits où se juxtaposent des images disparates, fixes ou en mouvement, accompagnés et/ou influencés par le son.

L’élément sonore dans son travail est un catalyseur diégétique, un liant dans la composition audiovisuelle.

Dans «Bent el Machta», elle s’intéresse au rituel lié à El Machta qui dans notre culture tunisienne fait référence à la femme qui guide la mariée à travers le Jeloua, une tradition séculaire qui remonte à l’époque punique. Les femmes qui allaient se marier devaient se rendre au temple de la déesse Ashtar, vêtues d’or, et tourner sept fois autour d’elles-mêmes en invoquant la déesse pour la fertilité. Aujourd’hui, ce rituel est performé au Sahel et à Sfax lors de la soirée Outia. La mariée porte une longue robe dorée et est ornée d’un foulard couleur or. Le rituel, accompagné de chants traditionnels, symbolise la fécondité et la prospérité pour les jeunes mariés. Les Machta sont des sortes de passeuses du temps, des gardiennes de la tradition qui veillent au bon respect de cette pratique séculaire. «Dans cette exposition, le rituel de la mariée, drapée d’or et de bijoux, occupe le devant de la scène comme une reconstitution symbolique des rites anciens. Guidée par la Machta, la mariée accomplit des gestes sacrés —bras tendus, paumes ouvertes et rotation sept fois— canalisant le pouvoir de la déesse Tanit pour invoquer des bénédictions pour l’union et la fertilité. Cela reflète non seulement la soumission aux forces divines, mais aussi un alignement avec les rythmes cycliques de la vie, de la nature et du cosmos. Les rituels de mariage façonnent l’identité, affirment la continuité culturelle et célèbrent l’amour dans ses formes les plus communautaires et les plus sacrées», note Sarah Ben Hafsia, consultante stratégique dans les industries culturelles et créatives, et chercheuse en marketing artistique.

Amira Lamti engage ses œuvres dans des rituels sociaux, divinatoires et cycliques. Elle juxtapose des textiles avec des archives vidéo, des artefacts et des photographies et fait revivre des vêtements aux côtés d’images de sa grand-mère, qui était elle-même une Machta. «“Bent El Machta” honore à la fois la tradition et l’expression contemporaine de Lamti, explorant les niveaux de sens des rites matrimoniaux, où les gestes sacrés deviennent des conduits entre l’expérience individuelle et l’héritage collectif», ajoute Ben Hafsia.

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