Accueil Société Transtu – Renforcement de la répression et de la prévention face au vandalisme : Le cri silencieux des bus publics

Transtu – Renforcement de la répression et de la prévention face au vandalisme : Le cri silencieux des bus publics

La Société des transports de Tunis (Transtu) a enregistré 174 cas de bris de vitres sur ses bus entre janvier et fin juin 2025, a indiqué mercredi dernier Nabil Masmoudi, directeur central de l’exploitation du réseau bus de l’entreprise publique. Un caillassage de bus qui intrigue, à la veille même de l’entrée en exploitation du nouveau parc, déjà décimé…

La Presse — La Tunisie, à l’instar de nombreux pays en développement, a récemment investi dans un nouveau parc de bus, notamment de fabrication chinoise, pour moderniser son réseau de transport public. Une initiative louable, destinée à améliorer la qualité de vie des citoyens et à dynamiser l’économie. Pourtant, ces nouveaux véhicules, à peine mis en circulation, sont déjà la cible d’actes de vandalisme, un phénomène qui s’ajoute à la décrépitude avancée du parc existant. Une spirale destructrice qu’il faudrait expliquer, avec des solutions durables à apporter face à ce phénomène retors et dévastateur.

La situation actuelle concernant le vandalisme dont les nouveaux bus chinois ont fait l’objet, couplée au mauvais entretien des bus usagés, est un problème complexe aux multiples facettes. Il est essentiel d’explorer les causes et les racines profondes du vandalisme et de proposer des solutions tangibles.

Le signe d’un malaise social

Le vandalisme n’est jamais un acte gratuit, mais souvent le symptôme d’un malaise social profond. Plusieurs facteurs peuvent expliquer la détérioration volontaire des biens publics, notamment les bus, à commencer par la frustration et le sentiment d’exclusion. Une partie de la population, en particulier les jeunes, peut ressentir un profond sentiment de frustration face au chômage, à la précarité et au manque de perspectives.

Ces actes de vandalisme peuvent être une forme d’expression de cette colère, une manière de «se faire entendre» face à un système perçu comme injuste ou indifférent. Il y a aussi le manque de civisme et d’appropriation. Un certain déficit de civisme et un manque de sentiment d’appartenance à la collectivité peuvent exister.

Lorsque les citoyens ne se sentent pas propriétaires des biens publics, ils sont moins enclins à les respecter et à les protéger. L’absence d’une éducation civique forte et continue peut exacerber ce problème. Dans certains cas, le vandalisme peut être une forme de «vengeance» ou de défi envers les autorités. Les retards, les pannes fréquentes, le surpeuplement et l’insalubrité dans les bus usagés ont créé un ressentiment certain chez les usagers.

Les nouveaux bus, bien que symboles d’espoir, peuvent paradoxalement devenir la cible de cette rancœur accumulée si les problèmes de fond persistent. L’effet de mimétisme et l’absence de sanctions aggravent la situation. Le fait de voir d’autres individus commettre des actes de vandalisme sans conséquence pourrait encourager de nouveaux actes. L’absence de surveillance efficace, de caméras, et surtout de sanctions rapides et dissuasives, crée un sentiment d’impunité qui alimente le phénomène.

Bien que les bus soient neufs, des problèmes de conception ou d’adaptation aux spécificités du réseau tunisien tels que l’état des routes, la forte fréquentation pourraient exacerber la fragilité de certains éléments, rendant les dégâts plus visibles et potentiellement incitant au vandalisme si l’entretien suit. Mais comme les bus usagés ont déjà été la cible de détérioration, le calvaire de leur entretien perdure.

Le calvaire des bus usagés

Le problème du vandalisme qui a touché les nouveaux bus est d’autant plus préoccupant qu’il s’inscrit dans un contexte de dégradation avancée du parc existant. Le manque d’entretien est une cause majeure de cette situation. L’ombre persistante de la négligence porte la marque de ce calvaire. Des années de sous-investissement dans la maintenance et le renouvellement du parc ont conduit à une obsolescence et à une vétusté alarmantes des bus.

