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Code des hydrocarbures : Clarifier les règles du jeu, combler le vide législatif

La Tunisie, à l’instar de tous les pays du monde,  a été touchée par les répercussions de la pandémie du Covid-19 sur les prix du pétrole. L’impact sur l’exploration pétrolière demeure important pour un pays comme la Tunisie qui est peu attractive pour les investissements pétroliers, indépendamment de cette crise.

Dans ce contexte, « il est particulièrement important de saisir l’opportunité de la réforme actuelle du code des hydrocarbures pour mettre en place des mesures de gouvernance, d’atténuer le risque d’impact négatif de la crise actuelle sur le secteur pétrolier en Tunisie et préparer le pays à profiter d’un éventuel rebond », précisent les experts Wissem Héni et Amir Shafaie, à l’Institut de gouvernance des ressources naturelles (Nagi), dans une analyse portant sur l’adaptation du processus d’octroi des permis d’exploration aux bonnes pratiques internationales.

D’après les experts, la procédure d’octroi des titres pétroliers et miniers est très vulnérable à la corruption en Tunisie. Le choix des compagnies et les critères de sélection fixés pour cela déterminent en grande partie la capacité des investisseurs à mener à bien leur projet et à faire prospérer le pays. « Le système d’octroi actuel comporte d’importantes faiblesses en termes de transparence, permettant d’ouvrir la porte aux réformes pour apporter les améliorations nécessaires. L’incorporation de nouvelles dispositions relatives à la transparence constituera un message positif pour tous les acteurs, à savoir les compagnies pétrolières, les organes de surveillance et le public en général ».

Défaillances

L’instauration d’un système pour l’octroi des licences pétrolières et gazières répondant aux exigences de bonne gouvernance revêt une importance cruciale pour la prévention de la corruption et la réalisation des résultats escomptés. « Le système tunisien actuel, basé sur le principe de la ‘’porte ouverte’’, comporte des défaillances importantes et se caractérise par son ambiguïté et son opacité, résultant notamment de la faible mise en concurrence », affirment les experts.

Et d’ajouter que ce système d’octroi peut être amélioré en se référant aux bonnes pratiques internationales. Le processus actuel de réforme du code des hydrocarbures lancé par le gouvernement constitue une occasion importante à saisir pour atteindre cet objectif. « La Tunisie pourra ainsi introduire une certaine concurrence en instituant des cycles d’octroi ou ‘’licensing rounds’’ dans des cas spécifiques ou en adoptant un système basé sur le ‘’fichier ouvert’’. En s’inspirant de la norme Open Contracting, la Tunisie peut ainsi prendre des mesures pour plus de transparence tout au long du processus d’octroi, de la phase de promotion à la phase de mise en œuvre », précisent-ils.

Dans cette analyse, les experts mettent en exergue les enjeux liés à la phase d’attribution des titres de recherche et d’exploitation des hydrocarbures, qui sont très importants, et qui, par la suite, seront déterminants pour assurer la qualité des investisseurs et par conséquent le succès de l’investissement et la nature des relations entre l’État et les compagnies concernées. «  Comme le prouve l’expérience internationale, cette étape est également vulnérable à la corruption. Il convient donc de se focaliser sur les signaux d’alerte susceptibles d’affecter le processus d’octroi des permis. La détection de ces signaux facilitera l’identification des cas possibles de corruption et aidera par conséquent à remédier aux défaillances dans chaque système d’attribution des titres pétroliers et gaziers », soulignent-ils.

En Tunisie, différents travaux d’investigation ont permis de dévoiler l’existence de défaillances dans le processus d’octroi des permis. Ainsi, l’amélioration des aspects relatifs à la transparence lors de l’attribution des titres d’hydrocarbures contribuera à minimiser le risque de corruption, en limitant, d’une part, le large pouvoir discrétionnaire dont disposent les autorités concédantes, et d’autre part en facilitant sa détection à travers les informations et documents disponibles afin  d’appuyer les processus de redevabilité .

En effet, « les défaillances sont inhérentes au modèle choisi par la Tunisie en la matière, à savoir le système connu de ‘’la porte ouverte’’. Malgré les efforts fournis par le ministère chargé de l’Energie visant à introduire de la concurrence, jusqu’à présent pratiquement absente, ces tentatives ont rendu le processus ambigu, la procédure semblant dispersée entre plusieurs sources ». De même, le système tunisien se caractérise par son opacité, l’un des traits du modèle de la porte ouverte. En effet, le code des hydrocarbures et ses textes d’application n’exigent pas la publication des informations et des documents expliquant les raisons des différentes décisions d’octroi, ainsi que leurs résultats (comme les contrats, les listes de compagnies, etc.).

Bonnes pratiques

Les experts indiquent que pour pallier  ces insuffisances, « la Tunisie peut s’inspirer des bonnes pratiques et des standards internationaux qui préconisent le recours à la transparence et à la concurrence dans les circonstances adéquates en matière d’attribution des titres pétroliers et gaziers ».

Ces bonnes pratiques liées à la transparence dans le processus d’attribution sont résumées dans la nouvelle norme ‘’Open Contracting’’ que la Tunisie s’est engagée à appliquer dans son plan d’action national OGP 2018-2020. Cette norme peut amplement inspirer le pays lors du processus d’attribution des titres d’hydrocarbures, depuis la promotion des blocs non encore attribués jusqu’à l’exécution des engagements pris en vertu des documents signés et des titres accordés, en passant par la négociation/attribution. « Nous recommandons, sur la base de cette norme, de clarifier les règles du jeu et de combler le vide législatif qui existe au niveau de la délimitation des blocs non encore attribués, ainsi qu’au niveau des étapes précédant le dépôt de la demande officielle. La clarification des confusions qui existent quant au rôle joué par l’autorité concédante et celui de l’entreprise nationale constitue un élément essentiel à prendre en considération pour garantir une procédure transparente ».

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