La pandémie du coronavirus a mis l’hôtellerie en tunisie et dans le monde à genoux, voire au bord de la faillite. Face à cette situation critique, qui s’aggrave de jour en jour, surtout avec la fin de la haute saison, il y a lieu de penser aux solutions susceptibles de relancer l’activité touristique, voire la recréer, en se basant sur ses atouts et ses acquis dont l’hôtellerie. Parmi les problèmes conjoncturels et structurels que doit résoudre le ministère de tutelle, il y a l’épineux dossier de l’endettement hôtelier, qui constitue un véritable défi à relever.
Depuis des années, la question de l’endettement du secteur hôtelier est restée sans réponse. Elle a de multiples origines et certains antécédents qui ont toujours été présent jusqu’à nos jours. «Avec la pratique des crédits hôteliers, l’instauration de procédures avantageuses en faveur des capitaux et l’application des différentes taxes, l’industrie hôtelière s’avère un secteur aléatoire à ses débuts et en déclin par son endettement au temps actuel», relève Hatem Hamdi, expert à l’Unité de recherche à l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne dans une étude qu’il a élaboré baptisée «l’endettement hôtelier en Tunisie : l’image d’un héritage structurel».
L’expert n’a pas manqué de rappeler que le mouvement de la construction des unités hôtelières a explosé de manière substantielle, tout au long des années, que ne l’a été la recette, le taux d’occupation, le niveau de formation touristique et la diversité de l’offre. «Encouragé par l’État pour établir une sous-œuvre hôtelière moderne et à la page, le développement touristique a débuté progressivement depuis les années soixante, ralentissant dès 1990 et modérément depuis la dernière décennie. En misant sur un mono-produit basé sur le balnéaire et une mono-clientèle européenne, le marché tunisien a demeuré non compétitif et non performant», explique M.Hamdi.
Balbutiements
Concurrencée par d’autres destinations méditerranéennes avec une offre diversifiée et innovante, ainsi qu’une stratégie de marketing ultramoderne et une prestation de service de haute qualité, «la Tunisie s’avère paralysée et en perte de vitesse. Ce constat se présente dans l’évolution de flux des recettes de quelques destinations concurrentes pendant les deux décennies de 90 et 2000», explique-t-il.
Ainsi, les recettes touristiques tunisiennes ont été multipliées seulement par deux fois et demi de 948 millions de dollars à 2773 millions de dollars.
Les événements politiques survenus en 2011 ont occasionné une chute marquante de 50% des recettes touristiques et des nuitées globales, également qu’une intensification de l’endettement, particulièrement dans le secteur hôtelier.
Et d’ajouter : «Sous l’impulsion de la réédification d’une base économique nationale, le secteur hôtelier est, dès son balbutiement, pris en otage par la nécessité de contracter des crédits».
Selon une étude de l’Institut arabe des chefs d’entreprises, « les hôtels ont fini par accumuler un encours d’endettement vis-à-vis du système bancaire relativement important». Du début des années 80 jusqu’à la fin de la première décennie de l’année 2000, l’ensemble du remboursement des prêts s’est lourdement majoré par quasiment 18 fois, c’est-à-dire plus de 3000 millions de dinars.
«Au regard des lignes de répartition des dettes, on peut s’étonner de l’importance des crédits à court terme qui représentent à peu près le tiers du total des redevances dont l’objectif est de faire face aux dépenses courantes des hôtels ou couvrir un risque d’impayé. Contrairement aux prêts du moyen et long terme, les taux d’intérêts des prêts à court terme sont souvent élevés et en fonction du marché monétaire, ce qui implique le risque de non-recouvrir les créances, voire l’insolvabilité», souligne l’expert.
L’étude montre que le déséquilibre financier du secteur touristique et hôtelier constitue, actuellement, une lourde charge pour les trésoreries publiques et un fardeau accablant pour les institutions bancaires. Avec un total de 4 milliards de dinars de dettes impayées, soit 7.25% du total des créances bancaires et de l’ensemble des crédits à l’économie (BCT, 2014), le secteur hôtelier s’avère sinistré et en captivité.
Autant dire que la succession des événements sociaux, sécuritaires, économiques et politiques d’après la révolution a eu un impact négatif sur l’affluence de touristes et l’image de la Tunisie comme pays touristique par excellence. «Avec une industrie hôtelière auparavant ruinée d’endettement, outre une série d’attaques terroristes ciblant des zones à vocation touristique, ainsi qu’un Etat fragilisé avec la multiplication des mouvements sociaux et la situation environnementale désolante, un système de gouvernance défaillant s’installe avec l’application de dispositifs ordinaires masquant d’ailleurs les réels problèmes structurels du secteur», précise M.Hamdi.