Le secteur du ciment est sans conteste un des secteurs les plus consommateurs d’énergie à l’échelle internationale… Si le bilan est lourd, il représente une industrie stratégique pour les secteurs du bâtiment et de l’infrastructure.
Depuis longtemps, le bâtiment est la pierre angulaire de l’économie nationale. Ce secteur miroite la performance en termes de croissance, d’investissement, de création de postes d’emploi, d’amélioration des conditions de vie des populations…
En revanche, il souffre de multiples problèmes structurels (évolution des prix des matières premières, financement bancaire, modalités d’octroi des marchés…), qui se sont aggravés par un contexte économique difficile, caractérisé par la baisse du taux de croissance, le creusement du déficit budgétaire, le ralentissement des investissements…
Afin d’attirer l’attention sur la crise du secteur et ses répercussions sur l’économie nationale, la Fédération nationale du bâtiment (FNB) a organisé, récemment, une conférence de presse au cours de laquelle les professionnels du secteur se sont aperçus de l’indisponibilité de mettre en place des mesures urgentes pour revivifier ce secteur qui ne cesse de perdre de sa valeur et de son importance.
Un secteur trop énergivore
Taieb Ketari, président de la Chambre nationale des producteurs des carreaux céramiques et membre du bureau exécutif de l’Utica, est revenu sur la problématique de l’impact du coût de l’énergie sur les activités des entreprises du secteur. Il indique que malgré son importance, l’industrie cimentière présente deux risques majeurs qui sont la consommation excessive d’énergie et la pollution de l’environnement.
« La situation critique par laquelle passe actuellement le secteur du ciment est due à plusieurs facteurs, dont les plus importants sont l’augmentation des prix de l’énergie pour les industriels, les augmentations salariales successives et la baisse de la productivité. Malheureusement, au fil des années, ce secteur s’est développé sans réelle prise en compte des conditions énergétique et environnementale, ce qui a eu comme conséquence d’importantes quantités d’énergie dépensées inutilement. Faut-il rappeler que les coûts d’énergie nécessaires à l’exploitation représentent 30 à 65% des coûts de production ! », précise-t-il.
Il ajoute que face à cette situation inquiétante, les entreprises du secteur se sont orientées vers l’amélioration de la performance de l’outil industriel nécessaire à la fabrication du ciment. C’est ce qui a mené la majorité des cimenteries à investir dans de nouveaux équipements de haute technologie. «Avec ces investissements énormes et la baisse de la capacité de production, les entreprises du secteur se trouvent, aujourd’hui, dans une situation difficile…», affirme-t-il.
Sur un autre plan, Ketari indique que la hausse des prix des matériaux de construction ne correspond pas à celle des prix des énergies qui ont pris un rythme ascendant et sans arrêt depuis le déclenchement de la Révolution. Autrement dit, l’industriel ne peut pas annoncer une nouvelle hausse des prix des matériaux de construction à chaque fois que les prix des énergies augmentent. Ce qui a impacté directement la performance de ce secteur qui est en perte de vitesse depuis un bon moment. « Les bénéfices de ce secteur ne cessent de minimiser et les chiffres officiels peuvent confirmer ce constat. A cet égard, la situation des entreprises du secteur n’est plus rassurante avec notamment une baisse de la production, de l’investissement, de la main-d’œuvre…Si ces augmentations continuent de cette manière, l’industriel se trouve dans une situation catastrophique et tout le secteur du bâtiment est menacé», affirme-t-il.
Un consommateur qui vit au jour le jour
Un autre point qui pose régulièrement problème, c’est le consommateur. Ketari indique que la régression du pouvoir d’achat du Tunisien a un impact direct sur le secteur du bâtiment d’une manière générale. « Le consommateur final devient sensible à ces augmentations et se trouve dans la difficulté d’acheter ces produits connaissent une hausse continue depuis des années…Avoir un bâtiment n’est plus prioritaire en Tunisie avec un consommateur qui vit au jour le jour et gère son quotidien d’une manière floue…
A vrai dire, dans un contexte économique exsangue couplé à un déficit énergétique colossal et croissant, les cimentiers se sont trouvés face à un dilemme : la spirale des majorations des prix induite par l’augmentation tarifaire de l’énergie, d’un côté, et l’érosion du pouvoir d’achat des citoyens, de l’autre », souligne-t-il.
Pour surmonter ces obstacles, Ketari affirme que les solutions sont aux mains de nos décideurs qui devraient y être impliqués et prendre des initiatives. « Pour améliorer notre productivité, on a besoin de crédits pour s’orienter vers l’amélioration de la performance de l’outil industriel en investissant dans de nouveaux équipements de haute technologie, ce qui nous coûte énormément cher…
Nos décideurs devraient prendre au sérieux ces difficultés pour aider ce secteur stratégique à sortir de cette impasse qui a de très lourdes conséquences, qui a perduré, mais qui nous mène vers le désespoir», ajoute-t-il.