Le ministre de l’Intérieur français, Bruno Retailleau, a annoncé une nouvelle circulaire qui redéfinit les conditions de régularisation des étrangers sans-papiers en France. Cette circulaire met l’accent sur la gestion des flux migratoires et introduit un certain nombre de changements dans les procédures de régularisation, notamment pour les travailleurs sans-papiers. Cependant, elle renforce aussi les critères d’intégration et d’exigence. Les sans-papiers doivent désormais s’attendre à des conditions plus strictes.
La fin de la circulaire Valls et une régularisation uniquement “exceptionnelle”
La circulaire Valls, qui était en vigueur depuis 2012, permettait la régularisation des sans-papiers sur la base de certains critères, comme le travail ou la vie familiale. La nouvelle circulaire, présentée par Bruno Retailleau le 23 janvier 2025, vient remplacer cette ancienne réglementation et met en place une ligne de conduite plus stricte, voire un durcissement des critères, rapporte le site infomigrants.net. Il convient de noter que cette circulaire n’a pas valeur de loi et qu’elle laisse une certaine marge de manœuvre aux préfets, qui peuvent choisir d’appliquer ou non les recommandations.
L’un des messages clés de cette nouvelle circulaire est que la régularisation des sans-papiers doit demeurer une exception et ne pas devenir un droit. Bruno Retailleau a insisté sur le fait que seules les situations exceptionnelles devraient permettre l’obtention d’une carte de séjour. En 2023, sur les 450 000 sans-papiers présents en France, seulement 34 734 ont bénéficié de régularisations, ce qui représente un pourcentage inférieur à 8%. Ce chiffre pourrait d’ailleurs diminuer à l’avenir en raison de la nouvelle approche.
Une attention particulière aux travailleurs dans les métiers en tension
Dans un contexte où de nombreux travailleurs sans-papiers se trouvent dans des situations économiques difficiles, la circulaire met en lumière un critère précis pour favoriser leur régularisation. Ainsi, la priorité est donnée aux travailleurs sans-papiers exerçant dans les métiers en tension, tels que ceux recensés par le gouvernement depuis 2021. Ceux-ci pourront demander un titre de séjour pour travailleur temporaire ou salarié d’une durée d’un an, à condition d’avoir exercé une activité salariée dans ces secteurs pendant au moins 12 mois au cours des deux dernières années. De plus, ils devront justifier d’une résidence continue d’au moins trois ans en France.
Cette mesure vise à répondre aux besoins économiques de la France tout en régulant les sans-papiers présents dans certains secteurs clés. Toutefois, cette régularisation n’est pas automatique : elle reste soumise à l’appréciation discrétionnaire des préfets, qui peuvent rejeter un dossier sans fournir de justification détaillée.
Mais l’un des changements les plus notables de cette circulaire concerne la régularisation des sans-papiers sur la base de leur situation familiale. En 2023, plus de 22 000 sans-papiers ont obtenu un titre de séjour pour motif familial, représentant environ deux tiers du total des régularisations. Avec la nouvelle circulaire, Bruno Retailleau entend réduire considérablement ce nombre en favorisant une régularisation basée sur des critères professionnels plutôt que familiaux. En conséquence, les demandes de régularisation pour “vie privée et familiale” devront désormais justifier d’une présence en France d’au moins sept ans, contre trois à cinq ans auparavant. Cette modification devrait entraîner une diminution significative des régularisations familiales.
Des conséquences sévères en cas de refus de régularisation
Un autre changement majeur introduit par la circulaire concerne les critères d’intégration. Il est désormais exigé que les demandeurs de régularisation signent un “contrat d’engagement républicain” dans lequel ils s’engagent à respecter les principes républicains français, tels que la laïcité, l’égalité homme-femme, et la liberté d’expression. De plus, une preuve de maîtrise de la langue française sera exigée, bien que les critères précis de cette exigence ne soient pas encore clairs. Les demandeurs devront également démontrer qu’ils ne représentent pas une menace à l’ordre public et ne sont pas sous le coup d’une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF) non exécutée.
Un autre point important de la circulaire Retailleau concerne le refus de régularisation. En cas de rejet d’une demande de régularisation, la préfecture devra systématiquement délivrer une OQTF à l’étranger concerné, ce qui pourrait entraîner des expulsions plus fréquentes. Cela constitue une grande nouveauté par rapport à la circulaire précédente, qui laissait plus de souplesse à l’administration dans la gestion des refus.
Idem pour les Maghrébins sans-papiers en France
En ce qui concerne les Tunisiens, Algériens ou Marocains… sans-papiers présents en France, ces derniers devront suivre les mêmes critères que les autres étrangers pour demander leur régularisation. Cela implique de justifier d’une présence en France de sept ans, de prouver un niveau de français acceptable, de respecter les principes républicains, et de ne pas avoir d’OQTF non exécutée. Cependant, ceux exerçant dans des secteurs en tension pourront bénéficier de conditions favorables à leur régularisation, notamment s’ils peuvent justifier d’un emploi stable dans ces secteurs.
Ainsi, la circulaire présentée par Bruno Retailleau, si elle favorise certains travailleurs étrangers dans des métiers en tension, elle resserre les conditions pour les régularisations familiales et impose des exigences accrues en matière d’intégration.
Pour les sans-papiers tunisiens, comme pour les autres étrangers, les perspectives de régularisation dépendent désormais plus que jamais de leur situation professionnelle et de leur capacité à répondre aux nouveaux critères d’intégration.