Accueil Culture «Guirra» de Fadhel Jaziri, actuellement dans les salles : Le poème épique au cinéma

«Guirra» de Fadhel Jaziri, actuellement dans les salles : Le poème épique au cinéma


Le film «Guirra» de Fadhel Jaziri est sur nos écrans. Après la première aux JCC, il sera en sélection officielle au festival de Khouribga au Maroc du 18 au 21 décembre.


De prime abord on pourrait reprocher au film de Jaziri son côté théâtral où tous les acteurs font du Jaziri. Les dialogues aussi qui sont pourtant écrits dans un dialecte tunisien parfait, un travail d’orvèfre… restent dans le même ton dans la bouche des personnages… mais ce n’est qu’une approche «superficielle» des choses. Force est de croire que pour entrer dans ce film il nous faut des clés de lecture que le réalisateur lui-même détient parfois…

«Guirra» est un cinéma très particulier qu’on pourrait aussi appeler d’essai et le réalisateur l’assume.

Un récit historique transposé dans la modernité avec beaucoup de dextérité sans tomber dans l’anachronisme et à notre sens c’est le tour de force. Le film du début à la fin se présente comme un poème épique avec un narrateur qui conduit le tout et raconte l’histoire de «Saheb Al Himar» (le personnage de Bouzid) qui a conquis la ville de Kairouan, en a fait un fief pour l’islamisme fondamental ( extrémiste) en gouvernant le peuple avec le bâillon et le clou. C’est aussi une sorte de vision qui prédit un possible futur si le paysage politique continue sur ce rythme on n’est pas loin de la catastrophe des groupuscules qui commandent au nom de la religion.

La musique de Guirra est un point particulier dans le film, puisque l’instrument de base étant la zokra dans une version très proche de l’univers du film. En deux mots, avec cet instrument, Jaziri a réussi des phrases musicales modernisées et de haute facture du début jusqu’au générique de la fin.

Le réalisateur nous donnera ensuite ses clefs de lecture quant à la langue utilisée dans le film «L’écriture de « Guirra » est une écriture épique. Dans le cinéma cette écriture épique est très différente de l’écriture réaliste. Il y a de grands cinéastes en Tunisie qui font dans l’écriture réaliste et qui utilisent la langue dans son usage quotidien et il le font très bien. Dans «Guirra» on présente un conte qui ne raconte pas ni l’hier ni l’aujourd’hui mais « le maintenant » qui se poursuit avec un langage particulier. C’est un essai cinématographique où nous avons créé des rythmes pour que le spectateur ne s’ennuie pas. Oui la langue reste toujours froide même dans une salle de torture parce que pour les bourreaux c’est un travail comme un autre, pour eux ça n’a rien de personnel.

Tout le film qui a commencé avec une pièce de théâtre depuis 2011 n’est qu’un cri d’alarme qui pourrait mettre en garde sur ce qui peut nous arriver si ce contexte se poursuit .

«Guirra» est un essai cinématographique avec une écriture particulière qui porte l’empreinte de Jaziri et où il y a une recherche somme toute qui fait appel à un spectateur averti qui vient pour découvrir un cinéma particulier, mais aussi pour un spectateur qui cherche à apprécier un jeu d’acteur très bien menée où les comédiens ont acté des personnages épais et hyper-présents. Des acteurs qui semblent avoir beaucoup donné d’eux-mêmes et c’est ce qui donne un plus à «Guirra».

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