Il est temps de revoir les stratégies nationales dans le domaine pour faire bénéficier la population des migrants dans les pays d’accueil de son droit d’accès à la santé, à l’éducation et à l’emploi. Cela exige une volonté politique juste et réaliste, doublée d’un cadre juridique et institutionnel favorable.
Selon l’Unhcr, plus de 70 millions de personnes dans le monde, dont un tiers de réfugiés, ont été contraints d’abandonner leurs foyers, fuyant, à contrecœur, les affres de la guerre et de la misère. Sous nos cieux, le nombre de réfugiés et demandeurs d’asile a presque doublé, situé, actuellement, à hauteur de 3.000 au total. Certes, ce surplus des flux migratoires est tellement pesant qu’il met le pays face à plusieurs défis dont, en particulier, leur prise en charge sociale, sanitaire et sécuritaire. Ce constat est bien réel, dans la mesure où nos centres d’accueil des migrants notamment dans le sud tunisien, n’assurent plus les conditions de vie les plus rudimentaires. D’autres migrants, probablement non identifiés ou repérés, se sont trouvés, hélas, livrés à eux-mêmes. Sans vivres ni toit et encore moins le droit d’accès à la santé et à l’éducation. Et partant, être la cible de tous les risques d’agressions ou de surexploitation dans des emplois précaires très mal rémunérés s’avère un simple corollaire.
Pourtant, signataire de la convention de l’Unhcr de 1951 et de son protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés, la Tunisie semble n’avoir guère honoré ses engagements onusiens. Même pas une instance d’accueil et de promotion ou un cadre légal de protection. Alors que l’adoption d’un projet de loi sur l’asile, finalisé depuis 2012, tarde à venir. La question migratoire pose encore problème. Cela est vrai, ici et ailleurs, particulièrement dans le monde arabe, où les politiques nationales n’arrivent pas à s’en sortir. En Tunisie, « l’expérience en matière d’accueil de migrants et de réfugiés et de scolarisation de leurs enfants semble modeste et en deçà des attentes », révèle M. Mounir Ben Hassen membre du comité directeur du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (Ftds).
Cette déclaration, faite samedi dernier à la TAP, intervient en marge d’une rencontre consacrée à la présentation du rapport des pays arabes sur la migration. A ce niveau, jamais la Tunisie n’a été un pays d’accueil. Pourtant, elle l’était en 2011, où le camp de Choucha, à la frontière avec la Libye, avait abrité à l’époque un flux migratoire jamais connu dans l’histoire. Soit un million ou presque de nos voisins libyens, y compris d’autres nationalités d’Afrique subsaharienne. La crise était telle qu’on avait du mal à la gérer. Intenable situation, où le gouvernement tunisien, rappelle-t-il encore, a été confronté à plusieurs défis, dont notamment la scolarisation d’enfants de réfugiés et de migrants.
C’est que notre pays n’est, vraisemblablement, qu’un couloir de transit. Il n’a ni les moyens de sa politique migratoire ni les mécanismes d’application juridiques. Et pour cause. Un grand nombre d’enfants de familles de migrants ont été privés de scolarisation en raison des conditions matérielles des parents et l’incapacité à s’intégrer dans la société. Pour eux, la langue demeure aussi un facteur bloquant. Et M. Ben Hassen de généraliser, « les pays arabes sont responsables et doivent garantir la scolarisation de ces enfants, afin de faciliter leur intégration… ». Que recommande le rapport mondial des pays arabes sur la migration ? Il est temps de revoir nos stratégies nationales dans le domaine pour faire bénéficier la population des migrants dans les pays d’accueil de son droit d’accès à la santé, à l’éducation et à l’emploi. Cela exige, toutefois, une volonté politique juste et réaliste, doublée d’un cadre juridique et institutionnel favorable.