Parler pour ne rien dire. C’est généralement ce qu’on peut dire sur la communication de nos sportifs. Joueurs ou athlètes, entraîneurs et dirigeants, on a l’impression de revivre le même calvaire chaque fois qu’on les entend communiquer à leur manière. Nous ne parlons pas des déclarations et de la présence sur les médias classiques (journaux, radio et télévision), mais aussi sur les «nouveaux» médias qui cartonnent dans le sport, à savoir les sites électroniques, et la communication alternative sur les réseaux sociaux, qui, en ce moment, gagne beaucoup de terrain sur les médias classiques. Par rapport aux grandes nations du sport, il est évident que la communication de nos sportifs est décalée. Posons le problème autrement : pourquoi on est mal à l’aise quand on entend et qu’on regarde la plupart des acteurs sportifs tunisiens parler? Ce n’est pas une impression, ni un préjugé, c’est un fait partagé et admis. Les clubs, les fédérations ne savent pas communiquer, mais se contentent d’informer et de servir l’image du président en exercice.
Les entraîneurs, joueurs et dirigeants, même sur le sport de haut niveau, ne communiquent même pas ou font le strict minimum. Pire, ils peuvent se tromper de mode de communication en disant n’importe quoi, n’importe comment et n’importe quand. Ils ne se retiennent pas, chauffent l’ambiance et les esprits au risque de tomber si bas et, dans d’autres cas, ils se taisent et s’éclipsent quand il faut adresser des messages et soigner une image. La communication est plus qu’une science, elle est un effort minutieux, une alchimie et une intelligence qui permettent d’informer le public, de le rassurer, de le fidéliser, mais aussi d’attirer des sponsors et de développer l’audience. Ça s’enseigne, ça s’exerce, ça se réglemente et ça demande des investissements.
Il y a donc un «gap» effrayant par rapport aux sportifs à l’étranger. Ceux qui savent bien que la communication est un domaine aussi stratégique que celui sportif et économique. Et malheureusement, on ne veut pas apprendre et innover, en se contentant de passer par les médias classiques via le même contenu, et pire, on «dégrade» le contenu et le contenant. Vous pouvez regarder les plateaux télé et les pages facebook pour voir combien la communication dans le sport tunisien est aussi chaotique et improvisée.
Spécialistes et intrus
La communication, étant un domaine pluridisciplinaire et qui ne concerne pas seulement les relations médias, est confiée dans les pays développés à des spécialistes. Le responsable communication n’est pas l’attaché de presse, et n’est pas le «community manager». A chacun son territoire et ses obligations. Nos sportifs, surtout de haut niveau, prennent-ils soin de l’aspect communication ? Dans la majorité des cas, ils sont livrés à eux-mêmes tâtonnant et faisant tout pour séduire, au risque de déranger. Ils sont otages du matraquage médiatique non étudié, ils n’investissent pas sur des spécialistes qui vont leur tracer une approche de communication «rentable» même à court terme. On n’a pas encore perçu, dans notre sport, l’importance capitale d’un responsable communication qui veille à diffuser une image positive et qui sait comment s’adresser au large public, mais aussi aux institutions sportives et aux sponsors. Quand on ne communique pas, c’est une tare, quand on communique mal (mauvais ou messages déplacés), ça l’est aussi. Le sport, c’est un marché au potentiel énorme pour communiquer.
Mais faisons le plus urgent : ancrer la spécialité dans nos clubs et mettre fin à cette communication violente, uniquement virtuelle et partisane, et chasser les intrus qui dilapident les budgets et les montants importants investis.
Rafik EL HERGUEM