Pendant le mois saint, certains cafés et salons de thé ouvrent leurs portes aux non-jeûneurs. Par conviction ou pour d’autres raisons, ces derniers ont décidé de ne pas observer le jeûne comme le reste des pratiquants, et de se rendre dans ces cafés pour prendre tranquillement leur café. Témoignages….
Onze heures du matin, les portes et les fenêtres d’un café sis à Tunis-ville ont été couvertes par du papier de journal, pour garantir une certaine discrétion. Il n’y avait pas assez de monde sauf quelques-uns, qui étaient en train de prendre leur café du matin, et de fumer…
Manel, une jeune trentenaire que nous avons rencontrée, a pris place dans un coin dans ce café pour savourer son café. Munie de son ordinateur portable, cette dernière s’est concentrée sur ses recherches sur le web pour son mémoire de fin d’études. Depuis quelques années, elle a décidé de ne plus pratiquer le jeûne comme tout le monde et de fréquenter les cafés pendant le mois saint. Pour elle, le fait d’observer le jeûne pendant toute la journée l’empêche de bien se concentrer sur ses examens et ses études.
Idem pour Rana qui suit des études universitaires et qui a choisi cette année de ne pas pratiquer Ramadan pour les mêmes raisons. Sauf que Rana préfère prendre son café, chez elle, à l’abri de tous les regards. « Je suis en terminale cette année et je ne veux pas rater mes examens de la session principale. Pour être en forme, j’ai décidé de faire comme si le mois n’existait pas. Je prends mon petit-déjeuner normalement, comme à l’accoutumée pour pouvoir me concentrer sur mes études et réussir l’année ».
Et de renchérir : « D’autant plus que je passe le mois saint en solo, puisque je poursuis mes études dans une autre ville que la mienne, loin de ma famille. Issue d’une famille traditionnaliste et pratiquante, je ne compte pas leur dire la vérité tout de suite. Mais j’ai pris ma décision depuis le début du mois de Ramadan de ne pas le faire pour des rasions relatives à ma santé. Je ne peux pas me passer de mon café matinal. Sans lui, je ne me sentirais pas en forme…».
Si certains étudiants, bacheliers, préfèrent ne pas jeûner pour pouvoir passer leurs examens dans de bonnes conditions, d’autres sont obligés de ne pas le faire, parce qu’ils souffrent de problèmes de santé. C’est le cas de Najet, une femme âgée de cinquante ans et qui souffre d’un diabète de « type 1 ». Elle ne jeûne plus depuis plus d’une dizaine d’années.
Cette dernière n’hésite pas, elle aussi, à fréquenter les cafés, pendant le mois saint, puisqu’elle doit prendre une collation à des heures précises. « Durant le Ramadan, je fais semblant de jeûner, mais dès que j’ai la possibilité de trouver un petit coin en cachette pour prendre mon café ou mon petit-déjeuner, je n’hésite pas à à le faire. Quand je suis en ville, je me rends dans les cafés ouverts pour pouvoir manger tranquillement. C’est dur de passer ce calvaire de trente jours et de faire semblant de jeûner, alors qu’en réalité je ne le fais pas», confie-t-elle.
Ils sont nombreux et nombreuses à choisir de ne pas pratiquer ramadan et chacun a ses raisons. Il y en a qui sont contre cette hypocrisie sociale, à l’instar de Mehdi qui pense que le fait de jeûner uniquement sans appliquer les quatre autres piliers de l’islam, dont la prière, n’a pas de sens. Pour cette raison, Mehdi a décidé depuis quelques années de renoncer à cette pratique et de ne pas faire Ramadan comme le reste de sa famille. En cachette, il se rend quotidiennement avec ses camarades dans les cafés ouverts, pour fumer, boire et manger en toute discrétion.