Les pièces de rechange sont difficiles à trouver ou coûteuses, et les ateliers de réparation manquent de personnel qualifié et d’équipements modernes. Il faut signaler les conditions de travail difficiles pour le personnel de maintenance et de conduite. Ce dernier est souvent confronté à des conditions de travail difficiles, à des salaires insuffisants et à un manque de reconnaissance.

Cela peut impacter leur motivation et leur rigueur dans l’entretien des véhicules. La corruption et la mauvaise gestion contribuent au triste décor. Des allégations de corruption et de mauvaise gestion des fonds alloués à l’entretien peuvent également être à l’origine de cette négligence, détournant les ressources nécessaires à la préservation du matériel roulant. Il y a aussi la sur utilisation et le manque de rotation. Les bus sont souvent sur utilisés en raison du manque de véhicules disponibles, ce qui accélère leur usure et réduit le temps alloué à la maintenance.

Face à ce tableau sombre, il est impératif d’adopter une approche globale et coordonnée impliquant l’État, les entreprises de transport, la société civile et les citoyens: renforcer la sécurité et la dissuasion, prévoir l’installation de caméras de surveillance, équiper les nouveaux bus et progressivement les anciens de caméras de surveillance fonctionnelles et visibles, assurer la présence policière ou des agents de sécurité, augmenter la présence d’agents de sécurité ou de la police dans les points chauds et à bord des bus, surtout aux heures de pointe.

Pour des sanctions rapides et exemplaires, mettre en place un système de poursuites judiciaires et de sanctions effectives pour les actes de vandalisme, avec une communication claire sur les conséquences de ces actes, former les chauffeurs à la détection et au signalement des actes de vandalisme, et les doter de moyens de communication efficaces avec les autorités, répondre aux causes profondes de la frustration sociale par des politiques d’emploi et d’insertion des jeunes, s’attaquer aux problèmes de chômage et de précarité par des politiques économiques et sociales efficaces, créant des opportunités pour les jeunes, relancer le dialogue social, à travers la mise en place des canaux de dialogue entre les autorités, les citoyens et les entreprises de transport pour écouter les doléances et trouver des solutions participatives. Pendant ce temps, la Transtu poursuit le branle-bas de combat dans le transport public.

La Transtu alerte

La Société des transports de Tunis (Transtu) a enregistré 174 cas de bris de vitres sur ses bus entre janvier et fin juin 2025, a indiqué mercredi Nabil Masmoudi, directeur central de l’exploitation du réseau bus de l’entreprise publique. Ces actes de vandalisme, causés principalement par des jets de pierres, ont entraîné 19 blessés parmi les passagers, a précisé Masmoudi lors de son passage sur les ondes de la Radio nationale. 

Il a souligné que ces agressions représentent un coût important pour la collectivité, non seulement en termes financiers mais aussi en raison des interruptions de service liées aux réparations. Le responsable a notamment indiqué que la zone de Tunis 1 a connu 41 incidents, en particulier dans des quartiers tels que Cité Ettadhamen, Mnihla et Sidi Thabet, où les auteurs sont souvent des mineurs.

Appelant à une prise de conscience collective, Masmoudi a exhorté les parents à sensibiliser leurs enfants à l’importance de préserver les biens publics. Il a rappelé que dans certains cas, les parents peuvent être contraints par la justice à prendre en charge les frais de réparation. Dans un effort de prévention, Transtu a récemment lancé des campagnes de sensibilisation dans plusieurs quartiers du Grand Tunis, en partenariat avec diverses parties prenantes.

Selon Masmoudi, les premiers résultats sont encourageants, et la société compte étendre cette initiative à d’autres zones sensibles.

Le vandalisme dont les nouveaux bus ont été l’objet est un signal d’alarme. Il révèle non seulement un manque de civisme, mais aussi des failles profondes dans la gestion du transport public et un malaise social latent. En adoptant une stratégie holistique qui combine répression, prévention, investissement dans l’entretien et dialogue social, la Tunisie peut espérer non seulement sauver ses bus, mais aussi restaurer la confiance de ses citoyens et bâtir un système de transport public durable et respecté. C’est un défi de taille, mais essentiel pour l’avenir du pays.

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